Rare, incurable, et pourtant en progression silencieuse, le syndrome du « poumon pop-corn » gagne du terrain. En ligne de mire : la popularité grandissante des vapoteuses chez les jeunes adultes. Et si le nom prête à sourire, le tableau clinique, lui, ne laisse aucune place à la légèreté.
Un nom sucré pour une maladie amère
On pourrait presque croire à une farce médicale. « Poumon pop-corn » : l’expression évoque plus une friandise de cinéma qu’un risque respiratoire sévère. Et pourtant, derrière ce surnom décalé se cache une affection redoutable : la bronchiolite oblitérante. Un nom à rallonge pour désigner une maladie chronique qui détruit lentement, mais sûrement, les plus petites voies respiratoires de vos poumons – les bronchioles – jusqu’à les rendre inutilisables.
Son origine est industrielle, pas alimentaire : au début des années 2000, des ouvriers d’une usine de pop-corn au micro-ondes aux États-Unis ont développé cette pathologie après avoir été exposés de façon prolongée à des vapeurs de diacétyle, un agent aromatisant utilisé pour imiter le goût du beurre. C’est là que tout commence.
La menace invisible du diacétyle
Aujourd’hui, le coupable n’est plus uniquement cantonné aux usines. Il se glisse aussi dans certains E-liquides de vapotage, notamment ceux aux arômes sucrés. Vanille, caramel, noix de coco : ces saveurs si séduisantes cachent parfois du diacétyle, un composé qui, une fois inhalé, attaque vos poumons de l’intérieur.
Bien sûr, tout cela ne signifie pas que chaque bouffée mène tout droit à la maladie. Les études sont encore en cours, les cas avérés rares. Mais c’est justement ce flou qui inquiète les spécialistes. Car si les effets immédiats semblent minimes, qu’en est-il dans 10, 20 ou 30 ans ? Et surtout, que dire de tous ces produits vendus sous le manteau, sans contrôle, ni garantie ?
La zone grise du vapotage illégal
Depuis l’interdiction des arômes dans les produits de vapotage au Canada en 2023, les marchés parallèles se sont multipliés. Une simple recherche sur les réseaux sociaux, et vous voilà en possession d’un petit flacon au goût de tarte aux fraises ou de gomme bleue.
Le danger ici, c’est l’inconnu. Ces produits, souvent importés, parfois contrefaits, n’affichent pas toujours leur composition. Impossible donc de savoir si du diacétyle est présent. Et si la loi encadre les produits légaux, elle ne peut rien contre un nuage de vapeur échangé discrètement à la sortie d’un bar ou d’une soirée étudiante.
Des symptômes trompeurs, mais sérieux
Le syndrome du « poumon pop-corn » ne surgit pas d’un coup. Il s’installe insidieusement. D’abord une toux persistante, un essoufflement anormal même après un effort léger, une respiration sifflante qui devient votre nouvelle bande-son. Puis la fatigue, constante, accablante. Ce n’est pas une grippe, ce n’est pas l’asthme. C’est plus grave, et surtout, irréversible.
Une fois les bronchioles endommagées, la situation est définitive. Aucun traitement curatif. Juste des soins pour tenter de ralentir l’évolution ou soulager les symptômes. On parle donc ici d’une maladie qui, à défaut d’être fréquente, change radicalement la qualité de vie.
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Vapoter, une fausse bonne idée ?
Pour les fumeurs chroniques, la vapoteuse peut représenter un moindre mal. Moins de goudron, moins de combustion, potentiellement moins de risques cardiovasculaires. C’est d’ailleurs ce que rappelle le Dr Paul Poirier, cardiologue, en soulignant « qu’une transition cigarette-tabac vers cigarette électronique peut, dans certains cas, être bénéfique ».
Sauf que les jeunes adultes qui n’ont jamais fumé et se mettent à vapoter « pour le fun » n’entrent pas dans cette catégorie. Et c’est là que le bât blesse. En cherchant à éviter les effets nocifs de la cigarette, ils s’exposent à d’autres risques, moins visibles, mais tout aussi sérieux. Car non, vapoter n’est pas anodin.
Le syndrome du « poumon pop-corn » n’est ainsi pas un mythe. C’est une réalité, certes rare, mais qui pourrait devenir plus fréquente si l’on baisse la garde. Alors avant de céder à la tentation d’un E-liquide saveur gâteau d’anniversaire, posez-vous la question : est-ce que ce petit plaisir en vaut vraiment la peine ?