Enfants et écrans : comment les éloigner sans les priver ?

Depuis deux décennies, les écrans ne cessent de se multiplier jusqu’à prendre toujours plus de place dans notre quotidien. Qu’il s’agisse des télévisions, ordinateurs, smartphones, jeux vidéo ou encore des tablettes : les écrans font partie intégrante de notre vie, et par extension, de celle de nos enfants. Alors, comment les protéger face aux dangers de la surexposition sans pour autant bannir les écrans de leur vie ?

Quels sont les risques des écrans ?

D’après l’Agence de Santé Publique France, un.e adulte passe en moyenne 5h07 par jour devant un écran. Les enfants de 8 à 12 ans octroient 4,45 heures journalières aux écrans. Quant aux jeunes de 13 à 18 ans, cette durée atteint 7h par jour. De tels chiffres interrogent sur les répercussions éventuelles de cette large utilisation.

Des conséquences néfastes sur la psyché

Le neuroscientifique Michel Desmurget, directeur de recherche de l’INSERM, est catégorique. Pour lui, une telle utilisation des écrans impacte les capacités de concentration, le langage et l’agressivité des enfants. Il précise que la réussite scolaire et la qualité du sommeil ne sont pas en reste de perturbations.

Ces dires se voient confirmés par de nombreuses études. Celles-ci affirment qu’une consommation trop importante des écrans a des effets sur les acquis sensoriels et cognitifs, mais également sur le développement social et affectif. L’Académie des Sciences Française l’affirme dans un rapport récent :

« Une utilisation trop précoce ou une sur-utilisation des écrans a des conséquences délétères durables sur la santé, l’équilibre et les activités futures intellectuelle, culturelle et professionnelle. Un continuum existe entre les troubles de la concentration, du manque de sommeil et de l’élimination des autres formes de culture, et la « pathologie des écrans », qui provoque d’éventuels comportements dangereux. »

Autrement dit, les écrans peuvent être la source de nombreux maux. S’ajoutent aux précédemment cités les troubles de l’attention, les maux de tête, les troubles du comportement, l’obésité ou encore la dépression. En effet, une étude publiée dans la revue Préventive Medicine Report révèle que le bien-être psychologique chez les enfants et adolescent.e.s diminue à mesure que leur consommation d’écran augmente.

D’après l’étude, ces jeunes encourent deux fois plus de risque de dépression et d’anxiété lorsque leur temps d’écran dépasse les 7 heures par jour devant tout type d’écran. Ajoutons à cela que les risques des écrans se trouvent aussi dans les risques de cyberharcèlement ou d’addiction.

Même les plus petit.e.s sont concerné.e.s

Récemment, une étude de l’Université de Toronto démontrait que plus un.e enfant est mis.e devant un écran, plus iel prend du retard dans l’acquisition du langage. Or, un tiers des enfants de 0 à 3 ans prend ses repas devant un écran. Cela n’a pas manqué d’inquiéter une centaine de député.e.s et de personnalités au point qu’iels publient une tribune dans Le Monde en décembre 2021. Iels qualifient les écrans comme étant « le mal du siècle » parce qu’il s’agirait de :

« loisirs limitatifs à une période cruciale pour le développement, mais aussi et surtout des entraves à l’acquisition du langage, à la mémorisation des savoirs. »

Entre 0 et 3 ans, les enfants ont de nombreux défis à relever (marcher, parler, nouer des liens, appréhender ses émotions, développer sa motricité, sa concentration, etc.). C’est une période au cours de laquelle les interactions avec l’entourage et le développement de ses sens sont essentiels. Pour acquérir des références spatiales, l’enfant découvre son environnement quotidien notamment en touchant des objets. Rien de mieux pour comprendre les temporalités que d’entendre des histoires au travers de livres imagés.

Alors, le risque des écrans est qu’ils en viennent à remplacer ces activités et donc à bousculer l’apprentissage. L’attention est la première touchée. Une récente étude américaine montre qu’un.e enfant jouant dans une pièce où la télévision est un bruit de fond va avoir une attention perturbée. Ceci même si iel ne regarde pas l’écran.

Les images émises par un écran représentent pour l’enfant une hyper stimulation visuelle et auditive bien supérieure au monde réel. Cela a un effet hypnotique tout en le.a laissant en état d’alerte. La conséquence directe est une profonde confusion entre le réel et le virtuel.

Comment accompagner son enfant dans son usage des écrans ?

Récemment, trois ministères se sont associés pour répondre à cette question. Leur but est de prodiguer des conseils pour tendre au mieux vers une « parentalité numérique ». De cette réunion est né un rapport publié sur la plateforme jeprotegemonenfant.gouv.fr.

D’après leur constat, nous ne pouvons désormais plus faire l’impasse du digital dans l’éducation. Le directeur de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique, Thomas Rohmer, explique que l’idée est donc d’apprendre les clés nécessaires à la mise en place d’une éducation numérique saine des enfants.

1 – Donner le bon exemple

Avant tout, les parents doivent montrer le bon exemple. Dès la petite enfance, les enfants observent les comportements de leurs parents pour vite les imiter. En étant vous-même responsable sur votre utilisation des écrans, vous donnez les bons repères à vos enfants.

