Cela fait quatre décennies qu’elle n’a pas décroché un petit rictus. Si certaines femmes se barbouillent de crème de Jouvence pour garder une apparence juvénile, Tess Christian, elle, garde le visage fermé et s’interdit de sourire. Elle rit intérieurement, gardant toujours une mine impassible, voire froide. Une technique radicale qui a peut-être préservé sa peau, mais qui a certainement accéléré le vieillissement de sa santé mentale.
Une stratégie « plus naturelle que le Botox » selon elle
Alors que les jeunes femmes trichent sur leur âge et veulent paraître « plus mûres », les cinquantenaires, elles, cherchent à inverser le cours du temps sur leur peau. Nostalgiques de la vingtaine, mais surtout soumises aux dures lois de la beauté, elles refusent de voir leur reflet changer dans la glace. Certaines courent dans les centres de chirurgie esthétique tandis que d’autres exécutent des routines interminables, qui occupent la moitié de leur retraite.
Ces femmes, exposées à un idéal inatteignable, partagent toutes un rêve commun : avoir la jeunesse éternelle. C’est le cas de Tess Christian, une femme de cinquante ans, qui garde ses lèvres en ligne droite depuis l’adolescence. Au milieu de ses amies solaires et enjouées, Tess dénote. Alors que les sourires retentissent, elle garde un air renfrogné comme si aucune de ces joutes humoristiques ne l’atteignait. D’un regard extérieur, on pourrait croire qu’elle s’ennuie ou qu’elle snobe les autres. Pourtant, si elle ne répond pas « physiquement » aux blagues de ses amies, c’est pour une tout autre raison. « Je n’ai plus de rides parce que j’ai appris à contrôler mes muscles faciaux », explique-t-elle dans les colonnes du Daily Mail.
En quarante ans, ces traits n’ont presque pas bougé d’un centimètre. Il n’y a pas une fissure au coin de sa bouche ni une patte d’oie sous ses yeux. Tess fait partie de ces vampires beauté qui prennent les diktats un peu trop au sérieux. Convaincue d’avoir trouvé le meilleur rituel de Jouvence, elle n’a jamais fait tomber ce masque impassible, même dans les événements qui le nécessitent. Ainsi, à la naissance de sa fille, elle n’a pas montré un signe de réjouissance. « Oui, je suis vaniteuse et je veux rester jeune. Ma stratégie est plus naturelle que le Botox et plus efficace que n’importe quelle crème de beauté ou soin du visage coûteux », a-t-elle clamé.
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Quand les normes de beauté virent à l’obsession
Très tôt, Tess a été conditionnée à ravaler ses émotions et à ne jamais les présenter au monde. Élève dans une école catholique aux règles strictes, elle s’est pliée à cette esthétique de marbre et l’a conservée au-delà des bancs scolaires. Finalement, ce qu’elle a d’abord vécu comme une privation est devenu son gimmick à elle, sa signature visuelle.
D’ailleurs, ses figures d’inspiration n’ont pas été les filles du gang Kardashian ni les it-girls en vogue de la toile. Tess a pris exemple sur Marlène Dietrich et d’autres actrices d’époque. Sur tous les clichés en noir blanc, celle qui a campé « l’Ange Bleu » ne révèle jamais ses dents et pose comme sur les photos d’identité. Pionnière de l’expression faciale « pince sans rire », elle a conforté Tess dans son choix de ne pas rire. Même sur son portrait de mariage, elle a gardé la bouche en berne et n’a pas dérogé à son sérieux. La froideur imprimée sur la face, c’est quasiment devenu une seconde nature. Ses amies la surnomment « Mona Lisa », mais « Mercredi Addams » lui irait aussi à ravire.
Cette paralysie volontaire du visage illustre très bien les ravages des standards de beauté. Si Tess arbore une peau « lisse », sa santé mentale est probablement (un peu) plus abîmée. Les chercheurs le disent eux-mêmes : un rire, qu’il soit forcé ou naturel, améliore le bien-être. Se priver de sourire est donc peut-être bon pour la peau, mais pas pour l’esprit.
Les rides ne sont pas des défauts, mais des souvenirs
Se priver de sourire pendant quarante ans pour « faire moins que son âge » peut sembler extrême. Or, ce ne sont que les conséquences d’une société ouvertement âgiste. Pourtant, contrairement à ce que nous fait croire la société, qui ne cache plus son problème avec l’âge, les rides ne sont pas disgracieuses.
Alors que les opérations marketing autour des crèmes dites « anti-âge » se durcissent et que la chirurgie devient de plus en plus une évidence chez les séniors, il est temps de rappeler que les rides sont de belles traces de notre histoire personnelle. Elles se sont creusées au gré des fous rires avec nos proches, se sont prolongées à chaque moment complice partagé et aujourd’hui, elles racontent des souvenirs.
Notre peau est un livre ouvert alors pourquoi laisser une page blanche quand on peut la combler de mille et un récits ? S’interdire de sourire pour se protéger des rides c’est aussi s’interdire de vivre des moments précieux. C’est renoncer au bonheur pour correspondre à une certaine définition de la beauté. Or, la vraie beauté réside dans un sourire authentique, des yeux pétillants, un visage en mouvement.