Dix ans après avoir été sacrée Miss France, Camille Cerf prend la parole pour dénoncer une réalité longtemps tue : les violences symboliques et les pressions psychologiques imposées aux femmes dans l’industrie de la mode. Derrière les strass et les paillettes, elle révèle les injonctions déshumanisantes subies par les mannequins, y compris celles jugées « parfaites ». Dans une interview poignante accordée à One Time, l’ancienne reine de beauté dévoile un parcours semé d’humiliations et de normes tyranniques. Son témoignage sonne comme un cri nécessaire pour remettre en question une industrie qui sacrifie le bien-être au nom de l’image.
Une parole libérée après des années de silence
Camille Cerf n’est pas la première à dénoncer les dérives du mannequinat, mais sa parole a un poids particulier. Élue Miss France 2015, elle a longtemps incarné une forme de perfection. Pourtant, elle confie aujourd’hui avoir été brisée par les remarques sur son corps, jugé « trop gros » ou « pas conforme », malgré des mensurations parfaitement dans les clous des standards.
Lors de la Fashion Week, un épisode reste gravé dans sa mémoire : un styliste lui reproche un cou trop large pour porter une pièce conçue pour l’encadrer. La phrase qui tombe est glaçante : « T’as deux jours pour maigrir du cou. » Camille, interloquée, répond ironiquement : « Mais comment on fait pour maigrir du cou ? » Une réponse qui en dit long sur l’absurdité des attentes et la déshumanisation des corps.
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Des standards irréalistes, des corps niés
Dans ce monde, chaque centimètre est scruté, chaque courbe devient un défaut potentiel. Camille raconte qu’on lui a reproché des hanches de 89 cm… alors que c’était précisément le chiffre demandé. Ce genre de micro-agressions, répétées, finit par déformer la perception que l’on a de soi. « On m’avait mis dans la tête que j’étais grosse », confie-t-elle, soulignant l’impact durable de ces remarques sur l’estime de soi.
Même pour une séance de chaussures, le corps devient problématique. Dans un showroom, toutes les paires étaient en taille 38, alors qu’elle chausse du 40. Encore une fois, elle se sent « trop grande », « trop ceci », jamais « comme il faut ». Un malaise permanent dans un univers où la singularité n’a pas sa place.
Un choix de rupture pour se reconstruire
Face à cette pression constante, Camille a choisi de s’éloigner. Installée à Lille, mère d’un petit garçon, elle a décidé de construire une vie plus alignée avec ses valeurs. Influenceuse, entrepreneure, elle développe aujourd’hui une marque de lingerie inclusive qui célèbre les corps réels. Une démarche en cohérence avec son vécu, et un engagement pour une mode plus respectueuse, où la diversité corporelle devient la norme plutôt qu’un obstacle.
Camille incarne désormais une autre féminité : assumée, libre, apaisée. En prenant la parole, elle offre un miroir à celles qui doutent, à celles qui s’imaginent insuffisantes dans un monde qui exige l’impossible.
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Un témoignage qui fait écho à une problématique plus large
Ce récit personnel dépasse le cadre de l’expérience individuelle. Il met en lumière un système qui persiste à imposer des standards inaccessibles, malgré les évolutions sociétales. Le témoignage de Camille Cerf intervient dans un contexte où les réseaux sociaux, les mouvements féministes et les prises de parole publiques tentent de faire bouger les lignes. Et si certains pans de l’industrie se veulent plus inclusifs, la réalité sur le terrain reste souvent bien différente.
Il ne s’agit pas pour elle de régler ses comptes, mais de participer à une prise de conscience collective. De rappeler que les corps ne sont pas des objets à moduler selon des normes archaïques. Et que derrière chaque mannequin se cache une personne, avec ses émotions, ses fragilités, sa dignité.
En dénonçant les injonctions absurdes de la mode, Camille Cerf ne livre pas seulement un témoignage émouvant : elle ouvre un débat nécessaire sur la place des femmes dans un système qui continue de confondre beauté et conformité. Son parcours, de Miss France à entrepreneure militante, prouve qu’il est possible de s’affranchir des diktats et de reconstruire une estime de soi en dehors des projecteurs. En prenant la parole, elle inspire d’autres femmes à faire de même, à revendiquer leur corps tel qu’il est, et à dire non à un monde qui voudrait les réduire à des silhouettes.