Obligée de cacher ses tatouages à la salle de sport au Japon, elle montre une autre réalité

Au Japon, pays qui fait le culte de la peau lisse et nette, les tatouages ne sont pas bien accueillis sur les corps. Dans les salles de sport locales, ils sont même interdits. Pour ne pas enfreindre cette règle esthétique, une expatriée à la chaire encrée a d’ailleurs couvert tous ces dessins avant d’y mettre un pied.

« Tatouage interdit » : le curieux logo d’une salle de sport

Dans les salles de sport occidentales, les tatouages s’exhibent souvent sur les biceps et transparaissent sous les brassières et les shorts. Ces dessins imprimés sur la peau prennent vie au gré du développé-couché et des squats sautés. Ils se fondent dans le décor et habillent joliment les muscles. Ponctués de sueur et laissés à l’air libre, ils attirent plus au compliment qu’à la critique. À l’inverse, au Japon, ils se font plus discrets. Ils restent à l’abri des regards, enfermés sous des vêtements opaques ou dissimulés derrière des patchs couleur chair.

Entre ces murs, toutes les peaux sont comme des feuilles blanches, du moins en apparence. Grace, une coach en nutrition habituée à pousser de la fonte et basée à Tokyo, a dû ruser pour pratiquer son activité. La salle de sport n’est pas seulement un refuge ou un défouloir, c’est son cadre professionnel. Sauf que voilà, elle a des tatouages à chaque coin de peau. Un bol de ramen en noir et blanc inscrit sur le bras suivi d’une coupe de glace aux couleurs rafraîchissantes. Un cœur dentelé croqué dans la cuisse. Son corps est une véritable toile vivante.

Problème ? Sa salle de sport affiche un tatouage barré dès l’entrée. À côté de l’interdiction de manger et de vapoter trône l’interdiction de montrer ses tatouages. Incompréhensif pour cette expatriée alors obligée de gommer, temporairement, ses dessins avec des patchs prêts à l’emploi. Ce pictogramme, jamais vu en Europe, s’impose aussi à l’avant des saunas, des onsens (les bains publics), mais également des plages.

 

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Les tatouages ont fait couler beaucoup d’encre au Japon

Au pays du Levant, les diktats font rage. Peau immaculée semblable à celle des poupées de porcelaine sans aucune ombre à l’horizon. Au Japon, les femmes comme les hommes doivent afficher un teint impeccable, digne d’un filtre Snapchat. De ce fait, les tatouages ne s’apparentent pas à de l’art, mais à des bavures visuelles. Pourtant, ce n’est pas pour cette raison qu’ils doivent déserter les corps.

Au Japon, une loi anti-tatouage a même gardé les corps vierges jusqu’en 1948. Si les tatouages sont aussi mal perçus dans ce pays, c’est parce qu’ils sont devenus la signature physique du gang des Yakuzas. Comme un cri de ralliement silencieux, mais lisible, un signe d’appartenance. Même si ces bandits nippons arborent surtout des dragons XXL sur le dos et des démons par grosse plaque, les personnes qui affichent des tatouages sont souvent cataloguées du côté des « méchants » ou des « voyous ».

Des t-shirts ou des patchs pour les cacher dans les lieux publics

Le Japon ne tire pas un trait radical sur les tatouages. Cependant, dans les lieux où le corps se déleste de son tissu, le pays appelle à la pudeur. À la piscine ou à la plage, certaines personnes se baignent avec un t-shirt sur les épaules pour dissimuler ces ornements. Que vous ayez une petite fleur à la clavicule ou une date à peine visible sous les côtes, il vaut mieux masquer vos tatouages.

Si pour vous, ce ne sont que des détails, dans la culture japonaise, ils n’ont rien à faire sur la peau de monsieur et madame tout le monde. Les tatouages sont « indécents », voire « provocants ». C’est pourquoi la jeune Grace colle des patchs prévus à cet usage sur ses tatouages, un peu trop imposants au goût de la population. Toutefois, il y a des lieux où les tatouages sont libres d’exister. Comme les places dog-friendly, il y a des endroits tattoo-friendly où vous n’êtes pas obligée de porter des manches longues sous 35°C, ni des patchs qui créent l’illusion parfaite. Des cartes recensent carrément les lieux qui y sont favorables.

Les tatouages, aussi spectaculaires et réussis soient-ils, ne sont pas tolérés partout à travers le globe. Si le Japon cherche à les estomper du paysage, ce n’est pas pour des raisons esthétiques, mais symboliques.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.

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