Voici pourquoi le terme « autisme Asperger » n’est plus utilisé

Se faire diagnostiquer « autiste Asperger » relève désormais de l’exception. Ce « syndrome », a été retiré des classifications médicales officielles pour plusieurs raisons. Boycotté, en partie à cause du personnage qui en est l’instigateur, Hans Asperger, ce terme résonne presque comme une injure. Ce psychiatre autrichien, longtemps acclamé pour ses découvertes, s’est retrouvé impliqué dans des affaires sordides et s’apparente plus à un monstre qu’à un héros. Si le terme « autisme Asperger » n’est plus d’actualité, c’est aussi parce qu’il manque d’objectivité et possède un caractère discriminatoire intrinsèque. Désormais, les spécialistes lui préfèrent le terme « trouble du spectre de l’autisme », à la fois plus large et inclusif. Voici donc pourquoi le qualificatif « autisme Asperger » n’est plus utilisé.

À la racine du terme, un docteur partisan de l’idéologie nazie

Désormais, le terme « autisme Asperger » n’a plus sa place entre les murs des cliniques et autres établissements médicaux. Cette appellation a atteint son terme en 2013, suite à son retrait du DSM-5, la « bible » des troubles mentaux. Depuis que le passé sombre du docteur Hans Asperger est ressorti à la surface, plus personne ne souhaite être associé à cet immonde personnage. Le terme a été théorisé en 1980 par la psychiatre britannique Lorna Wing à titre posthume. Mais il a fallu attendre 2018 pour découvrir le vrai visage de ce chercheur émérite, impliqué de très près dans la déportation d’enfant lors de la Seconde Guerre Mondiale.

Pourtant, à la naissance de ce « qualificatif », le mystère plane autour de ce docteur, soi-disant visionnaire, et des mythes éloquents s’accrochent d’emblée à son nom. Beaucoup l’imaginent alors en une éminente figure de résistance, opposée au nazisme. Sur fond de fausses croyances, il prend l’étoffe de l’homme providentiel, sauveur des enfants « à particularité ». Mais cette opacité renferme une réalité beaucoup moins chevaleresque. Il s’avère en fait que ce Hans Asperger, a contribué au nazisme pour servir son intérêt personnel. Il a d’ailleurs appliqué cette idéologie sélective d’une horreur indescriptible sur ses « sujets d’étude », encore mineurs.

Ce monsieur gardait les enfants autistes dotés de facultés supérieures sous son aile et condamnait les autres, moins « pertinents » sur le plan intellectuel, à un aller direct vers les camps de concentration. En clair, il a contribué, de son plein gré, à l’extermination de ces jeunes gens dits « atypiques ». Impliqué dans des programmes d’eugénisme, il envoyait les enfants aux déficiences trop « sévères » directement à « l’abattoir » car jugés « irrécupérables ». Si le terme « autisme Asperger » n’est plus utilisé, c’est surtout parce qu’il se réfère à un « collabo », auteur de nombreux crimes fascistes et actes déshumanisants.

Une vision très binaire de l’autisme

Si le terme « autisme Asperger » n’est plus utilisé aujourd’hui et déserte peu à peu le langage médical, c’est aussi parce qu’il repose sur un système de classification élitiste et opprimant. Il s’imprègne directement de cette politique de « tri », emblématique du Troisième Reich. Il perpétue l’idée selon laquelle les autistes dits « savants », dotés de parole et de capacités sociales sont « acceptables ». Mais que les autres ont une valeur nulle au sein de la société. Une approche profondément validiste et contraire à la neurodiversité, qui relègue une partie des concerné.e.s au rang de « bêtes de foire » ou « d’humains ratés ».

D’ailleurs, seuls les autistes au QI élevé sont visibilisés sur petit écran et mis en vedette dans les jeux télévisés. En témoigne l’ascension de Paul El Kharrat, maître de midi aux allures d’encyclopédie vivante. Même constat dans les séries telles que « Dr House » ou « Good Doctor ». L’étiquette « Asperger » semble être un privilège, voire un label qui fait vendre. Pourtant, en hiérarchisant l’autisme de la sorte, les inégalités sont inévitables.

Le terme « autisme Asperger » n’est plus utilisé puisqu’il est en rupture totale avec le caractère polymorphe de ce trouble. Il exclut d’office toute une frange de la pathologie et s’inscrit dans la continuité de la doctrine nazie. Pourtant, l’autisme est semblable à un kaléidoscope. Il est fragmenté en plusieurs spécificités et se reflète différemment d’un.e individu.e à un.e autre. Attribut désormais vétuste et offensant, le terme « autisme Asperger » tire sa révérence au profit d’une appellation plus fluide.

Par quoi le syndrome d’Asperger a-t-il été remplacé ?

Puisque le terme « autisme Asperger » n’est plus utilisé et jure avec la réalité scientifique actuelle, le DSM-5, manuel de référence des troubles mentaux l’a rebaptisé avec plus de neutralité. Désormais, il est question de « trouble du spectre de l’autisme » (TSA). Une notion à la fois plus « libre » qui renvoie au fait que l’autisme ne soit pas statique ou linéaire.

Au lieu de classer l’autisme selon le critère du langage ou le degré de sociabilité, un seul élément prime : l’autisme avec ou sans déficience intellectuelle. Avec le terme TSA, l’autisme n’est plus invariable ou normé, il se dévoile à la manière d’un éventail infini. Le diagnostic « Asperger », anciennement imputé, a ainsi évolué vers un TSA de niveau 1 et s’ancre non plus dans une sous-catégorie, mais un terme « général ». Si cette modification a été plutôt bien accueillie, certaines personnes la contestent et refusent d’abandonner le titre originel.

Le terme « Asperger », encore cher à une partie de la patientèle

Certes, le terme « autisme Asperger » n’est plus utilisé sur les documents médicaux et ne fait plus foi dans le domaine de la santé, mais certaines personnes y sont fermement attachées. Bien loin de vouloir dissoudre cette appellation, elles souhaitent conserver leur petite « distinction », devenue partie intégrante de leur identité.

Familièrement appelées « Aspie », elles justifient leur choix par le fait de ne pas vouloir se fondre dans les formes d’autisme les plus sévères. Elles fustigent cette uniformisation de l’autisme et refusent de se voir mêlées à des personnes non verbales, dépendantes de leur proche. Un plaidoyer qui illustre à quel point l’autisme est caricaturé. Lorsqu’il n’est pas suivi du mot « Asperger », l’autisme revêt une connotation péjorative et se transforme presque en injure. Une psychophobie régnante qui empêche le terme « Asperger » de s’éclipser pour de bon.

Si le terme autisme « Asperger » n’est plus utilisé, il existe ainsi encore des zones d’ombre sur ce trouble. C’est prétendument pour cette raison que le mot « spectre » est plus « juste ». Il ne laisse aucun.e individu.e sur la sellette. 

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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