« Nous pouvons et surtout nous devons être féministe », Cédric nous explique son engagement

Dans « féminisme », il y a « femme » alors forcément, les hommes ont parfois du mal à trouver leur place, deviennent même agressifs et compensent en s’en prenant… aux femmes. Or derrière la sémantique se cache bel et bien un combat en faveur de tou.te.s. Oui, le féminisme est aussi une affaire d’hommes ! Car rappelons-le, ce mouvement vise à l’égalité à tous les niveaux entre les femmes et les hommes, autrement dit c’est un mouvement qui n’est pas propre à un genre. Rencontre avec Cédric, un de nos lecteurs, qui a ressenti le besoin de nous livrer sa vision de ce qu’est le féminisme du côté des hommes.

The Body Optimist : Tout d’abord, quelle est votre définition du féminisme ?

Cédric : « Pour moi, le féminisme c’est un ensemble d’actes, de décisions, de discours qui tend à relever la considération faite aux femmes au sein de notre société actuelle. Au-delà de ça, je pense aussi que c’est une idéologie créée par les femmes pour les femmes. Celle-ci aurait dû être créée par les hommes, finalement, afin de soutenir la lutte pour les égalités en faveur des femmes, déjà là, ce n’est pas normal de se dire ça… »

Vous considérez-vous comme féministe ?

« Oui, totalement ! Féministe un peu « caché » pour le moment par contre, car en 2020 en étant un homme c’est parfois difficile de prendre la défense des femmes sans être banalisé de « mauviette »… Quand on est féministe, les autres hommes nous prêtent souvent des intentions cachées. Le cliché homme féministe/gay persiste malheureusement…

Pourtant, être féministe n’est pas une honte, ni une étiquette. J’ai 34 ans, j’aime ma compagne de tout mon cœur, et je suis féministe. Être féministe, c’est tout simplement croire en l’égalité hommes-femmes. »

Comme vous le souleviez, être un homme et féministe ne va pas toujours de soi. Qu’est-ce qui vous a amené à vous positionner aux côtés des femmes ?

« En premier lieu, les affaires de violences physiques ou psychologiques, les viols (etc). Il existe un très grand nombre de salopards, mais également d’hommes bienveillants, il faut savoir autant les dénoncer que les différencier.

Ensuite, la minuscule place faite aux femmes dans nos entreprises, notre ministère ; combien de femmes connaissons-nous avec de réels postes à haute responsabilité ? Très peu, alors que dans la plupart des cas elles sont bien mieux qualifiées et compétentes. Ce n’est pas normal du tout ce schéma sociétal ! »

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Des affaires récentes comme l’affaire Weinstein ou des mouvements comme #BalanceTonPorc ou #MeToo, ont libéré la parole. Qu’en pensez-vous ?

« C’est une très bonne chose que cela ait libéré la parole. Malheureusement ce n’est pas suffisant, je pense. Les femmes doivent se sentir en sécurité, n’importe quand, n’importe où, peu importe leurs façons de se vêtir !

Il n’existe pas d’excuses pour justifier un viol/une agression, or certains en trouve encore… Il faut faire attention à ne pas mettre tous les hommes dans le même panier, mais certaines mentalités sont vraiment affligeantes, il faut bien le dire. »

Depuis, le mouvement féministe continue de se développer, mais la place des hommes au sein de cette lutte questionne. Selon vous, les hommes peuvent-ils être féministes ? Ou doivent-ils seulement soutenir la lutte féministe ?

« Oui, nous pouvons et surtout nous devons être féministe. Dire « je suis pour l’égalité homme/femme », et mettre des actions concrètes en place pour favoriser cette idéologie est quelque chose de bien différent. À mon sens, nous devons lutter main dans la main, femmes et hommes ! »

« S’engager pour vos filles, femmes, sœurs… », comment être un bon allié justement selon vous ?

« À mon sens, être féministe ne veut pas dire militer toute la journée où ne parler que de ça. Faire circuler la parole des femmes, dire stop à ses amis aux blagues lourdes dans les soirées, faire comprendre à un collègue qu’il a était trop loin dans ses propos envers une collègue… rien que ça, ça peut changer beaucoup de choses déjà, faut-il encore le faire, et ne pas se faire insulter de « canard »… »

Dans ce sens, avez-vous déjà mené une ou plusieurs action(s) – d’envergure ou non – en faveur d’une plus grande égalité entre les sexes ?

