Cette mannequin québécoise veut normaliser la pilosité féminine

Esther Calixte-Bea, alias Queen Esie sur Instagram, nous encourage vaillamment à signer le divorce avec nos bandes de cire, nos rasoirs et nos crèmes dépilatoires. Cette militante pro-poils brandit sa pilosité féminine comme une arme anti-tabous. Et ça décoiffe ! La jeune Québécoise veut en finir avec ces injonctions qui chassent le poil. Torse, jambe, aisselle… Esther Calixte-Bea laisse libre cours à ce duvet, par ailleurs très utile, pour changer les normes. Mesdames, la corvée de l’épilation est définitivement terminée. Ouf ! 

Libérer les poils féminins, le combat de Queen Esie activiste 2.0

Pendant l’hiver, nos poils s’épanouissent en paix sous nos pantalons et nos gros pulls en maille. Cachés bien au chaud, ils ne nous posent presque aucun problème. Mais une fois les beaux jours de retour, le rituel du défrichage corporel reprend du service. Quelle plaie diriez-vous. Malgré une certaine démocratisation de la pilosité féminine, les diktats et les idées reçues font de la résistance.

Affre esthétique pour certain.e.s, marque de négligence pour d’autres, le poil féminin essore une triste réputation. D’après un sondage IFOP de 2021, ​​73 % des femmes interrogées estiment qu’il est important qu’une femme s’épile pour être considérée comme séduisante. Mais Esther Calixte-Bea, enfant de la génération Z, en a décidé autrement.

Fervente défenseuse de la pilosité féminine, la dénommée Queen Esie sur les réseaux, fait partie de ce gang de jeunes engagés qui chahutent les conventions. Au détour de posts Instagram vaillants, la jeune femme âgée de 25 ans expose fièrement les poils qui habillent son décolleté, le pourtour de son nombril ou ses aisselles.

Le poil, incompatible avec la féminité ? Queen Esie tord le cou à ce message stigmatisant régulièrement sous-entendu dans les publicités. Une mise à nu savamment orchestrée qui rejoint une volonté commune et universelle d’abandonner la contrainte du rasoir. Finalement Queen Esie ose cette émancipation du poil, un choix rêvé par de nombreuses femmes, mais toujours retenu par des normes qui se la jouent dur à cuir.

Queen Esie, ou l’art de s’affranchir du regard des autres

Si aujourd’hui, Queen Esie brandit haut ses poils, pendant son adolescence elle était prête à tout pour les exterminer. Ces poils, diabolisés à la chaîne et considérés, à tort, comme un privilège masculin, elle ne les a pas toujours adulés. Bien au contraire. Dès l’âge de 11 ans, elle s’adonne à la traditionnelle et douloureuse séance d’épilation.

Un passage obligé pour la petite Esther de l’époque qui voit en ses poils une certaine laideur, incontestablement distillée par la société. Elle va même jusqu’à se priver de certaines fêtes ou réunions amicales pour ne pas avoir à porter de tenue légère ou de maillot de bain. Une déclaration de haine qui sonnera familière chez de nombreuses femmes. Mais pour Queen Esie, cette auto-censure des poils se stoppe net en 2020.

« Être timide était un fardeau en tant que petite fille et haïr mon corps était donc préjudiciable à ma santé mentale. J’ai fini par être fatiguée de tout cela. Et j’ai progressivement réalisé l’importance de travailler sur la façon dont je voyais mon corps, et la façon de la changer », déclarait-elle au média web Girls Are Awesome

Quelques regards écarquillés par-ci, des messes basses par-là. Cette réconciliation avec les poils a d’abord été compliquée. Mais assumer dans la rue ce que l’imaginaire collectif relègue à la « curiosité naturelle » voire au dégoût a été très salvateur pour Queen Esie. La jeune femme aux racines haïtiennes et ivoiriennes confirme que la pilosité féminine peut aussi s’ériger en « symbole de beauté ».

Combler le manque de représentation du poil féminin

Les poils, prodiges du corps humain, ont largement leur place sur le corps des femmes. Ni « sales » et encore moins « inutiles », si les poils sont là, c’est qu’ils ont une fonction importante. Ils régulent la température corporelle et protègent des parasites extérieurs. D’ailleurs, hommes comme femmes possèdent 5 millions de poils. Pourtant chez les femmes, le culte de la peau glabre persiste.

« Il y a un grand manque de représentation. On ne voit pas les femmes poilues dans les magazines, on ne voit pas les femmes poilues à la télévision. C’est vraiment quelque chose qui doit changer ! », s’est-elle révoltée auprès du New York Post

En 2021, son souhait est exaucé. Le magazine Glamour UK, lu par 2,7 millions de personnes chaque mois, la hisse en Une de son édition « self-love ». Un aboutissement ultime qui n’a pas pour autant ralenti son combat pour la juste reconnaissance du poil.

Queen Esie s’engage dans de multiples projets à l’instar du challenge Januhairy, qui invite les femmes à lâcher le rasoir pendant le mois de janvier. Avec son âme d’artiste, Queen Esie ancre cette lutte au gré de créations symboliques.

Ce fut le cas dans sa série de photographies « The Lavender » brillamment portée sur la pilosité féminine. Ses autoportraits à la fois délicats et puissants proposent une nouvelle approche du poil, plus décomplexée. Un acte qui devrait être banal, mais qui peine à glaner des adeptes.

Libérée, délivrée, la pilosité féminine peut briller. Queen Esie honore ces poils que l’on a tant critiqués, martyrisés et boudés. Et de plus en plus de stars lui emboîtent le pas. Emily Ratajkowski, Miley Cyrus, Lourdes Leon, les célébrités disent oui aux poils et lèvent leur majeur au tabou.

Émilie Laurent
Émilie Laurent
Dompteuse de mots, je jongle avec les figures de style et j’apprivoise l’art des punchlines féministes au quotidien. Au détour de mes articles, ma plume un brin romanesque vous réserve des surprises de haut vol. Je me complais à démêler des sujets de fond, à la manière d’une Sherlock des temps modernes. Minorité de genre, égalité des sexes, diversité corporelle… Journaliste funambule, je saute la tête la première vers des thèmes qui enflamment les débats. Boulimique du travail, mon clavier est souvent mis à rude épreuve.
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