D’après une étude CSA datée de 2018, 26 % des 12-14 ans trouvent que leurs parents utilisent trop leur téléphone. Ces enfants estiment que leurs parents « sont là sans être là« . La clé selon la sophrologue Isabelle Frenay et l’addictologue Bernard Antoine est de passer au « slow digital ». Autrement dit : lâcher son smartphone, surtout lorsqu’on est en famille.

2 – Échanger avec ses enfants

Ce conseil est précieux en deux sens. D’abord, il s’agit de comprendre les contenus qu’iels consomment ou auxquels iels souhaitent accéder. Le CSA explique que lorsqu’un.e enfant est exposé.e à des images violents, iel n’ose pas en parler par honte. Il faut donc engager une discussion afin de « l’aider à comprendre et à exprimer ses émotions et à développer son esprit critique ».

Ensuite, partager des temps d’écran et en discuter offre à votre enfant la possibilité d’avoir une écoute active. Grâce à cela, iel est stimulé.e et anime son esprit critique.

3 – Consacrer du temps à des activités loin des écrans

Cela va de soi, pour éviter que votre enfant passe trop de temps devant un écran, il faut lui proposer d’autres activités. Toutes les activités sont les bienvenues pour remplacer la télé : musées, sport, balades, loisirs créatifs, jeux de société, etc.

En outre, cela permet d’évacuer le stress, de développer sa patience, de stimuler sa créativité, d’apprendre à gérer ses émotions et d’améliorer ses capacités sociales.

4 – Limiter le temps devant les écrans

Il arrive que les enfants refusent d’éteindre la télévision lorsque vous le leur demandez. Le mieux dans ce cas est de fixer à l’avance avec elleux l’objectif d’écran autorisé. Il est recommandé de ne pas donner de limite de temps, mais plutôt de réserver l’usage des écrans à un objectif précis. Vous pouvez même mettre en place un planning d’utilisation pour les aider à visualiser ces règles.

5 – Protéger des contenus inadaptés

Les chiffres montrent qu’à 12 ans, un.e enfant sur trois a déjà été exposé à des images à caractère sexuel. Il convient donc de protéger les enfants de l’exposition aux contenus inadéquats.

La première étape est de fixer des règles qui régissent ce à quoi les enfants ont accès. Puis, vous pouvez garder un œil sur leur utilisation des écrans, sans pour autant empiéter sur leur espace intime. Il s’agit surtout de les accompagner en respectant la signalétique d’âge et en parlant avec elleux de ce qu’iels voient.

Quant à la protection face aux contenus dangereux, c’est à vous d’agir. N’hésitez pas à mettre en place un contrôle parental sur les objets numériques utilisés par vos enfants.

6 – Emmener son enfant régulièrement chez l’ophtalmo

Le rapport du Haut Conseil de la santé publique sur l’exposition des enfants aux écrans (janvier 2020) déterminait que :

« Même s’il n’existe pas de preuve de l’altération de la vision par l’exposition aux écrans, l’utilisation prolongée d’appareils électroniques avec écrans peut potentiellement entraîner des symptômes oculaires et visuels tels que la gêne oculaire, la fatigue oculaire, la sécheresse oculaire, des maux de tête, une vision floue, voire double. »

En conséquence, la vue de près est de plus en plus sollicitée au détriment de la vision de loin. C’est ce que l’on appelle la myopie comportementale. D’après le baromètre 2017 de la santé visuelle (AsnaV), 41 % des 16-24 ans disent éprouver des difficultés à voir de loin, contre 29 % en 2016.

L’Association Nationale pour la Santé Visuelle, détermine que « les écrans en tant que tels ne génèrent pas de pathologies oculaires : ils révèlent ou renforcent des anomalies préexistantes ». C’est pourquoi il est important de soumettre vos enfants à un dépistage et une correction fréquente de ces anomalies.

Vous pouvez aussi lui apprendre à correctement s’installer devant un écran :

  • S’installer à bonne distance (au moins 50cm pour les petits écrans et 1m30 pour les grands) ;
  • Avoir les yeux à hauteur du milieu de l’écran. La hauteur de l’écran doit donc tenir compte de la taille de l’enfant ;
  • Adapter la luminosité de l’écran et la lumière ambiante (ne pas être dans le noir complet et privilégier les affichages sur fond clair et d’amplifier les contrastes) ;
  • Faire des pauses (selon les recommandations du HSCP, il est préférable de faire une coupure de 20 minutes toutes les 30 minutes à 1h d’utilisation d’un écran) ;
  • Veillez à ce qu’il ait des activités en plein air, elles sont bénéfiques pour la vision de loin ;
  • Porter ses lunettes. Si votre enfant a des troubles, c’est essentiel. Vous pouvez aussi lui procurer des lunettes anti lumière bleue).

Au quotidien, nous ne pouvons plus échapper aux écrans. Alors, autant en faire une force et permettre à nos enfants de s’en servir intelligemment. L’essentiel est de les guider correctement au travers du numérique dès leur plus jeune âge.

Charlotte Vrignaud
Charlotte Vrignaud
En tant que journaliste spécialisée dans les médias et la culture, mon quotidien est une aventure passionnante au cœur de l'évolution culturelle et médiatique de notre époque. Mon rôle consiste à décrypter et à partager les tendances émergentes, les innovations et les récits captivants qui façonnent notre société.
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