Alors que la société efface volontiers les femmes rondes du paysage, cette danseuse russe plus size implante ses courbes dans l’espace public. Celle qui se fait surnommer « big mom », nom de scène on ne peut plus évocateur, anime sa silhouette à même le bitume et remet les rondeurs au centre de l’attention. Le regard des autres, Ira ne le craint pas, elle le cherche et le réclame au gré de ses chorégraphies un tantinet militantes.
Une danseuse ronde qui prend sa place
En général, dans le décor urbain, les femmes rondes tentent de se faire petites. Elles rasent les murs, portent des hauts noirs qui effacent les reliefs de leur corps et avancent la tête baissée, le menton tiré vers le sol. Vêtement, posture, attitude… elles font tout pour passer inaperçues sur le pavé. Ira, elle, se déhanche avec ses formes en étendard et ne s’excuse pas d’exister. La rue lui appartient autant qu’aux autres morphologies. C’est d’ailleurs son terrain d’expression favori, son lieu de spectacle.
Sur un passage piéton, au milieu d’une allée bondée, au cœur d’un supermarché ou devant un arrêt de tram, Ira improvise des pas de danse là où les femmes de son gabarit se font souvent discrètes. Elle a le rythme dans la peau et n’hésite pas à faire ressurgir la Beyoncé qui sommeille en elle. Plus connue sous le nom de « big mom », cette danseuse montre le talent qui réside dans ses courbes à une horde d’inconnus.
Alors que de nombreuses femmes fuient le regard des autres, cette performeuse de rue l’accroche à chaque mouvement. Loin de s’enfermer dans des vêtements amples et sportswear, elle exerce son art en robes moulantes, en cropped top et même parfois en lingerie. Finalement, elle ne se contente pas de danser, elle défend une silhouette régulièrement invisibilisée.
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Danser au nom des courbes
Dans l’imaginaire collectif, les danseuses ont des abdos visibles, des jambes affûtées et un physique tonique. Des street dancers comme celles-ci, vous en avez vu passer des tas dans votre fil d’actualité Instagram. Ira, alias « big mom », prouve qu’il n’y a pas de profil type ou de morphologie « mieux qu’une autre » pour rouler des hanches et onduler son corps au son de la musique. Cette danseuse plus size a une véritable aura. Ira est de celles qui intimident sans dire un mot et qui imposent leur présence en silence.
En soliste ou avec un partenaire, elle est comme habitée par la musique. Sur du reggaeton ou du rap local, elle laisse parler son corps et enchaîne les gestes techniques. Elle bouge comme si elle était seule au monde. En tenues légères, elle fait une ode à ce corps plantureux, qui n’est autre que son instrument de travail. Un spectacle rare. Émancipée de cette tenace honte, Ira fait régner ses courbes là où la société les bannit.
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Des chorégraphies riches de sens
Loin de faire le show dans des ruelles étroites ou une rue sans issue, elle se place à des endroits stratégiques, où le monde afflue. Elle veut être vue. Cette danseuse de rue, qui donne d’ailleurs des cours et qui a un niveau professionnel, met en lumière une morphologie inlassablement placée dans l’ombre. Elle contredit tous ces préjugés qui disent que les filles grosses ne sont pas souples et qu’elles restent greffées au canapé.
À travers ses chorégraphies, tantôt improvisées, tantôt millimétrées, ses courbes se racontent en poésie et se lâchent. L’espace public n’est plus un lieu hostile où l’on se fond dans la masse, mais une zone d’affirmation. Ira révèle tout le potentiel qui réside dans un corps, cellulite ou pas, ventre épais ou abdo saillant. Alors que de nombreuses femmes rondes avancent avec prudence et retenue dans la rue, Ira, elle, la domine.
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La dénommée « big mom » est la meilleure ambassadrice de l’acceptation de soi. Avec ses chorégraphies, cette danseuse plus size rend justice aux corps pulpeux, longtemps condamnés à l’oubli. Les passants ne la regardent pas comme une créature étrange mais avec une pointe d’admiration. Attention : sa bonne humeur est contagieuse.