Cheapflation : quelle est cette nouvelle pratique douteuse dans la grande distribution ?

L’information ne vous a pas échappé dans les rayons du supermarché. Certaines denrées sont devenues inaccessibles et relèvent désormais du « privilège ». Vous avez beau avoir un panier très mince, le coût total de vos achats est semblable à celui d’un gros caddie bien rempli. Si l’inflation y est pour beaucoup, des enseignes malhonnêtes n’hésitent pas à surfer sur ce contexte financier délicat pour gonfler leur prix tout en abaissant la qualité de leur produit. Ce phénomène baptisé « cheapflation » vous fait payer plus cher pour des aliments fabriqués avec des matières premières « bas de gamme ». Mais ça, les marques se gardent bien de le mentionner. Éclairage sur cette pratique déloyale qui coûte à votre santé et à votre portefeuille.

Cheapflation : qu’est-ce que c’est au juste ?

Depuis le début de l’inflation, vous avez certainement revu votre mode de vie à la baisse. Dans les allées des supermarchés, vous mesurez chaque dépense. Mais malgré votre vigilance financière et vos sacrifices gustatifs, vous vous retrouvez tout de même avec une note exorbitante, digne d’une famille nombreuse. Vous vous dites certainement que « c’est normal » au vu de la conjoncture actuelle et vous n’y faites presque plus de cas.

Pourtant, certains produits que vous achetez au prix fort ont une composition plus médiocre qu’auparavant. Et n’allez pas croire que c’est une décision faite à contrecœur. Cette détérioration nutritive est totalement intentionnelle. Cette pratique commerciale porte un nom : il s’agit de la cheapflation, contraction du mot « cheap » qui signifie « bon marché » en anglais et « inflation ». La cheapflation est vicieuse et passe totalement inaperçue dans les rayons.

Vous pensez acheter le même produit alors que les marques « propriétaires » ont dégradé sa formule ni vu ni connu. Comme le rapporte une étude réalisée par l’ONG Foodwatch, ce concept se traduit par une hausse du prix de base et un net recul de la qualité. Les marques adeptes de la cheapflation suppriment ou substituent un ingrédient par un autre, moins coûteux et donc par ricochet, plus « douteux » pour se faire une marge plus grande. C’est au dos de l’emballage que la cheapflation prend tout son sens.

Selon le décryptage de l’ONG, le colin d’Alaska à la bordelaise de la marque Findus par exemple n’a presque plus rien à voir avec le produit de la mer que vous connaissez bien. Avec 75 % de chair de poisson en moins dans la recette, difficile de parler de « colin ». Pourtant, malgré cette révision radicale, le prix au kg a subi une hausse de 47 %. Bien qu’elle soit vicieuse, la cheapflation n’est pas interdite par la loi.

Six marques dans le viseur de Foodwatch

Avec la cheapflation, il y a arnaque sur la marchandise, mais les consommateur.ice.s n’y voient que du feu. Cette tactique que les marques appliquent en catimini est scandaleuse dans le sens où elle « trompe » les acheteur.se.s. Elle se caractérise par son manque criant de transparence. Les modifications apportées au produit ne s’affichent nulle part. Impossible donc de savoir si vous sortez le billet pour de la camelote gustative.

D’ailleurs Findus n’est pas la seule enseigne à faire de la cheapflation son nouveau crédo. Dans son rapport, Foodwatch pointe d’autres marques dont After Eight, Bordeau Chesnel, Fleury Michon, Maille et Milka. Alors que le gouvernement réclame plus de clarté sur les packagings et ambitionne de renforcer les critères du Nutriscore, la cheapflation reste une duperie autorisée.

« Les changements de recettes sont quasi imperceptibles, on a de moins en moins d’ingrédients nobles alors que les prix dans les rayons augmentent parfois jusqu’à près de 50 %. Mais jusqu’où iront-ils ainsi ? », s’agace Audrey Morice, chargée de campagne chez Foodwatch

De leur côté, les marques se défendent en avançant l’envolée des coûts des matières premières et en remettant la faute sur les événements défavorables qui perdurent. Elles évoquent notamment l’épidémie de grippe aviaire et la flambée des prix liée à la guerre en Ukraine. Même s’il y a une part de vérité dans leur plaidoirie, les marques trouvent aussi un intérêt « personnel » dans la cheapflation.

Le cheapflation, une pratique commerciale crasse parmi tant d’autres

Même si l’inflation pèse aussi sur les marques et leur capital, elles tentent toutes les ruses pour en sortir gagnantes, quitte à verser dans l’entourloupe. D’ailleurs, la cheapflation succède à d’autres filons commerciaux assez douteux. Avant elle, vous avez certainement entendu parler de la « shrinkflation ». Un stratagème rodé qui consiste à réduire la quantité du produit, mais à camper sur le même prix.

En résumé, vous avez plus d’air dans votre paquet de chips, mais à la caisse, il ne bouge pas d’un centime. Même écho avec les bouteilles d’eau, qui ont perdu des centilitres, mais dont le prix reste inchangé. Contrairement à la cheapflation qui n’a suscité guère de réaction politique, cette pratique avait été qualifiée « d’arnaque » par le ministre de l’Économie Bruno Le Maire.

Dans le même registre, mais sur un ton encore plus fourbe, il y a également la « greedflation ». Concrètement, les marques jouent avec l’inflation et s’en servent pour gonfler artificiellement les prix. Pourtant, elles ne sont pas forcément impactées. Autant d’anglicismes pour dépeindre une même cupidité industrielle.

Avec la cheapflation, les marques font peut-être quelques bénéfices, mais elles ternissent également leur image et rebutent les consommateur.ice.s averti.e.s. Pour militer contre ces parades commerciales odieuses, pourquoi ne pas répondre au challenge annuel « Février sans supermarché » ? 

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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