Cancer : un guide pour préserver estime de soi et vie intime

Comment accepter son corps et poursuivre ses désirs de sexualité avec/après un cancer ? La maladie et ses traitements peuvent avoir des conséquences sur la vie intime et la sexualité des malades. Avec « Préserver sa sexualité », la Fondation ARC pour la recherche sur le cancer vient briser les silences et les idées reçues sur la santé sexuelle durant et après la maladie. Ce livret d’informations, d’utilité publique, propose une sensibilisation ainsi que des solutions à ce sujet tabou pour les professionnel.le.s, les patient.e.s et leurs partenaires.

Briser les tabous sur la santé sexuelle et la maladie

Selon une étude intitulée « L’information sur les questions de sexualité avec le cancer », et réalisée par Think pour la Fondation ARC, 40 % des patient.e.s atteint.e.s d’un cancer se sont déjà posé.e.s des questions sur leur sexualité à un moment ou à un autre de leur parcours de soins. Et pourtant, très peu de patient.e.s ont l’occasion ou le courage d’en parler à leurs proches et aux soignant.e.s.

Cette même étude précise que 73 % des patient.e.s déclarent ne pas avoir été informés par les soignant.e.s des possibles troubles sexuels liés à leur cancer. Un tiers des autres malades se débrouillent seul.e.s, en discutant avec d’autres patient.e.s ou, pour plus de la moitié, en se rendant sur Internet. Le guide « Préserver sa sexualité » s’avère donc être un outil pratique pour engager une conversation sur ce thème encore tabou.

« Lorsqu’on vous annonce que vous êtes atteint d’un cancer, la sexualité n’est pas la première question qui vous vient à l’esprit et on le comprend. Mais, très rapidement, les répercussions sur la santé sexuelle d’un traitement chimique ou d’une chirurgie, et donc sur la qualité de vie, amènent les malades à se poser des questions dans ce domaine », souligne Pierre Bondil, urologue et sexologue, président de l’association interdisciplinaire postuniversitaire de sexologie (AIUS)

Les troubles de la sexualité liés à la chirurgie et à l’estime de soi

La chirurgie est le principal traitement lié aux troubles de la sexualité. Dans le cas des cancers pelviens par exemple, chez les hommes comme chez les femmes, les curages ganglionnaires (chirurgie lors de laquelle on enlève une région de ganglions lymphatiques) associés à la radiothérapie peuvent entraîner l’apparition d’œdèmes dans les organes génitaux et dans les jambes. La chimiothérapie et la radiothérapie peuvent elles induire d’importants effets secondaires altérant le désir sexuel.

Pour les femmes atteintes d’un cancer, ces derniers traitements ainsi que la curiethérapie (technique de radiothérapie) peuvent entrainer une sécheresse vaginale, un rétrécissement du vagin et/ou des douleurs à la pénétration. Pour un cancer du sein, la mastectomie est également à l’origine de douleurs.

En cas de cancers pelviens et génitaux, la cystectomie (ablation partielle ou totale des organes génitaux) et la vulvectomie (consiste à retirer entièrement ou partiellement la vulve) ont des conséquences sur la vie sexuelle. Enfin, les traitements hormonaux provoquent une ménopause prématurée, ce qui génère de la sécheresse vaginale, et pour une femme sur deux, une baisse du désir. Pour les hommes, les chirurgies liées au cancer de la prostate et/ou de la vessie, ainsi que la radiothérapie peuvent engendrer des troubles de l’érection, voire de l’éjaculation.

Mais au-delà de l’impact « mécanique » des cancers sur la vie sexuelle, l’estime de soi chez les patient.e.s peut aussi profondément diminuer :

« Les femmes ont souvent peur d’avoir perdu leur capacité de séduction. Le sentiment d’être moins désirables et désirées nourrit une peur d’être abandonnées. Chez les hommes cette peur est là aussi, alimentée par la crainte de perdre leur virilité et d’être incapables de procurer à nouveau du plaisir », décrit en ce sens Eliane Marx, psychologue et sexologue à Strasbourg

Les répercussions de la sexualité sur la santé

Quel que soit l’âge, le stade de la maladie, que l’on soit atteint.e ou guéri.e d’un cancer, préserver une vie sexuelle est ainsi un facteur de bien-être. En effet, pour l’OMS et pour la sociologue Anne Fagot-Largeault la qualité de vie rejoint « ce qui fait la vie », à savoir « la bonne santé, l’amour, le succès, le confort, les jouissances, bref, le bonheur… ».

En ce sens, la fondation ARC met en avant l’importance de parler de sexualité dans la maladie, surtout lorsque ce tabou entraîne des soucis d’observance des traitements, et de la prise en charge médicale plus généralement.

« Avoir un cancer crée des désordres psycho-émotionnels et peut aggraver un état dépressif dont souffrent 20 % des malades. Prendre soin de la sexualité du/de la patient.e, c’est finalement traiter le cancer et améliorer les chances de rémissions », souligne Éliane Marx, psycho-oncologue et sexologue libérale à Strasbourg

Le livret d’information « Préserver sa sexualité » explique qu’il existe divers traitements pour limiter les troubles sexuels dans la maladie. En guise d’exemple, pour le cas de la sécheresse vaginale – l’une des premières causes de consultation – il existe des traitements locaux, non hormonaux, mais aussi des « technologies prometteuses en cours d’étude », telles que le laser vaginal et vulvaire.

Pour le cas de troubles de la vie sexuelle liés à l’image de soi ou à des angoisses profondes, la Fondation ARC pour la recherche sur le cancer explique que le ou la médecin pourrait s’associer avec plusieurs professionnel.le.s : un.e socio-esthéticien.ne, un.e psychologue et/ou un.e sexologue.

« Le message à retenir est que l’on ne doit pas renoncer à sa sexualité parce qu’on a un cancer. Il est essentiel que les médecins abordent la santé sexuelle dès l’annonce du diagnostic, puis tout au long de la prise en charge, de façon régulière, en apportant une gradation dans les réponses.

Tout professionnel de santé doit être en mesure d’informer, de rassurer et, s’il le peut, de traiter ou d’orienter vers d’autres spécialistes. Pour cela, il faut renforcer la formation des professionnel.le.s à la santé sexuelle pour ouvrir le dialogue sans gêne et en confiance, tout en améliorant aussi l’accès direct des malades à l’information », explique Nicolas Reymes, responsable de l’information du public et de la communication à la Fondation ARC

Le livret « Préserver sa sexualité », de la collection Mieux vivre, a été réalisé avec l’aide de plusieurs spécialistes, en collaboration avec Rose Magazine et Maïa Mazaurette pour les illustrations. Il est téléchargeable sur le site internet de la Fondation et peut également être commandé puis envoyé gratuitement au format papier, sur demande.

Cancer et sexualité : quelles conséquences ? Comment (re)trouver une sexualité épanouie ? On en parle aussi sur notre forum.

Cindy Viallon
Cindy Viallon
Journaliste free-lance, mes sujets de prédilection sont les féminismes intersectionnels, la société et la culture. J’aime déconstruire l’actualité et briser les tabous une fois pour tous·tes !
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