Êtes-vous le « petit dernier » de votre fratrie ? Celui ou celle que l’on décrit comme plus drôle, moins sérieux, parfois « gâté » ? Si ces clichés vous parlent, c’est peut-être parce que vous avez déjà entendu parler du syndrome de l’enfant le plus jeune. Sans être une pathologie ou un diagnostic officiel, cette notion regroupe un ensemble de traits souvent attribués aux benjamins et benjamines dans les familles.
Mais que dit réellement la science à ce sujet ? Des études ont été menées par Verywellmind, et elles révèlent une réalité bien plus nuancée que les stéréotypes.
Pas de « personnalité type » scientifiquement prouvée
Selon Julia Rohrer, psychologue spécialiste de la personnalité à l’université de Leipzig, les grandes dimensions de la personnalité (comme l’extraversion, la stabilité émotionnelle ou l’ouverture d’esprit) ne varient pas de manière systématique selon l’ordre de naissance. Les résultats sont clairs : il n’existe pas de preuve solide indiquant que les benjamins sont fondamentalement différents de leurs aînés sur ces dimensions.
Autrement dit, être le plus jeune ne détermine pas qui vous êtes. Toutefois, certaines tendances générales peuvent être observées.
Des tendances… mais pas des règles
Des études suggèrent que les plus jeunes seraient plus enclins à prendre des risques, auraient un esprit entrepreneurial plus développé, feraient preuve de résilience, et seraient plus prosociaux. Le fait d’être parfois perçus comme « gâtés » figure aussi dans les caractéristiques souvent évoquées, bien que rien ne prouve que cela soit universel ou automatique.
Une étude conjointe des universités de Birmingham et de Reading, portant sur plus de 17 000 enfants suivis jusqu’à l’âge adulte, a révélé que les benjamins issus de familles non indépendantes étaient près de 50 % plus susceptibles de se lancer dans l’entrepreneuriat que leurs aînés.
Autre constat intéressant : les plus jeunes présentaient des taux plus faibles de troubles mentaux, notamment en matière de régulation émotionnelle, de comportement ou d’attention.
Et l’intelligence dans tout ça ?
Une idée reçue fréquente veut que l’aîné soit toujours « le plus intelligent ». Julia Rohrer nuance : il existe en effet un effet moyen très léger dans certaines études du Nord global, où les premiers-nés obtiennent en moyenne quelques points de QI en plus. Mais cela ne signifie en aucun cas que tous les aînés sont plus intelligents que leurs cadets. Ce sont des tendances statistiques, pas des lois.
Dans une famille donnée, le benjamin peut très bien être celui qui réussit le mieux à l’école ou dans la vie professionnelle.
Une personnalité façonnée par l’environnement familial
Louis J. Kraus, psychiatre de l’enfant et de l’adolescent à la Rush University, rappelle que l’éducation et la génétique jouent un rôle important dans le développement psychologique. L’ordre de naissance peut influencer certains comportements, mais il ne s’agit que d’un facteur parmi d’autres.
Par exemple, les plus jeunes peuvent être perçus comme plus « animés », plus proches de leurs parents, ou plus « infantilisés », notamment dans des familles avec plusieurs enfants. Mais ces tendances sont liées au contexte familial propre, et non à une règle universelle.
Une question d’attention… et de dynamique familiale
Dans les familles nombreuses, les plus jeunes peuvent recevoir moins d’attention au début, car celle-ci est partagée avec les aînés. Mais plus tard, lorsque les grands quittent le nid, ils peuvent bénéficier d’un accès exclusif aux parents, ce qui peut renforcer certains liens.
Rohrer souligne que les effets de l’âge sur la personnalité s’atténuent avec le temps, mais que certains rôles peuvent persister dans le cercle familial. Ainsi, une grande sœur considérée comme « la responsable » continuera peut-être à endosser ce rôle à Noël, même si elle agit autrement dans son quotidien professionnel.
Comment composer avec sa place dans la fratrie
Pour les parents, il est utile de rester attentif à la façon dont chaque enfant est traité :
- Ne pas surcharger l’aîné de responsabilités
- Ne pas négliger l’enfant du milieu
- Ne pas infantiliser le benjamin
Le plus important reste de valoriser chaque enfant pour ce qu’il est, indépendamment de son rang dans la fratrie.
Pour les benjamins adultes qui s’interrogent sur leur place, l’approche recommandée est l’acceptation : comprendre son parcours familial sans le laisser définir entièrement son identité. Il est toujours possible d’en parler avec un professionnel de santé mentale si des tensions ou des incompréhensions persistent.
Et si être le dernier était une force ?
Finalement, ce que la recherche nous dit, c’est que chaque individu reste unique. Il n’y a pas de « destin psychologique » attaché à l’ordre de naissance. Les benjamins peuvent tirer de leur position des qualités précieuses : flexibilité, sociabilité, créativité, capacité à s’adapter.
De nombreuses figures publiques sont les petits derniers de leur fratrie de Zooey Deschanel à Harry Styles, en passant par Hilary Duff ou Jake Gyllenhaal, preuve que cette place peut aussi être celle de la liberté et de l’audace.