À travers son nouvel ouvrage « Et le bébé alors ??? » (Flammarion), l’autrice et dessinatrice Louison lève le voile sur une réalité encore trop peu racontée : celle des femmes confrontées aux parcours de procréation médicalement assistée (PMA).
Les propos de Louison, cités dans cet article, ont été recueillis par Marie Claire, à l’occasion de la sortie de son livre.
« C’est un peu parce que je n’arrive pas à tomber enceinte que ce livre existe »
Louison n’avait pas prévu de faire de son parcours PMA un livre. Face aux vagues émotionnelles, aux traitements, à l’attente, aux rendez-vous médicaux et aux espoirs suspendus, elle a finalement trouvé refuge dans l’écriture. « Au début, je ne me sentais pas légitime pour en parler », confie-t-elle. Pourtant, elle a commencé à noter les petites phrases qu’on lui lançait sans y penser, ces réflexions venues de proches, de connaissances, parfois même de soignants.
Le déclic ? L’échec d’un premier transfert d’embryon. « À ce moment-là, j’étais à fleur de peau. Mon petit frère m’a dit, gentiment : ‘J’ai vu sur Internet que ça ne marchait pas du premier coup’. C’est là que j’ai pris conscience de la violence involontaire de certaines paroles ».
La PMA, un quotidien fait de micro-agressions et de solitude
Dans son livre, Louison déplie ces phrases comme autant de coups d’épingle dans une période déjà douloureuse. « Et le bébé alors ??? », interroge, compile, décortique. « Il y a une forme d’impuissance collective face à la PMA, et ça se traduit par des tentatives de rassurer, de positiver, qui tombent souvent à côté. Ou qui font mal ».
L’autrice et dessinatrice souligne que ces remarques ne viennent pas forcément de personnes malveillantes. Parfois, ce sont des amis qui ne savent pas quoi dire, des collègues maladroits, ou encore des membres de la famille qui, incapables de gérer leur propre inconfort, répondent par des injonctions. « Celle qui me dit : ‘Si je l’ai fait, tu peux le faire’, c’est d’une bêtise affligeante », explique Louison.
L’écriture comme bouée de sauvetage
Au cœur de cette expérience, Louison met en lumière une émotion souvent absente des discours publics sur la PMA : l’impuissance. « Ce sentiment d’être dépossédée de son corps, de son calendrier, de ses certitudes, je ne m’y attendais pas. J’ai toujours été autonome, organisée, et là… tout m’échappait ».
C’est cette tension permanente entre espoir et frustration qui traverse son livre. « Il y a de la drôlerie dans des situations absurdes, mais aussi beaucoup de colère rentrée ». Loin de chercher à édulcorer son vécu, elle choisit une voix sincère, parfois crue, toujours lucide.
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Témoigner pour briser l’isolement
L’ouvrage de Louison n’est pas un mode d’emploi, encore moins un manifeste militant. C’est un récit sensible, porté par le besoin de créer des liens entre femmes qui, comme elle, vivent cette attente prolongée. « Ce que j’aurais aimé entendre au début, c’est que je n’étais pas seule. C’est tout. Pas des conseils, pas des projections, juste une forme de présence ».
En partageant ses doutes, ses agacements et ses petites victoires, Louison offre une reconnaissance précieuse à celles qui vivent la PMA dans le silence, parfois même dans la honte. Elle rappelle aussi l’importance d’un langage respectueux, d’une écoute sans jugement, et de la possibilité de dire « c’est dur », sans qu’on vienne immédiatement minimiser cette douleur.
Une parole rare, nécessaire
Dans un paysage médiatique encore frileux à aborder la PMA autrement que par le prisme du « happy end », le témoignage de Louison fait figure d’exception. Elle n’y raconte pas une réussite spectaculaire, ni une maternité conquise de haute lutte. Elle parle simplement de l’entre-deux, de ce moment flou entre l’espoir et la résignation, où chaque mot compte.
Avec son livre « Et le bébé alors ??? », elle invite à repenser la manière dont on accompagne – ou non – les femmes dans leurs parcours de fertilité. Un appel à la douceur, à la justesse, et à la reconnaissance de ces luttes intimes trop souvent passées sous silence.