Et si l’intelligence artificielle (IA) devenait un allié pour repérer plus tôt les troubles de l’apprentissage chez les plus jeunes ? C’est le pari d’une équipe de chercheurs américains qui mise sur l’analyse de l’écriture pour détecter les signaux invisibles.
Une approche innovante pour repérer dyslexie et dysgraphie
Détecter un trouble comme la dyslexie ou la dysgraphie chez un enfant relève souvent d’un long parcours : entre les rendez-vous spécialisés, les listes d’attente, et des signes encore peu visibles à un jeune âge, beaucoup de familles passent à côté d’un dépistage précoce. Une équipe de l’Université d’État de New York à Buffalo propose aujourd’hui une piste prometteuse : utiliser l’intelligence artificielle (IA) pour repérer ces troubles grâce à l’analyse de l’écriture manuscrite.
Le principe est simple, mais ambitieux : à partir d’échantillons d’écriture réalisés sur papier ou tablette, une IA scrute minutieusement les caractéristiques graphiques produites par l’enfant. Des lettres mal formées, une organisation spatiale désordonnée, des fautes récurrentes, une pression irrégulière sur le support… autant d’indices qui, mis ensemble, peuvent signaler un trouble émergent de l’apprentissage.
Des résultats encourageants dès l’école élémentaire
Les premiers tests ont été menés dans une école du Nevada, auprès d’élèves âgés de 6 à 11 ans. Grâce à un modèle d’IA entraîné sur des critères spécifiques, les chercheurs ont pu identifier près de 90 % des irrégularités associées aux troubles de l’écriture. Un taux jugé très prometteur par les chercheurs, surtout en comparaison avec les outils actuels, souvent trop ciblés ou chronophages.
Ce système pourrait ainsi compléter les dispositifs de repérage utilisés par les enseignants, les orthophonistes ou les psychologues scolaires, en leur fournissant un indicateur rapide et fiable, basé sur des centaines de microdonnées.
Un outil pensé pour les enseignants et les familles
Ce qui rend cette technologie particulièrement intéressante, c’est sa facilité d’intégration dans un contexte scolaire ou domestique. Contrairement aux bilans classiques, qui nécessitent des conditions spécifiques et une expertise professionnelle, cette IA pourrait à terme être utilisée directement en classe ou à la maison, via une application ou un outil en ligne.
Deux versions sont actuellement en développement :
- l’une dédiée au repérage en amont, pour signaler les enfants susceptibles de présenter un trouble et recommander une évaluation plus poussée ;
- l’autre pensée comme assistant éducatif personnalisé, capable d’adapter ses retours selon le profil de chaque enfant.
Le but : « accompagner les progrès au quotidien, en s’adaptant aux besoins réels de l’enfant, sans jugement ni automatisme rigide », explique les chercheurs.
Vers un changement de paradigme dans l’éducation
Si cette IA n’a pas vocation à remplacer les professionnels de l’accompagnement, elle pourrait bien transformer la manière dont on identifie et prend en charge les troubles de l’apprentissage. En intervenant plus tôt, on augmente en effet les chances de mettre en place des stratégies éducatives efficaces, évitant ainsi les retards, la perte de confiance ou encore les décrochages scolaires.
Cette initiative s’inscrit dans une tendance de fond : celle d’un usage dit raisonné de l’IA au service du bien-être cognitif et émotionnel des enfants. En permettant d’écouter autrement ce que les enfants n’arrivent pas encore à exprimer avec des mots, ces outils pourraient devenir de vrais traducteurs du non-dit.
Comprendre un enfant passe parfois par ce qu’il ne dit pas. Grâce à cette technologie émergente, l’intelligence artificielle devient ainsi un intermédiaire bienveillant, capable de décrypter les signaux faibles pour orienter plus tôt vers un accompagnement adapté. Une avancée potentiellement décisive, pour des milliers d’élèves qui peinent à s’exprimer avec les bons mots… mais dont l’écriture, elle, parle déjà.