Oser ne plus se coiffer : la tendance que personne n’avait vue venir

Sortir de chez soi sans donner un coup de brosse dans sa chevelure, ni l’apprêter ? C’est tout le principe de la « depression hair », une coiffure façon « sortie de lit » à l’opposé des brushings soignés et des autres fantaisies capillaires. Cette coiffure brouillonne, qui semble être la définition contraire de la coquetterie, s’est démocratisée sur les podiums. Pourtant, bien qu’elle fasse économiser du temps devant la glace, son intitulé pose problème.

La « depression hair », une coiffure dans le vent

Vous avez certainement déjà vécu cette scène. Vous savez quand votre réveil oublie de sonner et vous met en retard au point de vous faire zapper votre mise en beauté. Alors, vous sortez avec une tête peu présentable qui porte encore les stigmates de votre nuit agitée. Des nœuds apparents, des mèches dans tous les sens et une raie à peine visible… Cette coupe, souvent causée par les pannes de réveil, est désormais “volontaire” et créée de plein gré par les it-girls.

Désormais, cette coiffure des « mauvais jours » n’est plus une faute de goût ni une erreur capillaire, c’est un acte mode à part entière, le signe distinctif des filles cool. Elles ne tentent plus d’arranger les dégâts en transformant leur doigt en peigne, elles assument fièrement cette esthétique « saut-de-lit ». Ce parti pris « j’m’en foutiste » porte même un nom : la depression hair. Cette coiffure aléatoire, formée dans le creux de l’oreiller, est légion sur les podiums.

Si autrefois, lors des défilés, les mannequins arboraient des cheveux plaqués, des tresses serrées et des chignons sculpturaux, à l’ère d’une mode très conceptuelle, elles affichent des cheveux gras, en épis et des queues de cheval à moitié défaites. Elles renoncent aux ustensiles capillaires et investissent le catwalk avec cette coiffure qui n’en est pas vraiment une. Ainsi, à l’issue du défilé Miu Miu, Gigi Hadid devenait l’ambassadrice des cheveux emmêlés. Elle n’a pas oublié de passer entre les doigts du styliste capillaire, c’était un choix délibéré.

 

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Normaliser le fait de ne pas se coiffer

Sur la forme, cette coiffure en bataille est plutôt appréciable. Elle lutte silencieusement contre le culte de la perfection et normalise la coupe vite expédiée des matinées pressées. Alors que depuis toujours, les femmes ont tenté de discipliner leur chevelure, d’aplatir les frisottis et de dompter les baby hairs, cette approche un peu plus laxiste les libère de quelques contraintes capillaires. Elle démocratise une pratique longtemps diabolisée en beauté : la procrastination. Cependant, sur le fond, cette coiffure nommée « depression hair » glamourise un état mental bel et bien réel.

Les maisons de couture n’ont jamais « défini » cette coiffure comme telle, mais les internautes s’en sont chargés et ils n’auraient peut-être pas dû prendre l’initiative. Ils ont trouvé là des points communs avec les personnes dépressives, qui n’ont goût à rien et certainement pas aux créations capillaires. Cette coiffure, qui à l’origine partait d’une bonne attention et allait à rebrousse-poil des diktats tirés à quatre épingles, a fini par se perdre dans les méandres du net.

La toile est douée pour tout métamorphoser en tendance. Si la hype autour des cernes et des tâches de rousseur restait saine, là, c’est très limite. La « depression hair » semble résumer cette maladie à une apparence et à un laissé allé. Cette représentation est très réductrice.

Mais aussi une coiffure qui fait polémique

La « depression hair » invite au lâcher prise devant le miroir et inverse les standards de beauté pour que le réveil ne soit plus un contre-la-montre. Ce qui est plutôt positif en soi. Or, de par son terme, elle banalise la souffrance psychologique et la détourne même en signature visuelle. Loin d’être militante, elle est surtout dégradante pour celles et ceux qui bataillent avec ce monstre intérieur.

La dépression est bien plus profonde et dévastatrice qu’une simple coiffure hasardeuse. Si les personnes concernées n’ont pas l’énergie ni l’envie de se coiffer, ce n’est qu’une partie visible de ce gouffre mental. Des voix s’élèvent également contre une esthétisation du désordre émotionnel, où la détresse devient un accessoire de style. Derrière une coiffure présentée comme « authentique » se cache souvent un long travail de mise en scène. La « depression hair » des podiums est savamment exécutée et ne résulte pas d’une apathie chronique. Pourtant, dans la réalité, les personnes en proie à la dépression n’ont juste pas la force de prendre soin d’elles. Voir leur expérience transformée en « look » ou en « vibe » les renvoie à une incompréhension persistante de la santé mentale.

La moralité ? Si vous manquez de temps pour vous coiffer, vous avez désormais ce joker de la « depression hair ». Vous pouvez vous permettre cette entorse capillaire, la mode vous pardonnera. En revanche, pas question de « feindre » la dépression dans la rue juste pour mimer les allures de magazines.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.

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