Utilisés des milliards de fois chaque jour dans le monde, les emojis sont devenus une véritable langue visuelle. Pourtant, leur interprétation varie grandement selon l’âge des personnes qui les utilisent.
Une langue universelle ? Pas vraiment.
Les emojis sont apparus à la fin des années 1990 au Japon. Aujourd’hui, ils sont partout : dans les SMS, sur les réseaux sociaux, dans les emails professionnels, voire dans les campagnes de communication. Pourtant, malgré leur omniprésence, ils ne signifient pas la même chose pour tout le monde.
Les générations Z (nées à partir de 1997) ont développé des usages propres, souvent à rebours de ceux des générations précédentes. Un emoji que les Millennials (1981–1996) utilisent sans arrière-pensée peut être perçu comme ironique, passif-agressif, ou complètement ringard par les plus jeunes.
Le 👍 devenu symbole de froideur
C’est peut-être l’exemple le plus frappant : le pouce levé. Pour beaucoup d’adultes, cet emoji est un simple « ok » poli, voire encourageant. Pour la Gen Z, le 👍 est perçu comme sec, distant, voire condescendant. Sur TikTok ou Snapchat, il est souvent associé à une attitude passive-agressive, notamment dans les conversations entre jeunes.
Résultat : un manager de 40 ans qui conclut un message par « Parfait, merci 👍 » peut sembler cassant à une stagiaire de 20 ans. Une incompréhension générationnelle qui peut nuire à la communication.
😭 pour rire… pas pour pleurer
Autre exemple emblématique : l’emoji qui pleure à chaudes larmes. Alors qu’il semble indiquer tristesse ou douleur, 😭 est désormais massivement utilisé par la Gen Z pour exprimer un fou rire incontrôlable. Il a remplacé le 😂 (visage qui pleure de rire), jugé ringard ou trop « Millennial ». Ainsi, une phrase comme « c’est trop nul 😭 » peut tout à fait signifier « c’est hilarant » dans la bouche d’un ado.
💀 : l’humour noir version emoji
Dans la même veine, 💀 (le crâne) est utilisé par les plus jeunes pour dire qu’ils sont « morts de rire ». Cela peut prêter à confusion pour les personnes qui n’ont pas l’habitude de cette ironie graphique. Là encore, c’est un signe de décalage générationnel dans l’humour numérique.
Un fossé culturel et numérique
Ces différences d’interprétation illustrent un phénomène plus large : chaque génération s’approprie les outils numériques à sa manière. Ce qui est « cool » pour une tranche d’âge peut vite devenir « cringe » (gênant) pour une autre. Les emojis deviennent alors des marqueurs sociaux autant que des outils de communication. Savoir lesquels utiliser – ou éviter – selon son interlocuteur est presque devenu un art. Certaines entreprises sensibilisent même leurs équipes à ces codes pour éviter les malentendus, notamment entre managers et collaborateurs plus jeunes.
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Des codes en perpétuelle évolution
Comme toute forme de langage, l’usage des emojis évolue. Ce qui est tendance aujourd’hui ne le sera plus demain. Et ce qui est moqué par la Gen Z pourrait bien être réhabilité dans quelques années par une autre génération encore plus jeune. Par exemple, l’emoji 😎 (sourire avec lunettes de soleil), jugé ringard il y a peu, refait timidement surface dans certaines niches d’Internet, récupéré ironiquement ou détourné.
Si vous communiquez avec quelqu’un d’une autre génération, un peu de prudence (et d’humour) peut éviter bien des malentendus. En fin de compte, ces petits symboles sont surtout le reflet de nos époques, de nos cultures numériques et de nos façons d’exprimer nos émotions. Plutôt que de les rejeter ou de s’en moquer, il est peut-être temps d’en faire un objet de dialogue intergénérationnel.