Omegle est un site de tchat vidéo, accessible à partir d’un ordinateur ou d’un smartphone. Dès l’âge de 13 ans, on peut ainsi discuter avec n’importe qui. Les plus jeunes peuvent se faire des ami.e.s ou même rencontrer en direct leur Youtuber.euse.s préféré.e.s. Présenté sous cet angle, cela semble super.
Le problème, c’est que de la pornographie, de la pédocriminalité et même de l’hameçonnage (technique frauduleuse destinée à berner un.e internaute pour l’inciter à communiquer des données personnelles) ont été détectés lors de plusieurs enquêtes. Le succès grandissant d’Omegle fait depuis la Une des journaux et semble assez inquiétant.
« Ne parle pas aux inconnu.e.s, d’accord ? »
« Ne parle pas aux inconnu.e.s dans la rue, d’accord ? » Omegle.com est un simple site internet, qui propose l’inverse. Son slogan « Talk to strangers ! » signifie « parlez avec des inconnus ! ». Il s’agit d’un système de tchat pour discuter en vidéo, ou par messagerie, avec des utilisateur.ice.s au hasard. Disponible à partir de son ordinateur ou de son smartphone, les conditions pour y accéder sont simplement d’avoir plus de 13 ans, et d’obtenir l’autorisation de ses parents. En France, la plateforme a le vent en poupe : elle rassemble près d’un million de visiteur.se.s, chaque mois.
Sur son écran, on zappe sur des vidéos de manière aléatoire. Et on trouve parfois des signes que quelque chose de louche se prépare en face. Une main cachée sous la table, un plan direct sur le torse nu d’un homme âgé au lieu de son visage, un plan sur une personne sans pantalon sous le bureau… Dans une enquête de KoolMag, ces signes alarmants proviennent tous d’hommes bien plus âgés que la majorité d’utilisateur.ice.s d’Omegle.
En se créant un profil en quelques minutes, l’enquêteur de KoolMag a pu voir une dizaine de profils d’hommes âgés se masturbant et s’exhibant à la caméra face à des adolescent.e.s. Et face à quelques enfants d’une dizaine d’années à peine, car l’âge requis de 13 ans n’est pas toujours respecté.
Pédocriminalité, pornographie et hameçonnage
Souvent, les plus jeunes vont sur ce site dans le but de rencontrer de nouvelles personnes. Iels cherchent à s’offrir une expérience inédite et drôle, plutôt que de se faire des ami.e.s dans la vie réelle, chose parfois compliquée. Mais il y a aussi des influenceur.se.s présent.e.s sur YouTube, qui proposent de rencontrer leurs fans en direct sur Omegle. D’où l’attrait supplémentaire pour la plateforme, notamment depuis les confinements.
Cependant, le caractère aléatoire et le peu de modération du tchat peut connecter n’importe quel.le mineur.e avec des gens de bien plus de 18 ans, et/ou des pervers sexuels. Et pour un.e enfant, passer d’une discussion sympathique avec un.e adolescent.e du même âge que soi à un adulte se masturbant dans des positions étranges peut avoir un aspect très choquant.
Face à ces dangers, le gouvernement français a décidé de réagir. Le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles Adrien Taquet compte signaler le site à la justice « des faits d’exposition des mineurs à la pornographie et à la pédocriminalité ».
Aussi, Omegle peut être un lieu propice pour « hameçonner » les jeunes. Dans le tchat, on peut proposer une communication sur un autre réseau social classique, comme SnapChat, TikTok ou Instagram. Pour Samuel Comblez, directeur des opérations de l’association e-Enfance, cela peut mener à des risques de harcèlement, d’escroquerie, de piratage, de pression ou encore de chantage.
Comment prévenir les dangers d’Omegle ?
Omegle n’est pas le premier site à être visé pour ses dangers envers les plus jeunes. Son principe ressemble à celui de Chatroulette, qui avait un grand succès dans les années 2010, ou encore à Bazoocam. Ces plateformes sont aussi le repère de quelques pervers sexuels. Alors, comment prévenir de tels comportements sur les tchats vidéo ?
Pour la FCPE (Fédération des conseils de parents d’élèves), c’est au gouvernement d’agir. Sur Twitter, la FCPE l’a interpellé en exigeant « la mise en place immédiate, plus importante d’une vigie réseaux sociaux, et le développement d’une véritable politique de protection de l’enfance sur internet ! ». Elle demande également aux parents de rester vigilants.
ALERTE 🛑 #Omegle La #FCPE demande au gouvernement d'agir : la mise en place immédiate, plus importante d’une vigie réseaux sociaux, et le développement d’une véritable politique de protection de l’enfance sur internet !
Parents, soyons tous vigilants ! pic.twitter.com/DX9Fyplg0W— FCPE_nationale (@FCPE_nationale) April 25, 2022
Omegle devrait également revoir ses méthodes de modération. Sur son site, les règles indiquent clairement refuser le harcèlement sexuel, le racisme, les comportements abusifs ou choquants, etc. Toutefois, Omegle prévient « cependant, la modération n’est pas parfaite. Vous pouvez donc rencontrer des personnes qui se comportent mal ». Les utilisateur.ice.s sont les seul.e.s responsables de leur comportement en ligne.
Quel rôle pour les parents ?
Pour Thomas Rohmer, fondateur de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (Open), il faut nuancer ce phénomène. Il confirme clairement les problèmes derrière Omegle, mais il précise à Ouest France : « je suis toujours embêté par des coups de projecteur qui peuvent être donnés sur ce genre d’outils, en surfant sur les angoisses parentales qui sont très nombreuses par rapport aux outils numériques ».
Pour ne pas tomber dans une angoisse improductive, les parents peuvent tenter d’ouvrir le dialogue avec leur enfant. Il s’agirait de s’intéresser à la raison pour laquelle iel se rend sur ces sites. Ou encore d’entretenir une relation de confiance avec l’enfant, en discutant régulièrement sur ses impressions, si iel a conscience des risques, s’iel a déjà été exposé.e à des contenus choquants, etc.
Et vous, connaissez-vous des jeunes qui utilisent ce site ? Ont-iels conscience de ses dangers ? Venez partager vos impressions sur le forum de The Body Optimist !