Lorsque les femmes rondes ou grosses portent des mini-jupes, des cropped top et des robes moulantes qui enlacent chacune de leur courbe, on dit qu’elles sont courageuses. Comme si accepter son corps tel qu’il est était un acte de bravoure. Cet adjectif qui s’accroche aux silhouettes plantureuses est plus un gros mot qu’un compliment. C’est le précieux rappel de ces créatrices de contenu plus size.
Le mot « courageuse », un faux compliment
Elles arborent des jupes fendues qui mettent leurs cuisses pulpeuses en évidence. Elles sillonnent le sable chaud avec des bikinis échancrés sur leurs hanches voluptueuses. Et elles foulent le bitume avec des jeans skinny et des décolletés plongeants qui donnent pleine vue sur leur poitrine garnie. Ces femmes qui font du 44 ou du 46 s’habillent selon leurs envies et non pas selon les normes. Pourtant face à cette belle démonstration de confiance, ce n’est pas le fameux « ça te va bien » qui arrive en premier.
Dans la bouche des autres, les femmes rondes qui ont un vestiaire libre et un style affirmé sont juste « courageuses ». Aux yeux de la société, leur dressing n’est pas inspirant, il est « audacieux » ou « osé ». Au lieu de répondre gentiment « merci », Danielle Burnett et Danielle Lucker corrigent ce mot inapproprié. Ces deux figures du mouvement body positive font un petit rappel de langage bien utile. Changer de travail ou faire son coming-out, ça, c’est courageux. En revanche, troquer le t-shirt noir contre un haut dos nu qui laisse passer les bourrelets ou aller en festival avec la cellulite à l’air, est un acte d’amour propre, pas d’héroïsme.
Le mot « courageux » qui semble féliciter induit en réalité tout l’inverse : ce qu’elles font est hors-norme, risqué, presque inconvenant. C’est comme si montrer ce corps dit généreux relevait de la prise de risque. Selon cette mentalité un tantinet grossophobe, les femmes rondes qui aiment le court, le moulant et le dénudé sont courageuses parce qu’elles transgressent une règle. Elles ne font pas preuve de « prudence » avec leur look.
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Une tenue n’a pas à être justifiée par du courage
À bien y réfléchir, personne ne dit à une femme mince en robe fendue ou en brassière qu’elle est « courageuse ». Son corps est socialement validé. Elle s’habille comme elle veut, et cela semble naturel. En revanche, les femmes rondes, elles, doivent perdre du tour de taille, rogner leur poignet d’amour et faire fondre leur ventre pour connaître le même sort et s’émanciper du mot « courageux ».
Dans leur vidéo, les deux créatrices de contenu solaires ne s’excusent pas d’avoir des rondeurs. Danielle Burnett et Danielle Lucker passent d’un ensemble loose à une tenue de cow-girl. L’une affiche un micro-short en crochet et un haut de bikini caramélisé tandis que l’autre a un foulard satiné en guise de top et une jupe semi-transparente. Et attention scoop : elles ne s’habillent pas ainsi pour provoquer ou pour défier les standards. Elles le font pour elles, pour s’apprécier dans le miroir. Ce que ces femmes demandent, ce n’est pas des applaudissements, simplement d’être traitées normalement, sans que leur tenue soit associée à du militantisme ou du culot.
Se réapproprier le corps sans chercher à plaire
Comme le prouvent les deux créatrices de contenu, qui éduquent les internautes à la diversité corporelle, le vêtement est un écrin, non une armure contre le regard des autres. Porter des vêtements près du corps ou des matières satinées quand on est ronde n’a rien d’extraordinaire. Sauf que la société a tellement invisibilisé les corps ronds dans l’espace public que lorsqu’ils se dévoilent dans leur entièreté et abandonnent la tunique noire, c’en est presque indécent.
Le message est clair : il est temps de faire sauter le verrou sur les dressings et de se célébrer dans les moindres détails. Dans ce contexte, le mot « courage » sonne faux, car il suppose une peur à surmonter, alors que ces femmes ont surtout choisi de ne plus avoir peur. Au lieu de faire des éloges maladroites, contentez-vous simplement d’observer ce merveilleux spectacle. Appréciez les tenues pour ce qu’elles sont, pas pour ce qu’il y a en-dessous.
Porter une robe qui ne fait qu’un avec les courbes ou un haut transparent qui en dit long sur l’anatomie est un choix esthétique avant tout. Ce n’est pas une rébellion contre les normes ou une réponse à un défi. Ça s’appelle être soi-même. Un concept qui échappe encore à de nombreuses personnes.