L’actrice et productrice américaine Viola Davis continue de redéfinir ce que signifie être une femme, noire, actrice, et visible à Hollywood. Lors de son discours au Hall of Fame de la Television Academy le 16 août 2025 à Los Angeles, elle est revenue sur ce rôle décisif qui a changé sa trajectoire : Annalise Keating, l’avocate brillante et complexe de la série « How to Get Away with Murder ».
Une révolution sur le petit écran
Interrogée par People Magazine, l’actrice oscarisée a affirmé sans détour : « J’ai enlevé ma perruque. J’ai retiré mon maquillage. J’ai gardé ma taille. Je suis restée aussi noire que possible. Et j’ai gardé mon âge. Tout chez moi était sans excuses » – (People, 26 août 2025)
Ce choix affiché fièrement – garder son apparence, son authenticité et sa vérité – va à contre-courant des normes hollywoodiennes qui valorisent la jeunesse, la minceur, et une image formatée de la féminité. Viola Davis a, au contraire, choisi de rester elle-même. Et ce refus d’édulcorer son identité est au cœur de son succès.
La série « How to Get Away with Murder » (2014–2020), produite par Shonda Rhimes, n’a pas seulement marqué un tournant dans la carrière de Viola Davis : elle a ouvert un nouveau champ de représentation pour les femmes noires à la télévision américaine. En 2015, Viola Davis devient ainsi la première femme noire à remporter l’Emmy Award de la Meilleure actrice dans une série dramatique. Dans son discours de remerciement, elle déclarait déjà avec force : « La seule chose qui nous sépare des autres femmes, ce sont les opportunités. On ne peut pas gagner un Emmy pour des rôles qui n’existent pas » – (Emmy Awards, 2015)
Ce rôle d’Annalise Keating, brillante, alcoolique, cruellement humaine, brise les stéréotypes raciaux et genrés. Ni « femme forte » figée, ni victime sacrificielle, son personnage refuse d’être réduit à une caricature. Pour Viola Davis, cette performance ne devait pas être lissée : « J’ai fait des choix qui ont rendu Annalise unique. Je n’ai pas suivi le script de ce qu’une héroïne est censée être à la télévision », confie-t-elle à People.
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Vieillir à l’écran : un acte politique
Dans une industrie qui invisibilise les femmes passé 50 ans, et plus encore les femmes noires, Viola Davis revendique son droit à vieillir, à exister avec son corps, son vécu, sa voix. Lors du Festival de Cannes 2023, elle pointait déjà le manque cruel de rôles pour les femmes de sa génération : « Quand il s’agit des femmes noires de plus de 50 ans, là, ça devient un désert ».
En refusant de modifier son apparence ou de lisser son image, elle inscrit sa démarche dans une logique de résistance. Résistance aux standards de beauté, mais aussi aux récits dominants où les femmes, et a fortiori les femmes noires, ne sont visibles que lorsqu’elles incarnent des archétypes.
Une reconnaissance tardive, mais puissante
Avec son Oscar, son Emmy, et ses multiples nominations, Viola Davis est aujourd’hui l’une des rares actrices à avoir franchi toutes les barrières de l’industrie. Elle n’oublie toutefois pas que cette reconnaissance est venue au prix d’une bataille constante pour imposer des rôles complexes, imparfaits, puissants.
Et surtout, Viola Davis n’a jamais accepté de se plier au moule. À l’heure où d’autres choisissent de retoucher leurs images ou de gommer les marques du temps, elle affirme : « Parfois, les choix qu’on fait ne fonctionnent pas. Mais celui-ci a marché ».
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Viola Davis ne joue pas selon les règles : elle les réécrit. À 60 ans, elle incarne un féminisme sans détour, une liberté corporelle assumée, et une force tranquille qui redonne aux femmes noires – et aux femmes en général – le droit d’exister pleinement à l’écran. Ni réduite à son apparence, ni enfermée dans son âge, elle rappelle que la vérité, l’authenticité, et la puissance ne sont jamais incompatibles.