Sur Youtube, une vidéo postée par le créateur sud-coréen 나는야 수민이 (I am Sumin) a profondément marqué les internautes. Dans ce contenu devenu viral, le jeune homme se maquille, enfile une robe longue et se promène dans les rues d’Inde… dans la peau d’une femme. Le but ? Vivre, ne serait-ce que quelques heures, ce que vivent les touristes femmes et les Indiennes au quotidien dans l’espace public.
Un choc personnel… et collectif
Ce qui devait être une simple expérience sociale s’est rapidement transformé en prise de conscience brutale. Les images parlent d’elles-mêmes : regards insistants, commentaires déplacés, comportements intrusifs. Très vite, le créateur se dit mal à l’aise, oppressé, et même en danger. Il finit la vidéo en disant clairement qu’il ne s’attendait pas à vivre une telle intensité de harcèlement.
La vidéo de Sumin a été vue des millions de fois, traduite et repartagée sur plusieurs plateformes. Dans les commentaires, de nombreuses femmes – indiennes ou non – saluent l’initiative et confirment que ce que montre le jeune homme, elles le vivent tous les jours, sans caméra, sans costume, sans pouvoir redevenir « elles-mêmes » après l’expérience.
Certains internautes sud-coréens ont également reconnu leur méconnaissance du quotidien des femmes dans d’autres cultures. D’autres ont mis en avant le courage de Sumin, tout en rappelant que ce type de réalité ne peut pas être pleinement compris tant qu’on ne le vit pas de l’intérieur – en tant que femme.
A male South Korean vlogger went to India dressed as a female, to see if he will get unwanted sexual advances.🤣 pic.twitter.com/tiCe3CrJPV
— Zhao DaShuai 东北进修🇨🇳 (@zhao_dashuai) July 28, 2025
Le harcèlement de rue, une réalité constante
L’expérience de Sumin n’est pas une exception. En Inde, le harcèlement de rue est un problème systémique dénoncé depuis des années. Il peut aller des regards appuyés aux remarques provocantes, en passant par les attouchements non consentis.
Ce phénomène porte un nom local : « eve-teasing », une expression utilisée à tort pour minimiser la gravité de ces agressions, mais qui cache une violence bien réelle. Le témoignage involontaire de Sumin confirme ainsi ce que de nombreuses militantes dénoncent depuis longtemps : l’espace public, dans de nombreuses villes indiennes, n’est pas un lieu sûr pour les femmes.
Une expérience qui ouvre les yeux
Ce que cette vidéo met en lumière, c’est aussi la puissance de l’empathie active. Sumin ne prétend pas « savoir » ce que vivent les femmes. Il ne parle pas à leur place. Il montre simplement, par son regard d’homme plongé dans une réalité de femme quelque heures, à quel point le quotidien peut être pesant, anxiogène, et même menaçant – juste en marchant dans la rue.
La démarche n’est pas sans limites : le harcèlement ne dure pour lui que quelques heures. Il peut retirer sa robe, se démaquiller et redevenir invisible aux yeux des harceleurs. Les femmes, elles, vivent avec cette tension permanente, cette vigilance constante, ce sentiment d’exposition qui façonne leur rapport au monde. Néanmoins, l’expérience a le mérite d’être partagée. Et d’ouvrir les yeux aux personnes qui n’avaient jamais mesuré l’ampleur du problème.
Ne pas se déguiser pour comprendre, mais écouter celles qui vivent
Si cette vidéo a tant résonné, c’est parce qu’elle met en image une violence banalisée, souvent ignorée ou minimisée. Le fait qu’un homme la vive, même brièvement, et en ressorte marqué, montre à quel point le sexisme quotidien est profond.
Il est important de rappeler, pour conclure, que les témoignages des femmes n’auraient jamais dû nécessiter une telle mise en scène pour être crus. Ce sont elles qui, depuis des années, alertent, racontent, dénoncent. Elles n’ont pas besoin de se grimer pour être prises au sérieux. Elles ont simplement besoin d’être écoutées, protégées, et respectées.