Elles attirent l’œil, promettent des économies et rythment les courses hebdomadaires : les promotions en supermarché sont devenues un levier incontournable de la consommation. Sauf que derrière ces rabais alléchants, que disent réellement ces offres sur nos habitudes alimentaires – et surtout, sur leur impact potentiel sur notre santé ?
Une avalanche de promos… peu favorables à la santé
Une étude récente menée par plusieurs associations, dont Foodwatch, met en lumière une réalité préoccupante : les promotions ciblent massivement des produits que les autorités sanitaires recommandent pourtant de limiter. L’analyse porte précisément sur 4 726 promotions, recensées dans 40 catalogues issus des 5 grandes enseignes françaises : Carrefour, E.Leclerc, Intermarché, Lidl et Coopérative U. Objectif : comparer les produits mis en avant aux recommandations du Programme National Nutrition Santé (PNNS).
Les résultats sont sans appel : près de deux tiers (66 %) des promotions concernent des produits classés comme « à limiter », en raison de leur teneur excessive en sucre, en sel ou en gras. Cela inclut notamment des boissons sucrées, des biscuits industriels, de la charcuterie, ou encore des plats préparés. Pire encore, près de la moitié des produits promus sont ultratransformés, et 39 % affichent un Nutri-Score D ou E.
À l’inverse, seuls 12 % des produits mis en promotion sont considérés comme favorables à la santé, selon les critères nutritionnels officiels. Il s’agit principalement de fruits, de légumes, de céréales complètes ou de produits non transformés.
Des choix marketing lourds de conséquences
Ce déséquilibre ne doit rien au hasard. Les enseignes sélectionnent les produits mis en avant en fonction de leur rentabilité et de leur pouvoir d’attraction commerciale. Résultat : les consommateurs sont incités à acheter des produits pauvres sur le plan nutritionnel, au détriment d’une alimentation équilibrée.
« Les promos ne sont pas neutres. Elles influencent ce que les gens mettent dans leur caddie, et donc ce qu’ils mangent », alerte Foodwatch. Pour les associations signataires de l’enquête, ce modèle promotionnel participe à la dégradation de la santé publique. En particulier chez les foyers les plus modestes, pour qui les produits en promotion représentent une part importante des achats alimentaires.
Une injustice nutritionnelle silencieuse
Cette inégalité est d’autant plus marquée que les produits les moins chers sont souvent les plus riches en sucres ajoutés, comme le montrait déjà une précédente étude menée en janvier 2024. Les marques de distributeurs, qui concentrent une part importante des promos, sont particulièrement concernées. « On ne peut pas demander aux citoyens de mieux manger et continuer à leur proposer à prix cassé des aliments qui nuisent à leur santé », dénonce le collectif à l’origine de l’étude, qui regroupe notamment France Assos Santé, le Réseau Action Climat, et la Fédération Française des Diabétiques.
Un appel à changer les règles du jeu
Pour inverser la tendance, les associations réclament un changement structurel dans les pratiques de la grande distribution. Elles proposent notamment de fixer un objectif clair : que 50 % des produits en promotion soient issus des catégories recommandées par le PNNS (produits bruts, peu transformés, riches en fibres ou en nutriments), et que 10 % des promos concernent des produits bio non ultratransformés.
Une pétition a été lancée dans ce sens, afin de faire pression sur les enseignes et d’alerter les pouvoirs publics. Car au-delà de l’économie réalisée en caisse, c’est bien la santé des consommateurs qui est en jeu – à commencer par celle des enfants, particulièrement exposés à ces stratégies de marketing alimentaire.
Les promotions sont perçues comme une aubaine, surtout en période d’inflation. Sauf que ette apparente générosité commerciale masque une stratégie préoccupante : celle de privilégier des produits à forte marge, souvent mauvais pour la santé. Pour réconcilier pouvoir d’achat et alimentation équilibrée, il est urgent de repenser ce système.