« La Belle c’est moi, c’est nous toutes. Et l’endomĂ©triose c’est la BĂȘte, qui nous ronge » : Fleur nous partage son histoire

L’endomĂ©triose est une maladie chronique qui touche actuellement une Ă  deux femmes sur dix dans le monde. Bien que la parole semble de plus en plus se dĂ©lier Ă  son sujet, il n’existe en 2021 toujours aucun vrai traitement. Toutes ces femmes n’ont donc d’autre choix qu’apprendre Ă  vivre avec. C’est ce combat vers l’acceptation que mĂšne Fleur, 44 ans. « Endowarrior  », maman solo, graphiste et femme solaire, elle s’exprime au quotidien sur les rĂ©seaux sociaux sur le compte de son association, La Belle et l’endo. Rencontre.

The Body Optimist : En 2020, vous crĂ©ez une association, La Belle et l’endo, dont le sujet principal est l’endomĂ©triose. Quel a Ă©tĂ© le dĂ©clic qui vous a menĂ© Ă  sa crĂ©ation ?

Fleur T. : « Cela faisait un moment que j’y pensais. Je suis graphiste et ex-modĂšle photo donc l’image est quelque chose qui me plait et les rĂ©seaux sociaux Ă©galement. C’Ă©tait un monde dans lequel je baignais dĂ©jĂ . Lors de ma derniĂšre intervention l’annĂ©e derniĂšre, j’Ă©tais chez moi, j’avais une sonde interne qui me faisait Ă©normĂ©ment souffrir et je me suis aperçue que le fait de me focaliser sur le tricot allĂ©geait considĂ©rablement ma douleur.

Alors je me suis dit : « Et si je partageais toutes ces choses, mon expĂ©rience… ? ». Cela fait plus de 16 ans que j’ai Ă©tĂ© diagnostiquĂ©e donc j’ai vraiment vu Ă©voluer la maladie au fur et Ă  mesure du temps dans la sociĂ©tĂ©, j’ai vĂ©cu beaucoup de choses et je me sens lĂ©gitime Ă  partager tout cela. Donc j’ai créé mes rĂ©seaux et c’Ă©tait parti ! »

Que représente votre association à vos yeux ?

« Mon association est un peu comme mon deuxiĂšme enfant. J’ai tout créé par moi-mĂȘme. Et puis c’est aussi un tĂ©moignage de mon histoire personnelle non seulement pour moi me permettre de regarder rĂ©trospectivement le chemin parcouru, mais aussi pour ma fille. Je suis Ă©mue de le dire, mais lorsque je raconte quelque chose sur mon blog, eh bien j’imagine ma fille quand elle sera plus grande, puisqu’actuellement Rose n’a que 6 ans et demi. En fait, c’est Ă  elle que j’Ă©cris. Je me dis qu’ainsi elle comprendra peut-ĂȘtre son histoire si particuliĂšre et ce que nous avons vĂ©cu.

Avec ma communautĂ©, nous ne vivons pas exactement la mĂȘme chose, car l’endomĂ©triose se manifeste de plein de façons et Ă  des Ăąges trĂšs diffĂ©rents. Une chose est sĂ»re, ce groupe est important Ă  mes yeux. J’ai parfois eu envie d’arrĂȘter, car cela me prend au minimum deux heures par jour, mais dĂšs que je reçois un message d’un.e abonnĂ©.e, je me dis que cela Ă  une rĂ©elle utilitĂ© et ça me rebooste. Et le soutien va dans les deux sens ! Ce n’est pas un accomplissement, car ce n’Ă©tait pas le but de ma vie, mais il est clair que c’est un moteur. »

Justement ce soutien que vous avez l’occasion d’apporter Ă  vos abonnĂ©.e.s, est-ce quelque chose que vous auriez aimĂ© avoir lorsque vous Ă©tiez plus jeune ?

