Contrairement Ă son nom, le syndrome du grand coquelicot ne fait pas de fleurs aux femmes et en particulier aux business women. MĂȘme si le plafond de verre pĂšse encore au-dessus de la tĂȘte des entrepreneuses, elles sont de plus en plus nombreuses Ă se hisser Ă des places « piliers » au travail. Mais quand le syndrome du grand coquelicot sĂšme sa graine, ces exploits prennent une tournure moins rĂ©jouissante.
Ce phĂ©nomĂšne social qui prend racine avec la jalousie ambiante et les rumeurs enterre lâĂ©panouissement de ces girlboss. Les femmes ambitieuses dĂ©rangent. Spoiler alert : le patriarcat sâen est encore mĂȘlĂ©. Mais pas que. On vous explique.Â
Le syndrome du grand coquelicot, quâest-ce que câest ?
1965. JusquâĂ cette annĂ©e symbolique, les femmes vivaient aux crochets de leur mari. Elles ne pouvaient ni signer un contrat de travail ni ouvrir un compte en banque sans son accord. Aujourdâhui, les femmes vengent leurs ancĂȘtres en sâĂ©lançant dans des carriĂšres, qui, autrefois, auraient volĂ© quelques rires graveleux Ă ces messieurs. Mais certains obstacles subsistent.
Lorsquâune femme touche le sommet, les bras sont tendus non pas pour lâacclamer, mais pour la faire redescendre dâun Ă©tage. Cette tendance destructrice porte le doux nom de syndrome du coquelicot. Si en France, 63 % des femmes se rĂȘvent « cheffes », cette mauvaise herbe trĂšs coriace pourrait les faire dĂ©chanter. Le syndrome du grand coquelicot, aussi appelĂ©e syndrome dâexposition Ă©levĂ©e, fait rĂ©fĂ©rence Ă la fleur rouge connue de tou.te.s. On pourrait penser que cette image caricaturale est due Ă sa fragilitĂ©. Faux.
« Câest lâimage du coquelicot qui pousse plus haut que les autres et se fait couper la tĂȘte, afin dâĂȘtre au mĂȘme niveau que les autres, et que ceux-ci ne souffrent pas de la comparaison », dâaprĂšs le Huffington Post
En pratique, cette allĂ©gorie revient Ă dĂ©nigrer les efforts et les prouesses dâune femme malgrĂ© des rĂ©sultats aussi prometteurs que tangibles. Pour rĂ©sumer, dĂšs que les femmes prennent un peu « trop de place » et sortent du lot, elles sont vues dâun mauvais Ćil. Sans surprises, ce sont les hommes qui sortent leur meilleure langue de bois dans ce jeu pervers du dĂ©shonneur.
Les femmes, premiĂšres Ă en souffrir
Si pendant des annĂ©es, les femmes ont Ă©tĂ© rĂ©duites Ă des rĂŽles asservissants, ce nâest peut-ĂȘtre pas pour rien. Leur potentiel donnerait-il des sueurs froides Ă ces messieurs ? La rĂ©ponse est oui. La preuve, dĂšs quâelles faisaient des Ă©tincelles les hommes leur volaient la vedette. Einstein nâaurait sĂ»rement pas eu le mĂȘme sort sans lâaide de son Ă©pouse Mileva qui rĂ©solvait les problĂšmes mathĂ©matiques Ă sa place.
« DerriĂšre chaque grand homme se cache une femme », cette citation en dit long sur ce monopole du pouvoir. Mais ce modĂšle qui dĂ©gage la terrible odeur du patriarcat nâa plus la cote. DâaprĂšs une Ă©tude publiĂ©e dans la revue « Personality and Social Psychology Bulletin », la femme intelligente ferait mĂȘme peur aux hommes. La virilitĂ© se met dans tous ses Ă©tats et le mode misogynie sâactive alors comme un rĂ©flexe de dĂ©fense. Et les femmes sont les premiĂšres visĂ©es.
Selon une Ă©tude portĂ©e par la chercheuse Rumeet Billan, 87,3 % des femmes ont dĂ©jĂ fait face Ă des remarques dĂ©placĂ©es, du harcĂšlement, des comportements agressifs. Pire encore, Ă une exclusion sociale. Le motif ? Son dĂ©collage professionnel. Le sexisme fait en partie germer le syndrome du grand coquelicot, mais il nâest pas exclusif.
La femme dirigeante, une figure en proie aux idées reçues
« Elle nâa pas les Ă©paules », « elle va se faire manger tout cru », « elle laisse tomber sa famille pour sa carriĂšre »… les femmes qui caracolent Ă des postes importants ont une rĂ©putation particuliĂšrement dĂ©gradante. Lorsquâelles sont reprĂ©sentĂ©es, les femmes de pouvoir ont un air strict et une personnalitĂ© intransigeante tandis que leurs homologues masculins jouissent de lâĂ©tiquette « boss cool ».
Dâailleurs, selon un sondage Harris Interactive, 63 % des personnes interrogĂ©es trouvent que les femmes sont souvent dĂ©peintes comme dures. Avec un imaginaire aussi rĂ©ducteur, le syndrome du grand coquelicot est inĂ©vitable. Dâailleurs, il est surtout observĂ© dans le monde du sport, de la danse, des mĂ©dias et de la culture.
Le syndrome du grand coquelicot, quel impact concrĂštement ?
Le syndrome du grand coquelicot fauche la confiance en soi en premier lieu. Quâil soit provoquĂ© par des collĂšgues ou des proches, il laisse des traces indĂ©lĂ©biles. Cet Ă©panouissement professionnel qui rĂ©pond Ă un but prĂ©cis peut rĂ©veiller une certaine insĂ©curitĂ© chez les autres, voire une peur de lâĂ©chec maladive.
Les personnes touchĂ©es sont traversĂ©es par un mĂ©lange dâillĂ©gitimitĂ© et de rancĆur. RĂ©sultat, elles reportent leur haine sur ces « élĂšves modĂšles » Ă qui tout sourit. Le syndrome du grand coquelicot peut sculpter des troubles anxieux ou un syndrome de lâimposteur.
Le syndrome du grand coquelicot n’a pas toujours raison du succĂšs de ces mesdames. En 2021, le nombre de femmes cheffes d’Ătat et de gouvernement a par exemple battu des records. Un chiffre qui reste cependant trĂšs bas pour 183 pays.Â