Elle siffle devant son pupitre, scande des insultes devant sa professeure, tape dans ses mains et personne ne relève son comportement. Dans un autre contexte, elle aurait récolté le bonnet d’âne et fini dans le bureau de la CPE en un aller simple. Pourtant Willorie a des circonstances atténuantes : elle est porteuse du syndrome de Gilles de la Tourette. Elle partage son quotidien scolaire sur TikTok pour changer les regards sur ces tics encore mal compris.
Le syndrome Gilles de la Tourette à l’école
Elle prononce des grossièretés, fait des grimaces à la chaîne, secoue ses bras violemment frôlant parfois le crâne de ses voisins de table, racle sa gorge sans s’excuser par la suite. À première vue, Willorie se range du côté des cancres, ces élèves turbulents qui s’assoient au fond de la classe et qui prennent un malin plaisir à perturber les cours. Toutefois, l’étudiante, elle, n’a pas l’intention de faire la misère à sa professeure ou de semer la zizanie devant le tableau noir. Elle n’a rien à voir avec ces fauteurs de trouble qui fabriquent des sarbacanes avec leur stylo bille, qui gravent les tables au compas et qui collent des chewing-gum sur les chaises. Tous ces tics sont tout bonnement incontrôlables. Elle ne peut pas les contenir, ni les garder pour elle.
Willorie est porteuse du syndrome de Gilles de la Tourette, qui se caractérise par des mouvements et des sons involontaires. Vous avez peut-être le vague souvenir du chanteur Lewis Capaldi, pris d’une crise devant le micro, face à une foule de fans en délire. Il était incapable de reprendre sa chanson « Someone You Loved » et le public avait alors pris le relais le temps qu’il revienne à lui. Willorie, elle aussi, est soumise à ces tics symptomatiques. Elle n’est pas maîtresse de ses gestes, elle est spectatrice.
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Dans la peau d’une élève en proie aux tics
En classe, Willorie mime les sonneries de téléphone avec sa bouche, pique ses camarades d’une pointe de stylo, improvise du beatbox sans le vouloir et souffle des mots interdits, qui lui aurait fait prendre la porte si elle n’avait pas ce trouble neurologique complexe. Elle se fait parfois violence pour ne pas agripper les cheveux de sa camarade d’en face. Cependant, elle a de nombreux alliés dans sa classe, dont une bonne copine, toujours à sa gauche. Elle la frappe, lui répète « iguane », lui porte la main au front mais elle ne s’en plaint jamais. Les professeurs, eux aussi, sont compréhensifs et poursuivent leur leçon comme si de rien n’était.
Si ses tics font doucement sourire ses camarades, ils sont particulièrement handicapants pour la principale concernée. Avec le syndrome de Gilles de la Tourette, difficile de suivre les cours et d’assimiler toutes les informations. Pourtant, Willorie prend des notes entre deux grimaces, s’adonne aux expériences de chimie comme les autres et pianote sur son clavier malgré des claquements de doigts inopinés.
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Sensibiliser pour moins moquer
À chaque fois qu’elle prend place sur le banc de la fac, Willorie active la caméra de son téléphone qui capte tous ses faits et gestes. À travers ces vidéos immersives, vues plus de 400 000 fois pour certaines, elle prouve que les personnes dictées par le syndrome de la Tourette peuvent mener une vie normale. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, elle n’a pas besoin d’intégrer une classe spécialisée du type ULIS.
Comme elle, les personnes atteintes du syndrome de la Tourette sont souvent épiées d’un regard curieux, voire effrayé. Entre les murs de son établissement scolaire, qui respire la bienveillance, c’est plutôt de la fierté et de l’admiration qu’elle suscite. Même si le rire est parfois difficile à contenir, surtout quand Willorie crie ouvertement des injures et lève subitement son majeur, il n’a jamais une mauvaise sonorité. En clair, ses vidéos sont d’utilité publique, surtout quand on sait que le syndrome se déclare dans l’enfance entre 5 et 10 ans.
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Avec ses vidéos, Willorie montre le syndrome sous un nouvel angle : plus réaliste et moins « hors normes » ou spectaculaire. Elle montre une autre réalité : la sienne. La jeune femme prend d’ailleurs cette condition sur le ton de l’humour, se décrivant comme une siffleuse chronique. Une belle leçon à celles et ceux qui ne voient pas plus loin que les clichés.