Harcèlement au travail : comment le reconnaître et que faire ?

La France est le pays de l’Union européenne le plus touché par le harcèlement au travail. En effet, une récente étude Ipsos révèle que plus d’un tiers des Français.es ont déjà subi un harcèlement sur leur lieu de travail. Il apparaît donc plus que nécessaire d’apprendre à en reconnaître les signes puis à appréhender cette problématique.

Qu’est-ce que le harcèlement au travail ?

Bien que relativement répandu, le harcèlement moral est pourtant puni par la loi. En effet, il a été introduit dans le Code du travail le 17 janvier 2002. Une définition claire y est édifiée : « Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. ».

En 2009, la notion s’est élargie, incluant les méthodes de gestion dès lors qu’elles visent un.e salarié.e. À l’instar du harcèlement sexuel, le harcèlement moral peut être sanctionné d’une amende de 15 000 euros et d’une peine d’un an d’emprisonnement. Hélas, les procédures sont complexes, rarement menées à bout, car les preuves sont difficiles à apporter.

Même si les cas de harcèlement moral au travail sont fréquents, il n’est pas rare qu’ils soient confondus avec un simple conflit. Or, le harcèlement moral est plus profond, plus prégnant qu’un désaccord, il s’inscrit dans le temps.

Qui sont les harceleur.se.s ?

Dans le harcèlement au travail, il y a une dynamique cible/prédateur.rice. On note un vrai rapport dominant.e/dominé.e. La pensée commune veut que le harcèlement moral soit nécessairement inhérent à une relation hiérarchique et asymétrique entre un.e supérieur.e et un.e subordonné.e.

C’est, en effet, plus facile de nuire à quelqu’un lorsqu’on est en position de pouvoir. Mais ce n’est pas toujours le cas. Il arrive que la victime soit dans une position hiérarchique plus élevée.

Quelles sont leurs méthodes de harcèlement au travail ?

1 – Isoler la victime

Dans ce cas, le.a harceleur.se veut empêcher sa cible d’aller chercher, puis d’obtenir, le soutien dont elle aurait besoin. L’isolement peut s’opérer de différentes manières. D’abord, en mettant le collectif contre la victime. C’est-à-dire que les autres collègues se détachent et s’éloignent elleux-mêmes. La cible est donc moralement esseulée.

Ensuite, le harcèlement au travail peut passer par un isolement concret. Alors, la personne visée peut être « mise au placard ». Elle est physiquement éloignée, via l’attribution d’un nouveau poste de travail par exemple. L’isolement peut aussi s’incarner dans l’ignorance des autres envers la victime de harcèlement au travail.

2 – Déconsidérer la victime auprès du collectif

Dans ce cas de figure, les harceleur.se.s travaillent à discréditer la cible aux yeux des autres. C’est une arme majeure de la stratégie d’isolement. Pour cela, iels ont recours à la calomnie, la rumeur ou aux moqueries ouvertes. Puisque l’objectif est de priver l’autre de son intégrité, les harceleur.se.s peuvent s’en prendre directement au domaine privé.

Ainsi, les croyances religieuses, la vie privée, les valeurs personnelles ou les engagements politiques sont attaqué.e.s. Mais cela n’est pas tout, le harcèlement sexuel est parfois mis en place dans ce cadre.

3 – Discréditer la victime professionnellement

Ainsi, la victime est attaquée personnellement dans un premier temps. Ses compétences au travail ne sont pas en reste de reproches. L’objectif est aussi de lui nuire professionnellement. Alors, elle perd le sens de sa valeur propre et n’est plus en position d’accomplissement et d’épanouissement au travail.

Pour cela, plusieurs techniques sont utilisées. Soit, la victime est privée de toute occupation ou bien elle se voit uniquement confier des tâches absurdes. La cible se sent donc inutile et est privée de toute stimulation intellectuelle. Soit, on lui impose des tâches bien au-dessus de ses compétences. Elle est donc mise en difficulté et plus facilement critiquable.

4 – S’en prendre à l’intégrité physique et personnelle

Le but du/de la harceleur.se est d’asseoir sa domination. Il faut donc que la victime se sente mal à l’aise, acculée, menacée ou en danger. Alors, la contraindre à des actions périlleuses, l’agresser physiquement (ou l’en menacer) sont des recours utilisés.

Les victimes de harcèlement au travail entendent aussi régulièrement des critiques, des injures. Elles sont souvent traitées de folles, instables, incompétentes ou rabaissées par des dires obscènes ou dégradants.

Qui sont les harcelé.e.s ?

Dans le cas du harcèlement au travail, le choix des victimes par les bourreaux est souvent arbitraire. Néanmoins, il n’est pas rare que les cibles soient des employé.e.s très investi.e.s dans leur travail, consciencieux.ses et compétent.e.s. Cela tient du fait que le.a harceleur.se cherche une personne avec qui iel peut se sentir en compétition. Iel veut rabaisser quiconque serait susceptible de lui faire de l’ombre.

Sinon, il arrive que la victime le devienne en raison d’une caractéristique discriminée (couleur de peau, religion, orientation sexuelle, apparence physique, âge, etc.). De nombreux symptômes peuvent découler d’un cas de harcèlement au travail.

