Pourquoi les doudous nous font-ils tant de bien, même adulte ?

Sobre morceau de tissu, ourson duveteux ou lapin soyeux, qu’importe leur physique, les doudous rassurent presque autant que les étreintes des parents. Et ils n’ont pas seulement leur place au milieu du berceau. Les doudous, premiers compagnons de nuit du tendre âge, ont également tout intérêt à venir s’immiscer dans nos mains d’adulte. Même s’ils finissent généralement en lambeau après quelques machouilles et d’innombrables prises de catch nocturnes, ils conservent toujours cette fonction sécurisante. Ces peluches sentimentales élues en culotte-courte sont bien plus que de simples « accessoires ». Voici les raisons qui expliquent ce bien-être incomparable procuré par les doudous, et ce même à l’âge adulte.

Des bienfaits prouvés scientifiquement

Posséder un doudou attitré au-delà de l’enfance est encore tristement considéré comme un signe d’immaturité. En société, cette idylle de longue date avec monsieur « pinpin » reste un secret. Ce compagnon en tissu ne pointe le bout de son nez qu’à la nuit tombée. Il se bride seulement à l’intimité. Il n’est d’ailleurs pas rare qu’il se fasse dévisager voire martyriser par un.e partenaire dubitatif.ve. Si en deçà de 10 ans, le doudou est perçu comme un objet canalisant indispensable, passer ce cap il devient un vulgaire « plaisir coupable ». Mais les regards pourraient bientôt changer.

Selon une étude d’envergure portée par Anne-Sophie Tribot, chercheuse à l’université d’Aix-Marseille, les adultes qui chérissent leur doudou sortent gagnant.e.s de cette romance à huis clos. Pour étayer son enquête, elle a interrogé 12 000 personnes, tous âges confondus. Elle leur a notamment demandé de décrire leur ressenti en présence d’un doudou étranger. Puis avec leur propre nounours (celui qui porte encore notre prénom sur son étiquette délavée).

Les résultats sont sans appel : « le lien affectif partagé avec un ours en peluche est un facteur prédominant ». C’est cette familiarité avec le doudou qui va favoriser l’impression de sérénité. Finalité : ce n’est pas tant l’apparence moelleuse et confortable du doudou qui compte, mais plutôt sa valeur affective. Qu’importe s’il sent sévèrement la bave, s’il pendouille après un fil ou s’il est complètement rapiécé, notre doudou saura nous réconforter en conséquence.

Un effet positif sur les peurs et les angoisses

Les doudous ne sont pas seulement des nids à microbes, insatiables de câlins. Ils sont le prolongement de l’amour maternel. Ils créent une passerelle directe vers la nostalgie de l’enfance et compensent, à leur manière, le vide parental. Ces doudous au vécu bien chargé déportent l’innocence de l’enfance entre les doigts des adultes.

Même s’ils sont moins baladés qu’à l’enfance, ces animaux inanimés transportent avec eux une tendresse familière. Selon l’étude citée ci-dessus, les doudous joueraient un rôle de soutien émotionnel pendant les périodes de grand stress et permettraient de lutter contre la peur de l’abandon. Dans l’enfance, le doudou est un intermédiaire de choix pour mieux appréhender la première séparation avec son « cocon » habituel. Le même schéma se reproduit à l’âge adulte avec une mécanique similaire.

Les doudous, sollicités à l’âge adulte, sont donc bien loin de se cantonner à l’accessoire puéril. Ce sont de véritables instruments de bien-être qui mènent à une paix intérieure de façon presque immédiate. Lorsque les responsabilités pèsent trop lourd ou que le moral bat de l’aile, les doudous s’improvisent anxiolytiques sur pattes.

Ils traduisent le même confort que le bisou sur le front de maman ou l’histoire du soir de papa (ou inversement). Certes, ils sont totalement « éteints » en apparence (à l’inverse de Toys Story), mais ils semblent comprendre nos misères, comme des « confidents ». Ils s’humanisent d’ailleurs plus facilement qu’une personne faite de chair et d’os.

« Le doudou rassure parce qu’il ne contrarie pas, il est toujours présent, il ne déçoit jamais et, surtout, il ne meurt pas. Cette immortalité permet de s’armer face à un monde que l’on considère souvent comme incertain », explique Armelle Oger, journaliste de We Demain à Radio France

Un « objet transitionnel » qui met en confiance

En plus de nous rester toujours fidèles malgré les revers d’oreiller, les étreintes étouffantes et les innombrables jets de larmes salés, les doudous renferment une chimie protectrice inestimable. Dans le vocabulaire psychologique, ils prennent la posture d’objet transitionnel. Ce terme, affirmé en 1950 dans la bouche de Donald Winnicott, pédopsychiatre anglais, désigne tout le potentiel « affectif » du doudou. Selon cette théorie, largement confirmée depuis, le doudou permettrait à l’enfant de faire la césure entre sa relation « primitive » au sein maternel et le monde extérieur.

Le doudou est en quelque sorte un lien de substitution à l’affection parentale. C’est lui qui rend la première séparation plus légère. Grâce à lui, les parents, concrètement absents, deviennent symboliquement présents. Finalement, le doudou est la « réincarnation » passive de la fusion « mère, enfant ». Si pendant l’enfance, il sort sa petite tête chiffonnée au pas de la crèche ou chez papi et mamie, à l’âge adulte, le doudou dédramatise les « au revoir » douloureux. Cajoler son doudou en lui agrippant l’oreille revient à remuer les souvenirs régénérateurs de l’enfance.

« Les doudous incarnent « des objets transitionnels » pour certain.e.s adultes, tels des totems protecteurs, des objets porte-bonheur qui les renvoient à leur propre finitude, car on sait qu’il sera tout le temps présent », étaye Catherine Pierrat psychothérapeute et psychologue en crèche à Nice à Radio France

Est-ce que le type de doudou compte ?

Si le lapin et l’ours en peluche sont les objets de compagnie les plus convoités, ils ne sont pas les seuls à servir d’antidotes détournés. Le mot « doudou » ne se limite pas à un seul profil type, au contraire. Ce qui importe c’est sa valeur sentimentale, sa portée spirituelle. Il peut donc très bien s’agir d’un bout de vêtement trouvé dans le placard familial, d’un chouchou emprunté à maman ou d’une chaussette (propre évidemment) de papa.

La dégaine du doudou est subjective, voire superficielle : elle dépend surtout de l’histoire familiale de chacun.e. Il est possible de développer autant d’affection envers un caillou ramassé sur la plage pendant des vacances familiales qu’un petit singe à la mine irrésistible.

« Une image, ou une photo, peut être considérée comme un doudou. Lorsqu’un jeune adulte déménage, il va prendre des photos de sa famille. Ce sont surtout des choses dont on a besoin dans des moments de grands changements et de stress », explique la psychologue Gwenaelle Persiaux à Magicmaman

Les doudous, tour à tour refuge de poche, somnifère et Lexomil, ont toutes les raisons de survivre à l’âge adulte. Selon les vagues estimations, 1 adulte sur 2 en posséderait d’ailleurs un. Alors pas question de condamner monsieur doudou à l’intransigeante boîte en carton pour de simples critiques de pacotille. L’intérêt « santé » l’emporte !

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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