C’est une image un peu absurde, mais très éclairante : vous êtes à cheval… mais le cheval est mort. Et pourtant, vous continuez à vous accrocher, à insister, à essayer de le faire avancer. Si cette métaphore vous parle, vous êtes peut-être en train de vivre ce que l’on appelle la « théorie du cheval mort ».
La métaphore du cheval mort, ou l’art de nier l’évidence
C’est exactement ce que décrit la fameuse « théorie du cheval mort ». Ce concept, popularisé dans le monde du management et de la psychologie, désigne cette propension très humaine à s’obstiner dans une situation qui n’a plus d’avenir. Au lieu de lâcher prise, on s’arc-boute, on redouble d’efforts, on s’épuise. Pourquoi agir ainsi alors que, clairement, rien ne bouge plus ? Pourquoi continuer à croire qu’en faisant un peu plus, en attendant un peu plus, tout pourrait encore s’arranger ?
Ces comportements absurdes qui trahissent notre acharnement
Quand on refuse de reconnaître qu’un cheval est mort (c’est-à-dire qu’une situation est sans issue), on développe des stratégies… disons, créatives. Voici quelques exemples bien connus des adeptes de l’acharnement :
- Changer la selle : « Si je modifie un détail ici ou là, peut-être que tout ira mieux ». Cela revient à penser qu’un nouveau logo sauverait une entreprise en faillite.
- Faire appel à un nouveau cavalier : l’idée que quelqu’un d’autre fera miraculeusement avancer ce qui est figé.
- Multiplier les réunions, les bilans, les discussions : comme si parler encore et encore d’un mur allait le transformer en porte.
- Investir davantage : en temps, en argent, en énergie émotionnelle. Parce qu’après tout ce qu’on a donné, il faut bien que ça finisse par payer, non ?
- Refuser la réalité : « Il n’est pas vraiment mort… il fait juste une sieste un peu longue ». Comprendre la situation n’est pas réellement sans issue, ça va le faire. Non…
Cela peut prêter à sourire. Mais ces stratégies sont souvent à l’œuvre dans notre quotidien, parfois sans même que l’on s’en rende compte.
Le piège du biais des coûts irrécupérables
Ce phénomène a un nom bien connu en psychologie : le biais des coûts irrécupérables. C’est le raisonnement qui nous pousse à penser que, puisqu’on a déjà tant investi dans quelque chose, il serait absurde d’arrêter maintenant. Comme si les efforts passés justifiaient la poursuite, même quand tout indique que cela ne mènera nulle part.
C’est exactement ce qui nous enferme dans des emplois qui nous éteignent, des relations qui nous brisent, des projets qui ne décollent jamais. On reste par loyauté envers le passé, pas par espoir réaliste pour l’avenir. Ce biais est puissant, mais il est aussi terriblement trompeur. Car ce que vous avez donné ne reviendra pas. Et continuer à s’accrocher ne fera qu’amplifier la perte.
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Êtes-vous en train de « chevaucher un cheval mort » ?
Pas toujours facile de faire la différence entre une période difficile… et une impasse. Voici quelques signaux d’alerte :
- Vous êtes constamment épuisée, mais vous avancez « par habitude » ou « par devoir ».
- Vous répétez sans cesse les mêmes actions, sans obtenir de résultats différents.
- Vous vous justifiez, envers les autres comme envers vous-même.
- Vous idéalisez ce que ça aurait pu être, au lieu de regarder ce que c’est devenu.
- Vous ressentez de la culpabilité à l’idée de lâcher prise, ou une peur de « perdre la face ».
Si vous vous reconnaissez, il est peut-être temps de regarder la situation en face avec bienveillance et lucidité.
Descendre du cheval : un acte fort, pas une défaite
On associe souvent le fait de « lâcher prise » à un échec, à une faiblesse. Pourtant, il n’y a rien de plus courageux que de savoir dire stop. Il ne s’agit pas de fuir les responsabilités ni d’abandonner à la moindre difficulté, mais de reconnaître quand persister devient une forme de maltraitance envers soi-même.
Accepter de « descendre du cheval mort » – c’est-à-dire reconnaître que la situation est sans issue – c’est s’autoriser à rediriger son énergie vers des projets, des relations, des chemins vivants. C’est faire de la place pour autre chose, quelque chose qui a du sens, qui vous nourrit, qui vous fait vibrer.
Vous méritez mieux que de rester figée dans une situation qui ne vous fait plus avancer. Vous avez le droit de changer d’avis. Vous avez le droit de poser un genou à terre, de faire une pause, de respirer. Et vous avez surtout le droit de prendre soin de vous. Alors, si votre cheval ne bouge plus depuis longtemps… peut-être est-il temps de descendre avec dignité, de remettre vos bottes, et de tracer votre route autrement.