AprĆØs l’explosion du mouvement #MeToo et de sites relayant les tĆ©moignages de victimes de violences sexuelles et sexistes comme #PayeTaShnek, deux Ć©tudiantes en mĆ©decine ont dĆ©cidĆ© de crĆ©er Paye ta blouse, un site dĆ©nonƧant les remarques sexistes reƧues par les femmes dans le milieu hospitalier. Un festival de « petites phrasesĀ Ā» bien plus terrifiant qu’amusant.
Le sexisme ordinaire encore bien ancrƩ dans le milieu hospitalier
InspirĆ©es par la force et la popularitĆ© de sites comme #PayeTaShnek, deux Ć©tudiantes en mĆ©decine ont dĆ©cidĆ© en dĆ©cembre 2016 de crĆ©er Paye ta blouse, un site collectant les tĆ©moignages d’Ć©tudiants et de professionnels de la mĆ©decine confrontĆ©s au sexisme ordinaire dans le milieu hospitalier.
Il faut dire que les Ć©tudiantes ont elles-mĆŖmes eu Ć subir ce genre de remarques dĆ©sobligeantes. De quoi les motiver Ć dĆ©noncer un sexisme qui semble encore faire partie des meubles chez les professionnels de santĆ©… InterrogĆ©e par LCI, une des crĆ©atrices de Paye ta blouse rĆ©vĆ©lait ainsi une remarque adressĆ©e par l’un de ses supĆ©rieurs au bloc opĆ©ratoireĀ :
Ā« Je dois passer par-derriĆØre (pour opĆ©rer la jambe). Tu aimes Ƨa toi qu’on passe par-derriĆØre ? Ā».
Cette scène totalement surréaliste ne semble malheureusement pas être inhabituelle. En témoignent les nombreux témoignages récoltés par Paye ta blouse.
Ā« Ses lĆØvres feraient un beau collier pour ma bite ! Ā»
« Je peux te bouffer la chatte en entrée ? »
« Si vous oubliez une observ’ vous allez devoir nous montrer vos seinsĀ Ā»
« Et toi, tu te la rases comment, ta chatte ? »
« Touche-le, tu vas voir, il est aussi dur que ma bite »
Des remarques hallucinantes et totalement inappropriĆ©es, cela va sans dire. Et ce n’est pourtant lĆ qu’un Ć©chantillon des centaines de confessions recueillies par Paye ta blouse qui tĆ©moignent alors d’un sĆ©rieux problĆØme de sexisme dans le milieu hospitalier.
MalgrĆ© #MeToo, la peur des reprĆ©sailles est toujours d’actualitĆ©
Ce type de comportement a beau ĆŖtre dĆ©sormais dĆ©noncĆ© et condamnĆ©, il reste encore trĆØs difficile pour celles et ceux qui en sont victimes d’en parler. Car la peur des reprĆ©sailles et notamment des rĆ©percussions sur la carriĆØre professionnelle est encore bien prĆ©sente.
La créatrice de Paye ta blouse elle-même confiait comme il était difficile de dénoncer ce type de comportement :
« Dans le milieu hospitalier, tout est prĆ©texte Ć blagues sexuelles, c’est dingue. Mais en mĆ©decine, on apprend vite Ć garder ce genre de choses pour nous. Pour notre carriĆØre, il vaut mieux ne pas l’ouvrir. Alors on reste seule avec ces problĆØmes.Ā Ā»
Une peur des reprĆ©sailles confortĆ©e par des faits. En tĆ©moigne cette scĆØne relayĆ©e sur Paye ta blouse. Alors qu’elle montre Ć une Ć©tudiante infirmiĆØre comment faire une dĆ©coupe de poche de stomie, cette professionnelle de santĆ© s’entend dire par un mĆ©decin urgentisteĀ : « Tu fais Ƨa bien. Je te dĆ©chirerais bien tous tes trous, lĆ maintenantĀ Ā». Elle n’hĆ©site pas Ć lui rĆ©pondre et Ć©cope alors d’un blĆ¢meĀ !
Une situation invraisemblable qui risque pourtant de perdurer longtempsĀ :
« Dans nos Ć©tudes, c’est pareilĀ : ce sont les mĆŖmes qui nous forment. Alors ces remarques sexistes entrent dans la formation de la nouvelle gĆ©nĆ©ration. Elles deviennent lĆ©gitimes pour les hommes, et renforcent le sexisme intĆ©riorisĆ© des femmes.Ā Ā»
Gageons malgrĆ© tout que Paye ta blouse participera Ć faire changer les mentalitĆ©s, Ć l’hĆ“pital comme ailleurs.