Ils arrivent par l’Eurostar, téléphone à la main et lunettes de soleil déjà vissées sur le nez : des milliers de Britanniques préparent leur débarquement musical à Paris pour la Fête de la musique ce week-end du 21 juin. À mi-chemin entre fascination culturelle et virée festive, cette affluence britannique surprend, amuse et parfois agace.
Quand TikTok devient agence de voyage culturel
La Fête de la musique, cette invention typiquement française née en 1982, a su traverser les frontières… et les écrans. Depuis quelques semaines, TikTok s’est en effet transformé en véritable planning de festival pour nos voisins d’outre-Manche. Sous les hashtags #BritishFeteDeLaMusique ou encore #ParisMusicVibes, on découvre des vidéos d’Anglaises essayant des robes transparentes, des crop tops à paillettes et des bottes de pluie assorties – « au cas où », parce que bon, la Seine, c’est pas le désert californien non plus.
On entend aussi des accents cockney s’exclamer « We’re going to Paaaris, baby! » tandis qu’une autre vidéo nous montre une Londonienne annonçant, très sérieusement, qu’elle a prévu « 14 tenues pour trois jours, minimum ». Le mot d’ordre ? Être prête pour la photo Insta parfaite, avec la Tour Eiffel en arrière-plan et une fanfare en bande-son.
@onohidonii_ I have 15 outfits packed for 3 days and still feel outfitless?? MAKE IT MAKE SENSE. #fetedelamusique #outfitcrisis #girlstruggles #tiktokfashion #closetmeltdown #povgirl #funnyfitcheck #ootdpanic #fashionfail #viraltiktok #onohidoni #thenetherlands🇳🇱 #nigeria ♬ original sound – Rickey Rick
Coachella sauce baguette
Il faut dire que cette fête gratuite et ouverte à toutes et tous, sans barrières, sans badges VIP ni billets hors de prix, a tout pour séduire. Imaginez : danser sur du funk, du jazz ou de l’électro en pleine rue, croiser un groupe de rock qui s’improvise en plein Marais, puis tomber sur un set techno aux Buttes-Chaumont… le tout sans débourser un centime. Forcément, ça change des festivals anglais sous la pluie et à 300 livres le pass.
Toutefois, certains personnes s’interrogent : les Britanniques n’en font-ils pas un peu trop ? « On dirait qu’elles vont à Coachella, mais version métro Ligne 13 », plaisante quelqu’un en commentaire. Il est vrai que l’écart entre les attentes pailletées et la réalité sonore d’un concert improvisé devant une boulangerie de quartier peut dérouter.
@kianatiese For my British bruvs and sistren, be safe, protect your feet and your debit cards (carry cash to avoid scams), hydrate, buddy systems, external battery packs are a must, phone chains, what else did I miss??? #paris #foryoupagе #fetedelamusique #fetedelamusique2025 #visitparis #paristrip #parisrecommendations #parisfood #paris2025 #londontoparis #eurostar #peckhampimps #fyp #foryou #pariscityguide #summerinparis ♬ original sound – Kiana Tiese
L’art de se préparer… avec une touche de french touch
Sur Reddit UK ou dans des groupes Facebook de voyageurs, les discussions s’enflamment : quelles sont les meilleures stations pour se poser ? Quel arrondissement pour une ambiance plus chill et moins foule ? Faut-il emporter des snacks typiquement parisiens, genre camembert et baguette, ou jouer la sécurité avec des chips sel et vinaigre ?
Et voilà que les tutoriels affluent : « Comment ne pas ressembler à un touriste tout en profitant de la fête », « 5 phrases en français à connaître pour demander la direction du concert électro », ou encore « Le guide ultime de la Fête de la musique pour les British ». On frôle parfois le guide Michelin de la street music.
Les Parisiens : entre rires et soupirs
Côté français, les réactions sont à l’image du pays : contrastées, mais jamais indifférentes. Certaines personnes râlent gentiment, tandis que d’autres y voient un hommage inattendu à une tradition nationale. Et pourquoi pas ? Après tout, ce joyeux mélange culturel reflète parfaitement l’esprit de la Fête : libre, ouvert, sans codes imposés.
Un Parisien écrit sur X (anciennement Twitter) : « Ils débarquent comme des Beatles, mais pour écouter des gars en djembé à République. C’est beau ». Et il n’a pas tort : le succès de la Fête de la musique repose précisément sur cette capacité à fédérer, à émouvoir, à surprendre. Une chanson entendue par hasard sur une place suffit parfois à créer un souvenir inoubliable.
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Une vibe contagieuse au-delà de la Manche
Et il n’y a pas que les Britanniques dans le game. Depuis l’Allemagne, les Pays-Bas ou même l’Espagne, l’événement attire chaque année un public européen grandissant. Les hashtags allemands comme #MusikfestParis commencent à fleurir, et certains espèrent même des collaborations transfrontalières spontanées : une chorale berlinoise rencontrant un DJ français dans le métro, un duo guitare-accordéon improvisé sur le pont des Arts… Vous voyez le tableau.
@lildrazzy_ Wir sehen uns bei Fete de la musique🤣🤣🤣 #lildrazzy #viral #fetedelamusique #uk #germans #french ♬ son original – Good_Music ⚡️
Alors, oui, peut-être que certains visiteurs arrivent avec une idée un peu romancée de ce qu’est la Fête de la musique à Paris. Mais est-ce si grave ? En troquant leurs billets pour Glastonbury contre une carte Navigo, ces festivaliers internationaux viennent surtout chercher une expérience humaine, une liberté musicale, et ce petit supplément d’âme à la française : une ambiance sans chichi, une chanson fredonnée à plusieurs, un pas de danse partagé sans jugements. Et au fond, c’est peut-être ça, le plus beau.