« Totalement et c’est aussi une des raisons pour lesquelles j’ai créé ma page puis cette association La Belle et l’endo. Je n’avais pas de soutien moral Ă  l’Ă©poque. Il y a 17 ans, l’endomĂ©triose Ă©tait peu connue. Il y avait quoi ? Deux livres sur le sujet ? Et encore, ils ne donnaient pas envie. Les mĂ©decins ne connaissaient pas trop : il y avait une errance. Donc oui, j’ai voulu crĂ©er un rĂ©confort, un doudou auquel j’aurais voulu pouvoir me raccrocher Ă  ce moment-lĂ .

C’est pourquoi j’ai parfois recours au rire, Ă  la lĂ©gĂšretĂ© mĂȘme si je sais aussi ĂȘtre sĂ©rieuse quand il le faut. J’arrive Ă  crĂ©er par exemple un certain Ă©quilibre en jonglant avec les moyens de communication. Par exemple la story me concerne plus moi, Fleur au quotidien, des produits que je teste, du maquillage et tout plein de petites choses qu’une femme aime et vit. Le reste des rĂ©seaux sont eux plus d’ordre associatif et sur mon blog j’Ă©cris vraiment mon expĂ©rience, et c’est cela qui plait beaucoup d’ailleurs. »

Ce nom, « La Belle et l’endo », est-ce un clin d’Ɠil Ă  la Belle et la BĂȘte de Disney, comme on pourrait le prĂ©sumer ? Veut-il dire quelque chose en particulier ?

« Oui, c’est le rĂ©sultat d’un long brainstorming avec mon meilleur ami qui travaille dans une boĂźte de communication. Il me connait bien. Il savait que je voulais quelque chose de positif, en rapport avec l’image et la beautĂ© ainsi que bien sĂ»r l’endomĂ©triose. Cette analogie avec Disney Ă©tait parfaite.

Évidemment, la Belle c’est moi, c’est nous toutes, puisque je parle de se sentir jolie malgrĂ© la maladie. Et l’Endo c’est la BĂȘte, qui nous ronge. Ce n’est pas vraiment un conte de fĂ©es, mais on essaie que cela se passe bien quand mĂȘme. »

En tant qu’endowarrior , qu’est-ce qui a Ă©tĂ© le plus difficile pour vous dans ce combat contre la maladie ?

« D’abord j’aimerais dire qu’il y a un cĂŽtĂ© combat, mais que ce n’est pas tout. Car l’endomĂ©triose, on n’en guĂ©rit pas puisqu’il n’y a pas de traitement, on vit avec. Cela ne sert Ă  rien de se battre, il faut s’adapter.

Pour moi, le plus dur, ça a Ă©tĂ© les fois oĂč, du fait de la maladie, je suis partie me faire opĂ©rer Ă  plus de 70 km de chez moi et oĂč j’ai laissĂ© ma fille Ă  mes parents sans savoir quand j’allais revenir et avec la peur au ventre de ne jamais revenir. Dans ce contexte, j’ai mĂȘme fait un testament et une lettre Ă  ma fille au cas oĂč… Et je vous assure que c’est trĂšs douloureux, d’ailleurs je suis Ă  ce jour encore incapable de les relire. C’est un Ă©norme traumatisme d’en arriver Ă  penser de telles choses.

Avoir eu un enfant a donnĂ© une autre dimension Ă  ma vie. Le fait de savoir qu’il peut m’arriver quelque chose, ce n’est pas pour moi que cela me fait peur, c’est pour elle, de la laisser orpheline… »

Photo de Sophie Thouvenin

Au quotidien et au travers des rĂ©seaux sociaux, vous militez pour donner de la visibilitĂ© Ă  l’endomĂ©triose. Le but est que les mĂ©decins en connaissent de plus en plus sur la maladie, afin d’ĂȘtre plus Ă  mĂȘme de la prendre en charge. C’est en effet en moyenne 7 longues annĂ©es d’errance mĂ©dicale Ă  l’heure actuelle. Qu’avez-vous ressenti lorsque votre diagnostic a Ă©tĂ© posĂ© ?

