« J’ai un nom » : l’ouvrage puissant de Chanel Miller survivante de viol

Ce best-seller paru en 2019 aux États-Unis sort tout juste en France. Chanel Miller y raconte le viol qu’elle a subi, et le procès de son agresseur. « J’ai un nom » raconte à la fois de manière documentée la façon dont une agression sexuelle peut avoir de l’emprise sur le mental, et donne du courage aux survivantes. Il y a une porte de sortie à culpabilité et aux sensations de désespoir des victimes. Son auteure, Chanel Miller, est aujourd’hui un symbole états-unien des violences sexuelles et une activiste reconnue.

Tout démarre avec une lettre à son agresseur

En 2015, lors d’une fête sur le campus de Stanford, université prestigieuse aux États-Unis, un universitaire à la carrière sportive prometteuse viole une jeune femme. Elle est retrouvée inconsciente, derrière une benne à ordures. Deux témoins avaient surpris la scène et immobilisé l’agresseur. Au terme du procès, Chanel Miller écrit une longue lettre à son agresseur publiée sur le média en ligne BuzzFeed. La puissance de ses écrits aura été lue plus de 18 millions de fois en l’espace de quelques mois.

« Ton crime n’est pas d’avoir siroté du whisky. Ton crime, c’est d’avoir enlevé ma culotte comme un papier de bonbon pour insérer ton doigt dans mon corps. Pourquoi faut-il encore te l’expliquer ? », demande Chanel Miller dans sa lettre

« Si tu espères qu’un de mes organes va imploser de colère et que je vais en mourir, tu y es presque », ajoute-t-elle dans la lettre. Cette survivante s’était longtemps cachée sous le nom d’Emily Doe. Aujourd’hui, elle prend la parole sous son vrai nom, Chanel Miller, et raconte son histoire dans un ouvrage autobiographie intitulé « J’ai un nom ». Publié en 2019 dans son pays, il est très vite devenu un best-seller. Et Chanel Miller est maintenant un symbole états-unien des violences sexuelles.

Un procès humiliant pour la survivante

Le procès de Brock Turner, jeune homme de 19 ans à l’époque et vu comme un athlète promis aux jeux Olympiques, fait beaucoup de bruit aux États-Unis. La jeune femme qui ne porte alors pas son nom réel va être dénigrée et humiliée par la défense de son agresseur. Comme pour une bonne partie des affaires liées aux violences sexuelles, il va y avoir une inversion de la culpabilité. La victime aurait trop bu, et voudrait ruiner l’avenir brillant d’un jeune homme.

L’agresseur finira tout de même par être reconnu coupable. Il n’écopera que six mois de prison. Et ce malgré les trois chefs d’accusation qui pesaient sur lui, en lui faisant encourir, en théorie, quatorze ans. La peine réelle de Brock Turner sera divisée par deux, pour sa bonne conduite. Il sera libéré au bout de trois mois de prison.

« Dans un monde parfait, la lecture de « J’ai un nom » serait obligatoire pour tout policier, inspecteur, procureur et juge qui s’occupe de victimes d’agression sexuelle », explique le LA Times

Un traitement médiatique pré #MeToo ?

Lors du procès, la presse et la justice avaient érigé en martyr Brock Turner. On accusait la jeune étudiante anonyme de 22 ans d’avoir gâché la carrière de l’agresseur. C’était deux ans avant #MeToo. Chanel Miller explique d’ailleurs à Télérama qu’avant ce mouvement de libération de la parole des victimes, elle n’avait jamais pensé sortir de l’anonymat.

Plus glaçant encore est comment l’on décrivait son agresseur. La jeune femme entendait que le violeur avait un visage « angélique », et à qui l’on associait toujours une certaine bonté à sa blondeur et à ses yeux bleus.

« C’était un sportif, il n’avait pas l’air d’un mauvais garçon et moi je crois qu’en tant que femme d’origine asiatique je paraissais comme une proie facile, quelqu’un qu’on pouvait repousser, car je n’aurai pas l’audace pour qu’on me rende justice », explique Chanel Miller

Aujourd’hui dans les médias français, et à l’international, Chanel Miller martèle que rien ne pourrait justifier le sort qu’on lui a réservé. Un message qu’elle tient à faire passer à toutes les femmes et les filles qui ont subi ou subiront des violences sexuelles. Son ouvrage lui a permis de se réapproprier son histoire.

Voir ce livre

Publié en français aux éditions Le Cherche Midi « J’ai un nom » devrait parler à plus d’un esprits outre-Atlantique. Et vous, avez-vous déjà pu lire ce livre ? Si oui, qu’en avez-vous pensé ? Venez partager vos impressions avec nos lecteurs et lectrices, sur le forum de The Body Optimist !

Cindy Viallon
Cindy Viallon
Journaliste free-lance, mes sujets de prédilection sont les féminismes intersectionnels, la société et la culture. J’aime déconstruire l’actualité et briser les tabous une fois pour tous·tes !
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