« Je suis grosse, je m’assume mais je refuse le mouvement body positive »

S’il connaît un essor fulgurant grâce, notamment, aux réseaux sociaux en tête duquel Instagram, le mouvement body positive (ou body-posi) ne fait pas forcément l’unanimité. Avec son accord, nous avons décidé de publier le message que nous a envoyé Annabelle. La jeune femme qui a vu naître avec enthousiasme ce mouvement, est aujourd’hui devenue beaucoup plus critique. On lui laisse la parole à l’occasion d’un témoignage qui interpelle à propos d’un sujet presque « tabou » car extrêmement controversé.

Un mouvement body positif à double tranchant

« Je suis une fervente lectrice et vous suis quasi quotidiennement depuis plus de trois ans ; vous m’avez énormément aidée à accepter mon surpoids ou plutôt devrais-je dire mon obésité au vu de mon IMC.

Vous faites très régulièrement référence au mouvement body positive sur votre site ou sur vos réseaux sociaux. J’ai plus ou moins suivi son « explosion » et je dois dire que je le trouve à double tranchant, aussi bien positif que néfaste, je m’explique… »

La difficulté d’être grosse dans une société carrée

« On le sait tou.te.s, il est super difficile d’être rond.e/gros.se dans la société actuelle. Le regard des inconnus, celui de notre famille, les fringues pas à notre taille, la grossophobie médicale, les remarques de nos proches, les sièges trop petits dans les lieux publics… Je crois que la liste est longue comme le bras !

Toute cette « grossophobie cachée » est pour le moins insidieuse. On nous pousse à maigrir à coup de régime miracle, de pilule ou encore de crème amincissante… On ne nous présente que des mannequins ultra minces dans les magazines, sur les podiums ou encore des présentateurs/présentatrices télé avec un physique parfait tout bronzé, prêt.e.s pour l’été avec leur « summer body »…

Avec tout ça, va t-en être à l’aise avec tes bourrelets, ton double menton et j’en passe… C’est mission impossible ! Alors le fait de voir des magazines comme le vôtre, des Unes avec des mannequins grande taille comme Ashley Graham dans Sports Illustrated, des photos pas retouchées chez les marques (comme Asos) et ce désir global de revenir à plus de naturel me fait du bien, vraiment. »

Un mouvement oppressif envers les femmes ?

« En revanche, ce que j’aime beaucoup moins dans ce mouvement c’est, qu’à sa manière, il nous dicte un peu notre vie ! « Vous êtes grosse ? Ce n’est pas grave ! Vous devez sourire à la vie, big is beautiful !« .

Vous devez aussi vous habiller sexy, montrer que vous assumez vos courbes (même quand ce n’est pas le cas), poster sans cesse des photos sur Instagram (surtout si c’est en lingerie), suivre les hashtags body positifs, envoyez valser l’industrie des régimes etc.

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« J'ai changé. Je suis devenue quelqu'un qui n'existe plus dans le but de vous plaire. Je ne suis plus la grosse fille qui fait des blagues. Je ne suis pas la grosse fille qui ressent la honte que les autres souhaitent que je ressente. Je ne me cache plus. Je ne suis pas ici pour l'amour et la lumière ou pour avoir la paix. • (…) Lorsque je n'avais aucun amour de moi-même, je ne pouvais faire que survivre. La nourriture, la nourriture, le sexe, la fugue, la solitude, en faisant semblant de ne pas ressentir le fardeau d'exister dans ce corps. Alors la société m'a pointé du doigt. Si je ne me visais visiblement pas à améliorer mes conditions d'existence, mon existence n'était pas justifiée. • C’est précisément pour cela que la honte, la grossophobie (soins de santé, emploi) fait plus souffrir que ce que les autres pensent qui me tue. Ce n'est pas mon gros corps qui me fait tomber. C'est toi. Le jugement, le questionnement, la dévaluation, le fait de décider que mon corps comptait plus que mon esprit et mon cÅ“ur. Jusqu'à ce que ma santé mentale et émotionnelle soit si touchée que tout mon bien-être a changé. Puis j'ai trouvé mon pouvoir et ma joie. Avec ma sensualité. Je prends de la place. Je porte ce que je veux. Je suis sexuel. Je suis sans honte. Je ne justifie pas mon existence pour vous. Je ne donne pas mon pouvoir ET je prends TOUT mon plaisir. • Comme vous, je change par périodes. Comme toi, je trouve de la joie dans les choses que j'aime. Comme vous, je n'ai pas les réponses. Comme vous, je veux la liberté d'être moi-même. Il y a beaucoup de parties de moi que vous ne connaissez pas, je ne les connais même pas moi-même. » • ? @quartermoonco

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Et si moi je n’ai pas forcément envie de sourire ? Ou forcément envie de me résumer au fait d’être grosse ou de ne pas l’être ? En fait, je crois que j’ai simplement envie qu’on me considère comme une femme. Parfois, j’ai l’impression que ce mouvement body positif creuse encore plus le fossé entre mince et grosse. Parce qu’au final ne nous mentons pas, nous avons TOUTES des complexes, TOUTES des parties du corps que nous n’aimons pas et TOUTES des petits « défauts » chez nous que aimerions gommer.

Alors au final, qu’est-ce que ça nous apporte tout ça ? Oui je suis grosse et je m’assume mais je refuse le mouvement body positif car il va à l’encontre de ce que je ressens vraiment. Je n’ai ni envie qu’on me dise de maigrir ni envie qu’on me dise que je dois m’assumer en tant que grosse !

La question ne se limite plus à un « amour de soi », mais à une exigence de respect pour tous les corps, car le respect ne devrait pas varier en fonction de l’indice de masse corporelle de quelqu’un. Et surtout, je veux pouvoir choisir MOI c’est-à-dire faire MES propres choix sans que cela soit implicitement proposé par la société « pro mince » ou le mouvement body posi « pro gros » »

S’aimer soi-même : une nouvelle norme ? Que pensez-vous du mouvement body positive ?

Amandine Cadilhon
Amandine Cadilhon
Journaliste mode, mes articles, mettent en lumière les diverses tendances et styles qui façonnent l'univers de la mode féminine. Mon objectif est de proposer un contenu diversifié et accessible à toutes et tous, en soulignant l'importance de l'expression personnelle et de l'empowerment à travers la mode.
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