« Pour moi la maladie n’a pas Ă©tĂ© foudroyante. Elle s’est installĂ©e avec le temps sans que je comprenne ce qu’il m’arrivait puisqu’Ă  l’Ă©poque, encore une fois, on ne parlait pas d’endomĂ©triose. On ne savait pas. Donc c’Ă©tait seulement un mot. Comme je n’avais pas d’information, je ne pouvais pas stresser autant que certaines femmes le peuvent de nos jours, bien que je sois consciente qu’il s’agit uniquement de mon ressenti et que cela puisse en rassurer d’autres.

Alors bien sĂ»r j’avais conscience que ce n’Ă©tait pas normal : ce n’est pas agrĂ©able de se faire opĂ©rer, de se faire mettre sous mĂ©nopause artificielle. Mais en fait je ne stressais pas autant que si j’avais eu toutes les informations auxquelles on a accĂšs aujourd’hui. »

Aujourd’hui, Ă  travers et peut-ĂȘtre au-delĂ  de la maladie, comment vous considĂ©rez-vous en tant que femme et en tant que personne ?

« Je suis une femme avec toutes ses facettes : une maman, une amie, une amoureuse, une sƓur, une enfant aussi. L’endomĂ©triose m’a beaucoup fait souffrir, mais elle m’a aussi permis d’apprendre Ă  m’adapter sur tous les plans. Je suis bien plus posĂ©e maintenant qu’il y a quelques annĂ©es. »

Vous vous dĂ©crivez aussi comme une « influenceuse de l’endomĂ©triose ». Le terme d’influence est quelque chose que l’on entend de plus en plus. Cela tient Ă  donner la tendance. Bien Ă©videmment, l’endomĂ©triose n’est pas une mode, loin de lĂ . Mais avez-vous l’impression qu’il y a une prise de conscience sociĂ©tale, ou du moins que les langues se dĂ©lient davantage Ă  ce sujet ?

« Certain.e.s professionnel.le.s peu scrupuleux.euses parlent de « maladie Ă  la mode ». Je dirais plutĂŽt que oui plus la parole se libĂšre, plus on se rend compte que beaucoup de femmes sont atteintes d’endomĂ©triose. Ce que j’essaie de faire passer comme message est que nous ne devrions pas nous en sentir gĂȘnĂ©es et que cela ne nous empĂȘche pas de nous aimer et de nous sentir belles.

Je me dĂ©cris comme « influenceuse de l’endomĂ©triose », car les rĂ©seaux sont un moyen trĂšs puissant pour communiquer. Je me suis rendu compte au fil du temps, que ma communautĂ© est friande de mes bons plans, de mes avis sur tel ou tel produit en rapport avec la maladie, mais aussi et surtout avec le fait de se sentir bien. Cela s’est fait assez naturellement en fait. »

Ainsi, au fil des posts, Fleur raconte comment elle s’improvise la Belle de l’histoire malgrĂ© sa maladie. Dans le mĂȘme temps, elle en profite pour briser le tabou et sensibiliser, pour pouvoir combattre. L’Ă©tĂ© dernier, elle a rĂ©alisĂ© une campagne de financement pour la recherche ComPare Endo et rĂ©ussi Ă  rĂ©colter 550 euros. Encore Ă  l’heure actuelle, son association reverse 20 % des recettes qu’elle obtient grĂące Ă  la vente de certains produits.

Les endogirls ne sont plus des cas isolĂ©s ! C’est une rĂ©elle communautĂ© dont les problĂ©matiques doivent ĂȘtre prises en compte par la sociĂ©tĂ©. D’ailleurs, nous vous conseillons de ne pas rester seule et de parler de vos symptĂŽmes, de vos douleurs librement, sans tabou. Sur nos forums par exemple.

Merci Ă  Fleur d’avoir rĂ©pondu Ă  nos questions. Vous pouvez suivre ses aventures au-delĂ  de notre article, sur son compte Instagram : @la_belle_et_l_endo. Mais aussi sur son site labelleetlendo.fr et son blog.

Léonie Bourbon
Léonie Bourbon
À travers mes articles, je vise Ă  divertir, Ă©duquer et inciter Ă  la rĂ©flexion, en partageant des histoires qui touchent le cƓur et l'esprit.
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