Le Japon vient de franchir un nouveau « seuil inquiétant », selon les autorités. Début août 2025, le gouvernement a annoncé une baisse record de sa population : près de 900 000 habitants en moins en un an, selon les chiffres officiels. C’est la plus forte chute jamais enregistrée dans l’histoire moderne du pays, qui compte désormais environ 120,65 millions d’habitants. Cette tendance, amorcée dès les années 2010, s’accélère et le pays perd l’équivalent d’une grande ville chaque année.
Des seniors toujours plus nombreux
D’après une analyse de Daily Sabah, le Japon affronte une double crise : un vieillissement extrême de sa population et une chute libre de la natalité, avec un taux de fécondité tombé à 1,16 enfant par femme en 2024. C’est l’un des taux les plus bas au monde, bien en dessous du seuil de renouvellement des générations (2,1). À cela s’ajoute une forte baisse des mariages – 6 % de moins en 2023 – qui contribue elle aussi à la stagnation des naissances, comme le rapporte l’Associated Press.
Aujourd’hui, près de 30 % de la population japonaise a 65 ans ou plus, une proportion qui devrait encore croître dans les décennies à venir. D’après l’Observatory Research Foundation, « ce vieillissement met déjà à rude épreuve le système de santé, les retraites et les services sociaux, tout en réduisant la population active ». La société japonaise fait face à un déséquilibre démographique de plus en plus difficile à compenser.
Le phénomène est particulièrement visible dans les zones rurales, où de nombreux villages sont désertés. Certains abritent désormais plus de centenaires que d’enfants. De vastes territoires sont désormais surnommés les « villages fantômes », symboles d’un pays qui se vide silencieusement.
Des plans d’action… peu efficaces pour l’instant
Face à l’urgence, le gouvernement japonais a annoncé l’an dernier un plan de 70 milliards d’euros sur 3 ans « pour soutenir la natalité ». Ce programme comprend des aides financières aux familles, un allongement des congés parentaux et un soutien accru à la garde d’enfants. Malgré ces investissements colossaux, les résultats se font encore attendre. Comme l’écrit The Financial Times, « le gouvernement fait face à une mentalité profondément ancrée » : pour beaucoup de Japonais, fonder une famille reste difficilement compatible avec la précarité économique et les normes professionnelles rigides.
D’après AP News, « les jeunes générations, particulièrement les femmes, dénoncent un manque de flexibilité et une société patriarcale peu favorable à l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle ». Résultat : le choix de ne pas avoir d’enfant ou de ne pas se marier devient de plus en plus courant.
Immigration, robotique, écologie : les pistes pour demain
Si le Japon reste historiquement peu ouvert à l’immigration, certaines villes comme Hamamatsu expérimentent toutefois des solutions locales. Selon The Financial Times, « cette commune attire des travailleurs étrangers en leur proposant des services d’intégration culturelle et linguistique ». À l’échelle nationale, l’impact reste néanmoins encore marginal.
Parallèlement, le Japon investit dans la robotique pour combler le manque de main-d’œuvre. Des robots assistants sont déjà présents dans certains hôpitaux et maisons de retraite. Ce modèle, typiquement japonais, s’inscrit dans une volonté d’adapter la société au vieillissement sans modifier en profondeur la structure démographique.
Certains experts proposent aussi une lecture plus optimiste de cette transition. D’après un article de TIME, « la baisse démographique pourrait avoir des effets bénéfiques sur l’environnement » : moins de pression sur les ressources, réduction des émissions de carbone, urbanisation plus raisonnée… Le Japon pourrait devenir « un laboratoire d’une société durable post-croissance ».
Si rien ne semble pouvoir enrayer la tendance à court terme, le Japon est déjà en train de devenir un modèle de société vieillissante. Moins peuplée, plus âgée, plus lente peut-être… mais aussi potentiellement plus résiliente et plus sobre. Encore faut-il que les politiques suivent le rythme, que les solidarités intergénérationnelles se renforcent, et que les choix de vie des jeunes soient pleinement entendus.