Depuis des décennies, la question de l’intelligence fascine autant les chercheurs que le grand public. Quels éléments, au-delà des tests classiques de QI, pourraient être révélateurs d’une intelligence supérieure à la moyenne ?
Les gauchers : minoritaires, mais cognitivement singuliers
Une étude issue de l’université d’Oxford propose une piste étonnante : un trait physique que peu de gens associeraient spontanément à la cognition. Non, il ne s’agit pas de la taille du cerveau ni d’une quelconque performance scolaire. Ce que ces chercheurs ont mis en évidence, c’est une corrélation entre le fait d’être gaucher et la présence d’un QI plus élevé que la moyenne.
Environ 10 % de la population mondiale est gauchère. Ce chiffre relativement stable d’un pays à l’autre en fait une minorité neurologique souvent perçue comme atypique. Cette singularité est-elle uniquement pratique, ou témoigne-t-elle d’une différence plus profonde dans le fonctionnement du cerveau ?
Selon les résultats d’imageries cérébrales analysés par les chercheurs d’Oxford, les personnes gauchères présentent une structure particulière dans leur cerveau : le corps calleux, zone responsable de la communication entre les deux hémisphères cérébraux, y serait en moyenne plus développé. Cette caractéristique favoriserait une meilleure circulation des informations entre les deux côtés du cerveau, améliorant ainsi certaines fonctions cognitives comme la pensée abstraite, la créativité, ou encore la résolution de problèmes complexes.
Une adaptation précoce qui forge les capacités cognitives
Ce n’est pas uniquement la biologie qui expliquerait ce lien entre latéralité et intelligence. Être gaucher implique souvent, dès le plus jeune âge, de devoir s’adapter à un environnement majoritairement conçu pour les droitiers : stylos, ciseaux, bureaux, instruments de musique, ou même certains logiciels. Cette constante adaptation favoriserait le développement de la flexibilité mentale, de la résilience et d’une capacité accrue à trouver des solutions alternatives.
Dans le milieu scolaire, les gauchers doivent souvent inventer leurs propres stratégies pour apprendre, écrire ou manipuler des objets. Ce processus, s’il peut représenter un défi, devient également une opportunité de développer des compétences cognitives spécifiques, qui se traduisent parfois par un QI plus élevé ou une plus grande aisance dans des domaines créatifs ou analytiques.
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Intelligence, créativité et pensée divergente
Plusieurs études antérieures vont dans le même sens. Une recherche publiée en 2019 dans Brain – une revue scientifique de référence en neurologie – mettait en lumière que les gauchers sont surreprésentés dans certaines professions intellectuellement exigeantes, notamment dans les domaines scientifiques et artistiques. D’Albert Einstein à Marie Curie, en passant par Léonard de Vinci, les exemples de personnalités historiques gauchères et brillantes abondent, même si la corrélation ne signifie évidemment pas causalité.
Cette surreprésentation pourrait s’expliquer, selon les chercheurs, par une plus grande aptitude à la pensée divergente – c’est-à-dire la capacité à envisager plusieurs solutions possibles à un même problème. Cette forme d’intelligence, souvent liée à la créativité, est justement favorisée par une communication efficace entre les hémisphères cérébraux, une configuration plus fréquente chez les gauchers.
Une prudence nécessaire dans l’interprétation
Toutefois, les scientifiques appellent à la prudence. Il ne s’agit pas d’affirmer que tous les gauchers sont des génies en puissance, ni que les droitiers n’ont pas de potentiel intellectuel élevé. La corrélation observée est statistique, et ne signifie pas qu’être gaucher détermine le QI. De nombreux autres facteurs – environnementaux, éducatifs, culturels, émotionnels – entrent en jeu dans le développement de l’intelligence.
Les chercheurs insistent surtout sur l’intérêt de mieux comprendre les particularités neurologiques des gauchers, encore peu étudiées dans la recherche contemporaine, pour enrichir notre vision de l’intelligence humaine et de ses multiples formes d’expression.
Une invitation à repenser les normes
Cette découverte contribue à interroger les normes implicites de notre société : pourquoi continue-t-on à concevoir des outils, des espaces et des méthodes d’apprentissage pour les droitiers uniquement ? Si une minorité aussi significative que les gauchers présente des aptitudes cognitives spécifiques, ne serait-il pas pertinent d’en tirer des leçons pour réinventer nos approches pédagogiques, nos outils professionnels et même nos critères d’évaluation de l’intelligence ?
En mettant en lumière le lien entre un trait physique souvent banalisé et des capacités intellectuelles élevées, l’étude d’Oxford remet en question certaines idées reçues, tout en ouvrant des perspectives passionnantes sur la diversité des talents humains.