1 – Symptômes physiques

  • Un tel acharnement posé sur quelqu’un est éreintant. Cet épuisement systémique chez les harcelé.e.s les empêche de se concentrer au travail et d’être actif.ve.s dans leur temps libre. Il peut aussi mener à des troubles du sommeil qui participent d’un cercle vicieux.
  • De nombreuses personnes compensent leurs humeurs et leurs émotions dans la nourriture. D’une part, elles peuvent arrêter de s’alimenter, d’autre part, elles peuvent se ruer sur la nourriture. Cela peut entrainer de grandes variations de poids.
  • Le stress est une grande source de problèmes de peau. Donc on peut voir apparaître cela chez les personnes harcelées au travail. De la même manière que des poussées d’eczéma peuvent survenir, il arrive que des mèches de cheveux blanchissent soudainement.

2 – Symptômes psychologiques

  • L’anxiété intense provoquée par le harcèlement au travail est un des premiers symptômes. Il est aussi le déclencheur de nombreux autres comme les troubles de la concentration ou la perte de confiance en soi.
  • La détresse psychologique dans laquelle est plongée la victime peut mener à des modifications comportementales. En étant épuisée et à fleur de peau, la victime peut provoquer des accès de colère, des crises de larmes ou un isolement vis-à-vis de ses proches.
  • À terme, ce harcèlement peut mener à des dépressions; des névroses traumatiques; des bouffées délirantes; des crises d’angoisse; une phobie du travail; des troubles de la mémoire ou de l’attention; des comportements paranoïaques; des conduites addictives ou encore, des tendances suicidaires.

Que faire en cas de harcèlement au travail ?

Si vous êtes la victime

La première étape pour se sortir d’un cas de harcèlement au travail est de le conscientiser. Il arrive que la personne qui vous harcèle n’en soit même pas consciente. Donc, en parler avec elle avant toute chose est bénéfique. Dans cette discussion, vous pouvez expliquer votre mal-être, vous défendre et poser vos limites.

Ensuite, le Dr Dominique Servant (psychiatre, responsable de l’unité Stress et anxiété au CHU de Lille) conseille : « Essayez de sortir de cet isolement en passant des alliances là où elles existent ». Par exemple, s’il s’agit d’un.e collègue, référez-en à votre supérieur.e ; s’il s’agit de votre chef.fe, parlez-en à vos collègues et contactez le service des ressources humaines. Il recommande aussi de ne pas rentrer dans le jeu du/de la harceleur.se.

Factuellement, vous pouvez vous protéger en demandant à cette personne de valider par écrit les missions qu’elle vous confie. Cela pourra servir de preuve. Généralement, les situations de harcèlement au travail se règlent par une médiation entre les concerné.e.s. Vous pouvez faire appel à la direction des ressources humaines, à un.e médecin du travail ou aux délégué.e.s du personnel.

Si vous avez tout tenté et que vous n’obtenez ni soutien ni amélioration, il vous est possible d’envisager une démission. En effet, il faut parfois privilégier son bien-être psychique. Par ailleurs, si vous souffrez d’un harcèlement au travail, n’hésitez pas à faire appel à un.e psychologue. Iel vous aidera à reprendre confiance en vous et a gérer le stress provoqué.

Si vous êtes témoins d’un harcèlement moral

Si vous observez des changements dans le physique ou le comportement d’un.e collègue, si iel est isolé.e et/ou régulièrement réprimandé, il se peut qu’iel soit victime de harcèlement au travail. Alors, il convient de discuter avec cette personne afin d’établir les raisons d’un éventuel mal-être.

Les psychologues recommandent dans ce cas d’engager la discussion avec la victime sans la confronter directement. Autrement dit, il vaut mieux lui parler du travail dans sa généralité. Aborder directement le sujet des changements physiques, comportementaux ou organisationnels peut brusquer voire acculer une victime.

Ainsi, vous permettez à votre collègue de se livrer sur ce qu’iel veut. Iel se sent soutenu.e et écouté.e. Vous pouvez être à l’initiative d’une reprise de confiance en soi voire de l’engagement d’actions pour s’en sortir. Aussi, vous pouvez référer du mauvais comportement d’un.e collègue envers un.e autre et accompagner ce.tte second.e dans ses démarches.

Si vous êtes victime de harcèlement au travail, vous pouvez contacter des associations. Le Réseau France Victimes est disponible tous les jours de 9h à 19h  au numéro gratuit 116 006 (hors métropole +33 1 80 52 33 76). Le réseau comprend 130 associations locales contre le harcèlement au travail. Vous pourrez être accompagné.e de psychologues, juristes et travailleur.se.s sociaux.ales.

Charlotte Vrignaud
Charlotte Vrignaud
En tant que journaliste spécialisée dans les médias et la culture, mon quotidien est une aventure passionnante au cœur de l'évolution culturelle et médiatique de notre époque. Mon rôle consiste à décrypter et à partager les tendances émergentes, les innovations et les récits captivants qui façonnent notre société.
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