Stigmatisées du bitume à l’oreiller, les personnes grosses n’ont pas une bonne réputation dans l’intimité des chambres à coucher. Beaucoup les imaginent faire l’étoile de mer sur le matelas et réclamer une pause dès le premier coup de reins. Pourtant, même si le dictionnaire du Kama sutra ne met en scène que des silhouettes fines, les personnes grosses s’adonnent aussi à des cabrioles érotiques et répondent présentes au rendez-vous de la chaire.
La sexualité des personnes grosses durement jugée
Elles sont à bout de souffle en quelques minutes, elles n’ont pas de souplesse, elles s’en tiennent à une seule position confortable et font l’amour dans le noir par mesure de protection. L’image des personnes grosses au lit est très caricaturale. Pourtant, elles parlent aussi le langage de l’érotisme. Contrairement à ce que la société veut faire croire, elles n’ont pas une libido amorphe. Leur corps, plus souvent aimant à moqueries qu’à désirs, est sans cesse diabolisé, y compris dans les espaces feutrés et confidentiels.
Lorsque ces silhouettes plantureuses se dévêtissent pour se laisser aller au plaisir de la chair, elles sont accusées d’être paresseuses et d’encombrer les étreintes. Comme si les rondeurs étaient de trop dans l’équation sensuelle. Pourtant, les personnes corpulentes ont plus de surface à caresser, plus de zones à explorer du revers du doigt (et plus si affinité). Et les courbes ne sont pas insensibles au contact physique, au contraire, elles ressentent ces agréables décharges électriques. Beaucoup croient que les rondeurs sont sous anesthésie permanente et que rien ne peut les transcender. À tort.
Dans un monde grossophobe où le ventre rebondi, les cuisses généreuses et les hanches voluptueuses sont hissés en tue-l’amour, difficile de savourer pleinement ce tête-à-tête sous la couette. Cependant, les personnes grosses ont une sexualité bien plus nuancée et riche que ce que les films X veulent bien vous montrer.
Un corps qui bouge, y compris sous la couette
Selon la pensée collective, les rondeurs amortissent le plaisir, paralysent les gestes et empêchent l’alchimie. Les personnes qui ont le corps en relief sont souvent perçues comme des Gaston Lagaff du sexe : empotées, raides et infranchissables. C’est une idée reçue qui colle à la peau des personnes grosses.
Pourtant, une personne mince peut très bien être rigide dans ses mouvements et une personne grosse aussi flexible qu’un chewing-gum. La morphologie ne fait pas la souplesse. D’ailleurs, de nombreuses femmes aux courbes chantantes le montrent au gré de figures de yoga. Alors, imaginez ce que peut donner le chien tête en bas version Kama sutra.
Le corps comme terrain d’exploration
Les personnes grosses ont aussi une sexualité florissante et fantaisiste. Alors que dans l’espace public, elles se font petites et discrètes, sous les draps, elles sont souvent plus démonstratives. C’est une manière pour elles de se réapproprier ce corps dont elles sont sans cesse dépossédées.
Certaines d’entre elles préfèrent garder un bout de sous-vêtements sur le buste ou bander les yeux de leur partenaire pour se rassurer. D’autres ont les complexes en feu au lieu de s’enflammer ailleurs. Faire l’amour, c’est avant tout découvrir son corps dans toutes ses possibilités. En prenant le temps d’écouter ses sensations, d’expérimenter différentes postures ou rythmes, ces personnes redéfinissent souvent ce que le plaisir signifie pour elles. Chaque corps, quelle que soit sa taille, invite à la créativité et à la complicité.
La sensualité pour se réconcilier avec soi
Les personnes grosses ont parfois peur de faire tomber les vêtements et de se laisser toucher par d’autres mains que les leurs. Toutefois, lorsqu’elles se sentent en confiance, elles arborent de la lingerie suggestive, se déversent de l’huile parfumée sur le corps et sollicitent des outils qui procurent plus de frissons que les doigts. La sexualité ne se résume pas à la levrette ou à l’amazone, ni à quelques va-et-vient vite expédiés. Pour beaucoup, c’est simplement un « sport de chambre ». Or, pour les personnes grosses, c’est le point de départ de l’amour de soi.
Dans ce cadre intimiste, les courbes ne sont pas des défauts à effacer, mais des zones érogènes à titiller. Le corps n’est pas un poids à soulever, mais un instrument de plaisir à animer. Les rondeurs, aussi nombreuses soient-elles, n’attirent pas les critiques, mais les baisers. La chambre à coucher est une safe place où les personnes grosses se sentent libres de vivre leur sexualité comme elles l’entendent que ce soit dans la douceur ou la brutalité.
Au-delà des clichés, ce qui compte vraiment, c’est ce qui se passe dans le cœur et dans la peau. Les personnes grosses n’ont pas une sexualité différente ou monotone. Elles connaissent aussi le chemin qui conduit vers le 7e ciel et il n’y en a pas qu’un.