La puberté ne représente pas un gros chapitre dans les livres de SVT. Pourtant c’est une étape importante dans la vie des ados. Le corps change, les formes poussent, les hormones prennent leur place et les premiers émois intimes se dessinent. Pour combler les lacunes scolaires sur le sujet et mieux appréhender ces bouleversements, les jeunes filles peuvent participer à des “cercles roses”. Des groupes de parole sans tabous qui abordent tous les pans de la puberté.
Des “cercles roses” pour comprendre la puberté
Ce n’est pas sur les bancs de l’école que les jeunes filles vont s’informer sur la puberté, un mot si familier mais si étranger à la fois. Ce terme se fait rare dans la bouche des professeurs, qui préfèrent remettre cet apprentissage de “l’intime” aux parents. Dans les manuels de SVT, seule la reproduction entre homme et femme semble compter. La puberté, elle, est vite expédiée alors que les élèves du collège sont en plein dedans. Depuis 2001, chaque élève est censé suivre trois heures d’enseignement à l’éducation intime par an. Or, seulement 15% d’entre eux auraient appris quelques notions de cette matière qui fait encore rougir les joues
Résultat : les jeunes filles se sentent bien démunies dans cette transition, dont elles n’ont entendu que du jargon scientifique. Alors pour enseigner les bases de la puberté aux adolescentes, qui se métamorphosent doucement en femmes, des “cercles roses” ont vu le jour. Ces groupes de parole s’articulent comme ceux qui sont destinés aux alcooliques anonymes mais se tiennent dans un cadre plus rassurant et feutré. Ouverts aux pré-adolescentes qui ont entre 10 et 14 ans, ils ne se déroulent pas dans des sous sols froids, éclairés au néon. Le décor est plus chaleureux et rappelle un peu les soirées pyjamas ou les réunions des sœurs Halliwell (les fans de Charmed s’en souviennent).
Les principales intéressées viennent en compagnie de leur mère ou d’une autre figure féminine de confiance. Cet atelier “secret” est supervisé par une sage-femme et une doula. Ces deux professionnelles ne se contentent pas de survoler la puberté et ne se limitent pas à la partie théorique. Elles l’expliquent dans les moindres détails avec des cas concrets à l’appui. Le but ? Que ces femmes en devenir accueillent ces changements corporels avec plus de sérénité.
Une ambiance “boudoir” pour mettre à l’aise
Contrairement aux groupes de parole classiques, qui se déroulent sur des chaises en plastique inconfortables et dans des pièces austères, les “cercles roses” se tiennent dans des lieux girly, propices aux confidences. Les apprenties “femmes” s’assoient en cercle sur des coussins moelleux et commencent par se présenter. Autour d’elles, des ballons roses et des vulves encadrées et au centre de l’attention, des bougies, de l’encens, des mugs fumants, des modèles anatomiques réalistes et des cartes représentant chaque période du cycle.
Loin des réunions Tupperware de l’époque, ces rendez-vous sous le signe de la sororité se veulent avant tout éclairants. Mieux encore, ils sont immersifs. C’est un moment de partage. Les mères racontent leurs expériences à tour de rôle et les filles découvrent tout ce monde sous leur ceinture. À l’opposé des cours de SVT soporifiques, qui ne montrent que la partie visible de l’intimité, ces “cercles roses” permettent aux adolescentes de mieux se projeter.
La puberté n’est plus un concept abstrait qui se résume à quelques éruptions cutanées et une transpiration excessive. Les participantes touchent des substances qui imitent la glaire cervicale, point de repère dans le cycle. Elles colorient des vulves à leur manière et à la fin, elles font un exercice pratique. Munies d’une pipette remplie de faux sang, elles doivent l’appliquer sur une serviette hygiénique pour voir ce qui se passe. Elles apprivoisent ensuite les autres types de protections périodiques pour avoir conscience de toutes les options qui s’offrent à leur corps.
Combattre les tabous avec bienveillance
Les adolescentes qui ont pris part à ces “cercles roses” ont enfin eu des réponses à ces questions souvent jugées “interdites” qu’elles gardaient pour elles. Elles savent désormais à quoi s’attendre et ne sont plus dans l’ignorance. En revenant à la maison, elles vont s’empresser de mettre un kit de premier soin dans leur cartable pour préparer leurs règles. Et si jamais elles ressentent des douleurs intenables pendant cette période rouge, elles ne se diront pas “c’est normal” mais “il faut que je consulte”.
Ces cours “clandestins” sont d’utilité publique et normalisent ce que la société censure encore trop souvent. Ils mettent des images sur ces organes de l’ombre et des mots clairs sur ces ressentis, parfois incompris. Parce que la puberté ne devrait pas être un saut dans l’inconnu. Écouter son corps est primordial et pourtant si peu conseillé entre les murs des écoles.
Ces “cercles roses” invitent les jeunes filles à se célébrer dans ces changements corporels et non pas à se replier dans la honte. À être indulgentes avec leur corps et non pas à le blâmer. Et rien que ça, c’est précieux. Surtout à l’heure où les ados enrichissent leur culture intime à travers les films X.