Ce fléau touche 3 femmes sur 4 au travail – et personne n’en parle vraiment

Blagues déplacées, remarques humiliantes, discriminations invisibles : au travail, le sexisme dit ordinaire reste malheureusement une norme bien ancrée.

3 femmes sur 4 y sont confrontées

En 2025, le monde professionnel français se confronte une fois encore à un constat accablant. Le baromètre du sexisme ordinaire au travail, dévoilé le 6 mai par France Inter et piloté par l’initiative #StOpE, met en lumière une réalité persistante : le sexisme est loin d’avoir disparu dans les entreprises.

Malgré les discours progressistes, 77 % des femmes interrogées déclarent être régulièrement confrontées à des propos ou décisions sexistes. Une donnée saisissante, révélée à l’issue d’une enquête menée auprès de plus de 130 000 personnes issues de 19 organisations, complétée par une étude Ipsos sur un échantillon représentatif de salariés français.

Un sexisme qui prend mille formes

Le sexisme au travail ne se manifeste pas seulement par des inégalités salariales ou des plafonds de verre. Il prend aussi racine dans les petits riens quotidiens, les propos banalisés, les blagues déplacées, les commentaires sur l’apparence ou la maternité. 3 femmes sur 4 affirment ainsi avoir été la cible de blagues sexistes, une proportion qui n’a pas diminué depuis 2023.

Parmi elles, près d’une sur deux rapporte avoir été interpellée avec des qualificatifs sexistes par des collègues masculins. Ce sexisme, souvent camouflé sous l’humour ou la « flatterie », est d’autant plus pernicieux qu’il reste largement ignoré par les hommes : 64 % d’entre eux déclarent ne pas remarquer ces situations.

Comme le souligne Brigitte Grésy, ancienne présidente du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes : « Les femmes veulent de la considération. Elles veulent un sentiment de légitimité ».

Des stratégies d’évitement pour survivre

Face à ces micro-agressions quotidiennes, de nombreuses femmes mettent en place des mécanismes de protection. 57 % des femmes sondées disent ainsi adapter leur tenue, éviter certains collègues ou contourner des réunions pour échapper à des comportements sexistes. Des tactiques d’évitement qui révèlent un climat délétère, pesant sur le bien-être et la performance au travail.

Les réunions, espaces supposés d’échange professionnel, ne sont pas épargnées. 2 femmes sur 3 déclarent avoir été victimes de comportements sexistes pendant ces moments-clés, où leur parole est souvent interrompue ou leur légitimité mise en doute.

Le poids réel du patriarcat dans les carrières

Le baromètre met également en évidence les conséquences concrètes de ce sexisme systémique. Plus de 50 % des femmes estiment être moins rémunérées que leurs homologues masculins à poste égal, et 70 % jugent que la maternité freine encore l’évolution de carrière.

Dans un climat où les inégalités structurelles rencontrent les discriminations comportementales, une femme sur deux dit avoir déjà vu ses compétences remises en question en raison de son genre. Ce sentiment d’illégitimité chronique nourrit un cercle vicieux où la confiance en soi, la santé mentale et l’engagement professionnel s’érodent au fil des ans.

Une prise de conscience, mais peu d’actions

Malgré ces chiffres édifiants, les actions concrètes tardent à émerger. Si 9 salariés sur 10 reconnaissent que les propos sexistes ont un impact négatif sur la santé des femmes, ils sont encore peu nombreux à exiger des mesures fortes. Brigitte Grésy dénonce notamment les résistances masculines face à l’instauration de quotas ou d’outils de régulation : « Dès qu’on rentre dans le concret, les hommes n’ont plus le même diagnostic que les femmes. Certains disent que ça risque de les discriminer. ».

Un fossé qui illustre bien la difficulté à passer de la parole aux actes. Si le sujet du sexisme est de plus en plus abordé, l’absence de sanctions systématiques, de politiques RH structurées ou de formation obligatoire sur ces questions rend les initiatives inefficaces à long terme.

Les entreprises appelées à réagir

Selon le baromètre, plus d’une femme sur deux estime que son entreprise ne va pas assez loin dans la lutte contre le sexisme ordinaire. Cette attente souligne une volonté claire de changement, portée par les salariées elles-mêmes, souvent en première ligne.

Alors que des structures comme #StOpE œuvrent pour faire bouger les lignes, les résultats 2025 montrent que les engagements volontaires ne suffisent plus. Il est temps, pour les directions comme pour les pouvoirs publics, de sortir de la symbolique et d’agir concrètement pour transformer le quotidien professionnel des femmes.

Le sexisme ordinaire reste ainsi l’un des grands angles morts du monde du travail. Souvent relativisé, banalisé, voire nié, il continue de faire des ravages dans la carrière, la santé mentale et la confiance des femmes. Ce baromètre 2025 est un signal d’alarme, mais aussi un appel à l’action. Car ce fléau, qui touche 3 femmes sur 4, ne disparaîtra pas sans une volonté politique, managériale et collective de briser le silence.

Tatiana
Tatiana
Les animaux ne sont pas seulement des créatures à admirer ; pour moi, ils sont des enseignants, des compagnons et une source d'inspiration inépuisable.

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