4 façons discrètes de signaler les violences conjugales

« En une semaine les signalements pour violences intrafamiliales ont bondi de 32 % en France et il y a eu 5 fois plus de signalements qu’habituellement sur la plateforme de signalement en ligne arretonslesviolences.gouv.fr. » Invitée au micro de France info le 16 avril dernier, la Secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, a donné des chiffres aussi dramatiques qu’alarmants.

Prises au piège dans un huis clos ponctué d’inquiétudes et de sanglots, les victimes vivent et craignent le pire. D’ordinaire, leur seul moment de répit survient lorsque leur bourreau quitte le domicile. Cependant depuis l’instauration du confinement en France le 17 mars, elles voient leur stress quotidien se décupler. Le gouvernement et les associations ont mis en place une batterie de mesures pour enrayer ce phénomène grandissant. Mais certaines femmes n’osent pas franchir le pas, redoutant les potentielles représailles de leur mari. Alors, désormais il existe des façons plus discrètes de signaler ces agissements.

1 – Un nom de code en pharmacie

Et si les pharmacies servaient désormais d’échappatoire aux femmes en détresse ? Aux grandes causes, les grands moyens. La pharmacie est devenue l’un des principaux médiateurs dans cette lutte contre les violences domestiques. Christophe Castaner Ministre de l’Intérieur a déployé un système inédit avec près de 22 000 pharmacies de l’Hexagone.

La démarche est simple : une femme battue se présente dans une de ces structures et prononce le mot « Masque 19 ». Un nom de code qui sert de sonnette d’alarme. Au lieu d’aller chercher des médicaments, le pharmacien s’empresse de relayer l’information aux forces de l’ordre. Un remède immédiat puisque la victime sera directement prise en charge par les autorités et mise à l’abri de son conjoint violent.

Selon le Ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, les violences conjugales ont explosé en une semaine, + 32 %. ⁣Il…

Publiée par The Body Optimist sur Dimanche 29 mars 2020

Ce dispositif directement importé d’Espagne commence à faire ses preuves en France. Dernier fait en date, le 28 mars une femme a eu recours à ce système d’alerte à Nancy en expliquant que son mari l’avait menacé avec un couteau et plusieurs fois violenté.

2 – Des points d’accueil dans les centres commerciaux

Pour les victimes de violences, les centres commerciaux apparaissent aussi comme un refuge. Depuis le lundi 30 mars, Marlène Schiappa a annoncé l’aménagement de « points d’accompagnement éphémères » dans les centres commerciaux. Ce concept a germé d’un partenariat avec les associations locales, les services de l’État et Unibail Rodamco Westfield, gestionnaire des centres commerciaux.

Au coeur des supermarchés, l’heure est donc à la solidarité. Les rayons d’ordinaire noir de monde sont désormais teintés de visages anonymes en quête de réconfort. Les femmes qui le souhaitent peuvent ainsi trouver, gratuitement, une oreille attentive pour écouter leurs angoisses.

Pour l’heure ce dispositif s’apparente à une phase de test expérimentée en région parisienne. So Ouest à Levallois-Perret, les 4 Temps à la Défense, Carré Sénart à Lieu-Saint en Seine-et-Marne et le Forum des Halles à Paris sont déjà accessibles. Mais la Secrétaire d’État Marlène Schiappa l’a promis : « Nous sommes en train de travailler à créer un maillage le plus large possible, nous visons une vingtaine de points dans les prochaines semaines ». Cette initiative porte déjà ses fruits puisque plus de 50 femmes s’y sont rendues pour dénoncer les gestes tyranniques de leur mari.

3 – Un SMS d’alerte au 114

Les nouvelles technologies n’ont jamais été aussi utiles qu’en cette période de quarantaine. Quelques secondes pour envoyer un cri de SOS par sms. Depuis le 1er avril, Christophe Castaner a en effet déployé un service dédié avec le 114. Ce numéro habituellement destiné aux sourds et malentendants est désormais accessible aux victimes de violences. Conjointes comme enfants peuvent donner l’alerte en envoyant un texto à ce numéro.

Accessible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, ce numéro est précieux. Au bout du fil, des agents de régulation reçoivent le message et le transmettent au service d’urgence le plus proche : Samu (15), police et gendarmerie (17) ou les sapeurs-pompiers (18).

4 – L’application App-Elles

Une solution ingénieuse et à portée de main qui a vu le jour bien avant le début de la crise. Créée en 2015 par Diariata N’Diaye et développée par l’association Resonantes, cette interface combine un large panel de ressources d’aides pour les femmes victimes de violences. En toute discrétion, l’application App-Elles permet en un seul clic :

  • D’alerter ses contacts et de joindre le 112
  • D’appeler les associations et structures d’aide aux victimes
  • De se renseigner sur les dispositifs d’aide aux victimes existants et rencontrer les professionnel.les

À la fois ludique et simple d’utilisation, App-Elles se compose de trois boutons : alerter, agir et en parler. Dans le cadre de violences conjugales, la fonction « alerter » permet d’envoyer automatiquement un message d’alerte à 3 personnes préalablement définies, un sms d’appel à l’aide, la position GPS, une photo et un appel d’urgence au 112. À la pointe de la technologie, ce système tout-en-un est un allié de taille pour lutter contre le fléau des violences conjugales.

Ces dispositifs mis en place se tiennent comme une lueur d’espoir pour que les femmes battues voient enfin le bout du tunnel de la violence. Le gouvernement a d’ailleurs débloqué 1 million d’euros supplémentaire pour les associations qui œuvrent dans cette lutte.

Dans l’obscurité de ce phénomène de société, il est essentiel de mettre en lumière les élans de solidarité. Parce qu’il est déconseillé de sortir, mais il n’est pas interdit de fuir !

 

Si vous êtes victime ou témoin de violences conjugales, appelez le 3919. Ce numéro d’écoute national est destiné aux femmes victimes de violences, à leur entourage et aux professionnels concernés (appel anonyme et gratuit).

En cas de danger immédiat, appelez la police, la gendarmerie ou les pompiers en composant le 17 ou le 18.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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