Reprendre le travail après un cancer : comment retrouver confiance

Après des mois de traitement et de lutte contre la maladie, vous vous apprêtez à renouer avec le monde du travail. Que la nouvelle se soit ébruitée ou que vous ayez fait l’annonce de vous-mêmes, vous redoutez la reprise comme un premier jour de rentrée. Vous appréhendez les regards remplis de pitié, les questions maladroites et le trop-plein d’attention. En ce mois d’Octobre Rose, voici quelques conseils pour reprendre le chemin du travail sereinement.

Reprendre en douceur

Même si la guérison est déclarée, la convalescence physique, mentale, émotionnelle continue. Un mi-temps thérapeutique ou une reprise progressive est souvent une solution idéale. Cela permet de retrouver ses marques, sans se sentir dépassée. Ne cherchez pas à prouver quoi que ce soit. Vous n’avez rien à rattraper : vous êtes déjà revenue, et c’est énorme.

Pour que la reprise soit plus douce, vous pouvez aussi prendre la température en interne. L’idée n’est pas de retourner au boulot avant l’heure munie d’un sac de croissants, mais de rester en lien avec la boîte. Des collègues ont peut-être spontanément pris cette initiative et questionné votre état de santé tout au long de la maladie. Et rester en contact est précieux pour que ce grand saut ne soit qu’un petit pas.

Accepter que le corps ait changé

Ce corps que vous avez blâmé et traité en ennemi à l’annonce du cancer a été votre rempart, votre gardien au plus fort de la maladie. Il n’est pas ressorti intact de cette bataille. Le cancer a provoqué des dommages collatéraux. Cicatrices, perte de cheveux, fatigue persistante, douleurs diffuses… certaines séquelles sont plus visibles que d’autres. Pourtant, vous ne voyez que ça et vous appréhendez chaque passage devant le miroir. Il faut du temps et beaucoup de résilience pour se faire à ce nouveau reflet.

Plutôt que de juger votre corps, apprenez à l’écouter. Il n’est pas contre vous : il a simplement besoin d’attention. Profitez de ce temps de convalescence pour créer de nouveaux rituels apaisants. Remplissez un carnet de bord sur vos ressentis, initiez-vous au yoga, au crochet ou à la marche nordique, faites-vous des auto-massages.

Se reconnecter à son rythme intérieur

Avant la maladie, tout allait vite. Trop vite, parfois. Après, on redécouvre le temps long, la lenteur, le besoin de pauses. Et c’est très bien ainsi. Reprendre le travail, c’est aussi apprendre à poser ses limites : accepter qu’on fatigue plus vite, refuser la surcharge, oser dire non. Votre productivité ne définit pas votre valeur. Votre énergie, si.

Et pour ne pas céder à la pression dès votre retour et tomber dans le piège de la performance, optez pour un mi-temps thérapeutique. C’est plus judicieux pour vous ménager. Après le cancer, votre vision du travail change : vous ne débordez plus sur vos horaires et vous prenez moins les tâches à cœur.  Votre santé devient la priorité absolue et ça ne veut pas dire que vous « glandez ».

Se faire accompagner par la médecine du travail

Beaucoup disent que la médecine du travail « ne sert à rien ». Pourtant, c’est à ce moment précis de votre vie qu’elle montre toute son utilité. Vous êtes en droit de demander une visite de pré-reprise. Le but de cet entretien ? Organiser votre reprise au mieux et obtenir des aménagements pour mettre l’accent sur votre confort. Vous pouvez ainsi demander à revoir la disposition de votre poste de travail et exiger une souris ergonomique dans le cas d’une mastectomie qui immobilise légèrement votre bras. Vous pouvez également négocier votre temps de pause entre chaque tâche pour bouger.

Trouver un cadre rassurant

Si possible, préparez votre retour en amont avec votre employeur et les ressources humaines histoire d’être à l’aise le jour J et ne pas vous retrouver dans une situation inconfortable. Cela permet d’adapter votre poste, vos horaires ou vos missions. Certaines entreprises proposent des accompagnements spécifiques : coaching de reprise, suivi psychologique, aménagements temporaires. Accepter de l’aide ne vous rend pas vulnérable. Au contraire, c’est une preuve de maturité et de respect envers votre corps.

Apprivoiser le regard des autres

L’un des plus grands défis du retour, c’est le regard du collectif. Entre curiosité maladroite, compassion excessive ou silences gênés, tout le monde ne sait pas toujours comment se comporter. Vous avez le droit de choisir ce que vous souhaitez partager : votre histoire, vos traitements, vos émotions… ou rien du tout. Parler si vous en ressentez le besoin, mais aussi garder pour vous ce qui relève de votre intimité. Le cancer ne vous définit pas : c’est une partie de votre vie, pas son centre.

Se féliciter, ne pas se comparer

Le retour à la vie active n’est pas une ligne d’arrivée : c’est une renaissance progressive. Vous aurez des jours d’énergie et des jours sans. Des moments de doute et des moments d’élan. Tout cela fait partie du processus. Ne vous comparez pas à vos collègues ni à « la vous d’avant ». Félicitez-vous d’être là, d’avoir traversé, d’avancer encore. La confiance se reconstruit, un jour à la fois, au rythme du cœur et du corps.

Reprendre le travail après un cancer, ce n’est pas revenir à la normale : c’est redéfinir sa normalité. C’est accepter de ne plus être tout à fait la même et d’y voir une forme de force. Et rappelez-vous : les efforts ne doivent pas venir que de vous. Votre entreprise est censée faire preuve d’humanité et vous tendre sa main, pas vous claquer la porte. Or c’est ce qui arrive à 20 % de femmes deux ans après leur diagnostic.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.

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