Dans un bar du quartier financier de Manhattan, les écrans géants s’illuminent. Non pas pour diffuser un match de baseball, mais pour projeter les premières images d’un nouvel épisode de « L’Été où je suis devenue jolie » (The Summer I Turned Pretty). Les conversations s’arrêtent. La musique baisse. Et une vague d’émotions s’empare du lieu. Ce n’est pas un cas isolé. Partout, cette série phénomène d’Amazon Prime Video rassemble des foules inattendues. À l’origine ciblée pour les ados, la série s’est imposée comme le grand succès intergénérationnel de l’été.
Un succès qui rassemble
Lors de la sortie de sa troisième saison, diffusée depuis mi-juillet 2025, « L’Été où je suis devenue jolie » (The Summer I Turned Pretty) a attiré plus de 25 millions de spectateurs dans sa première semaine. Une progression de 40 % par rapport à la saison précédente, selon Amazon Prime Video.
Ce succès est d’autant plus notable qu’il intervient dans un contexte médiatique saturé : blockbusters en salle, reboots à répétition, contenus viraux sur TikTok… Et pourtant, c’est bien cette série douce-amère, pleine de nostalgie et de mélodrame, qui a conquis les cœurs.
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Une série ado… qui parle aux adultes
À première vue, « L’Été où je suis devenue jolie » (The Summer I Turned Pretty) coche toutes les cases du teen drama classique : un triangle amoureux, un été en bord de mer, des personnages jeunes en quête d’identité. On y suit Belly Conklin (interprétée par Lola Tung), adolescente devenue femme, partagée entre deux frères, Conrad et Jeremiah, dans une station balnéaire fictive baptisée Cousins Beach.
Au fil des saisons, la série a gagné en profondeur. Dans la saison 3, les personnages ont vieilli : Belly approche de ses 21 ans, le deuil est omniprésent (la mort de Susannah, figure maternelle du récit), et les décisions sentimentales prennent une résonance plus adulte. Les thèmes de la perte, de la mémoire et des choix difficiles sont traités avec une sincérité rare dans une fiction pour jeunes.
Un refuge émotionnel dans un monde incertain
Si « L’Été où je suis devenue jolie » (The Summer I Turned Pretty) touche autant, c’est sans doute parce qu’elle offre une forme d’échappatoire douce et réconfortante. Dans un été marqué par l’incertitude économique, les mauvaises nouvelles en continu et une météo extrême, la série agit comme une bulle de douceur.
Chaque épisode est un concentré d’émotions pures, accentuées par une bande-son soigneusement choisie – avec, notamment, plus de 20 morceaux de Taylor Swift disséminés dans la série. Entre les déclarations d’amour à l’ancienne, les retrouvailles au bord de l’eau et les silences lourds de sens, l’univers de Cousins Beach devient un monde parallèle où tout est plus lent, plus tendre, plus vivant.
Un phénomène culturel inattendu
Ce succès est aussi une victoire pour Jenny Han, autrice du roman original et co-créatrice de la série. Déjà connue pour « À tous les garçons que j’ai aimés » (To All the Boys I’ve Loved Before), adapté avec succès par Netflix, elle confirme ici sa capacité à capter les émotions adolescentes avec justesse et respect, sans jamais les tourner en dérision.
« Les choix que font ces jeunes filles sont importants. Peut-être pas aux yeux des adultes, mais à leurs yeux, ils le sont. Et ça mérite d’être raconté avec sérieux », déclarait Jenny Han dans une interview récente. Contrairement à d’autres productions destinées au même public, la série ne se moque jamais de ses personnages. Elle les laisse aimer pleinement, souffrir sincèrement, grandir à leur rythme.
Une série à contre-courant… et pourtant addictive
L’un des choix les plus audacieux de cette saison 3 est sa diffusion hebdomadaire, à l’ancienne. Pas de binge-watching. Chaque mercredi, un seul épisode est mis en ligne, recréant une attente collective qui renforce l’attachement à la série. Les fans, majoritairement des femmes jeunes adultes, se donnent rendez-vous chaque semaine, que ce soit dans des bars, sur Discord ou sur les réseaux sociaux. Des analyses minutieuses, des playlists collaboratives et des théories amoureuses circulent en boucle.
Et si ce phénomène tient autant, c’est aussi parce qu’il évoque les séries cultes du début des années 2000 : « Les Frères Scott » (One Tree Hill), « Newport Beach » (The O.C.), « Dawson » (Dawson’s Creek). Le tournage de « L’Été où je suis devenue jolie » (The Summer I Turned Pretty) à Wilmington (Caroline du Nord) n’est d’ailleurs pas un hasard : c’est la même ville où « Les Frères Scott » (One Tree Hill) a vu le jour il y a plus de 20 ans.
En définitive, dans une époque où tout va vite, où les récits se consomment par dizaines, « L’Été où je suis devenue jolie » (The Summer I Turned Pretty) s’impose comme un retour au sentiment, au temps long, à l’émotion assumée. Oui, le scénario est parfois invraisemblable. Oui, l’intrigue repose sur des amours impossibles et des silences pesants. Et pourtant, c’est précisément cela qui nous touche. Parce que la série prend ses personnages au sérieux. Parce qu’elle nous rappelle nos étés, nos hésitations, nos premières fois. Parce qu’elle nous permet, le temps d’un épisode, de croire encore à la magie des couchers de soleil et aux battements de cœur sincères.