« À l’heure actuelle non, mais j’aimerai beaucoup m’engager davantage, pour l’avenir de ma compagne, de ma future fille… »

C’est un fait, beaucoup d’aspects de notre vie quotidienne résultent d’une société construite par et pour les hommes. Selon vous, la masculinité peut-elle exister en égalité avec la féminité ?

« Pour un homme féministe oui, que vient faire la question de la masculinité et de la virilité quand il s’agit d’une bataille pour l’égalité des sexes ? Je ne me sens pas réduit au quotidien parce que je suis féministe, c’est plutôt les mentalités de certains hommes qu’il faut changer. »

Quel regard portez-vous sur les attaques faites aux femmes (violences sexuelles, sexismes ordinaires etc.) ? Et celui sur la représentation globale des femmes dans la société ?

« Cela me répugne !! Au nom de quoi, peut-on se permettre de violenter une femme/fille ? C’est inconcevable, intolérable !

Et pour ce qui est de la représentation des femmes au sein de notre société, elle est à mon goût inexistante… À titre d’exemple, comparez le volet médiatique accordé pour le sport masculin, par rapport au sport féminin, rien qu’à ce niveau là déjà « ça bloque »… »

Selon vous, quelle mesure permettrait de favoriser concrètement l’égalité entre les femmes et les hommes ?

« L’éducation. Tout est, à mon goût, une histoire d’éducation et d’ouverture d’esprit, bien sûr. Les temps changent, on peut dire qu’il y a une sorte d’éveil, mais les mentalités doivent aussi suivrent pour un monde plus égalitaire et plus juste ! »

Dans son dernier rapport « Les jeunes à l’ère du Covid-19 », le collectif HOPE not hate révèle que pour 50 % des jeunes hommes britanniques interrogés « le féminisme va trop loin ». D’autre part, un cinquième d’entre eux avouent avoir une mauvaise image des féministes. Que conseiller, selon vous, aux hommes qui souhaitent favoriser les droits des femmes ?

« Ces chiffres sont consternants… Je dirais qu’il ne faut pas tenir compte du jugement des autres hommes envers ceux féministes, même si cela est dur.

Moi-même, je cache – bien souvent – que je suis féministe en présence de certains hommes, car malheureusement ils ne sont pas ouverts d’esprit. Dans ce cas-ci, je me dis que c’est à moi de les faire évoluer, de partager mon savoir afin que leurs mentalités changent. »

Que pensez-vous de la montée du #NotAllMen, un hashtag/mouvement qui disqualifie ouvertement les mouvements féministes ?

« Beaucoup de bruit pour pas grand-chose. Pas besoin de critiquer et se justifier quand on est un homme bienveillant, je pense. »

Y a-t-il une femme qui vous a particulièrement marqué dans votre vie ? Et/ou une héroïne de fiction que vous adoriez quand vous étiez enfant ?

« Simone Veil, selon moi, car sa vie entière fut un combat pour l’égalité des femmes. Et concernant les héroïnes de fiction, c’est un peu cliché, mais je dirais Xena. Une guerrière, qui avait un coup de cœur pour son acolyte Gabrielle. Un joli duo ! »

La société a tendance à mettre une date de péremption aux femmes, voire à les invisibiliser dès qu’elles dépassent 40 ans. Qu’en pensez-vous ?

« C’est honteux, une femme à autant de valeur à 20/40 ou 80 ans ! Toutes les personnes et tous les corps sont légitimes. »

Pour aller plus loin, selon vous comment donner une éducation féministe à son garçon ?

« En leur inculquant des valeurs dignes du respect des droits des femmes et de l’égalité des sexes. Sans le vouloir, nous avons des automatismes sexistes mais c’est en inculquant de « bonnes » valeurs, en avançant sur le chemin d’une éducation non-sexiste, que l’on arrivera petit à petit à déconstruire tous ces stéréotypes de genre et que l’on luttera efficacement contre le sexisme, le machisme. »

Pour conclure, peut-on dire selon vous que le combat de notre génération est un combat quotidien avec les mentalités ?

« Oui, c’est un combat quotidien, qui ne date pas d’aujourd’hui et qui n’est malheureusement pas prêt de se terminer. Il faut s’armer de patience, continuer la lutte, mettre en place des stratégies pédagogiques dès le plus jeune âge, afin d’aider les petits garçons à s’émanciper des comportements machistes, et qu’ils se fassent une idée du féminisme en comprenant réellement ce combat.

Bon courage à vous, vous n’êtes pas seules !

Signé Cédric Laurent, un petit arbre féministe caché dans une grande forêt machiste. »

Elodie Pimbert
Elodie Pimbert
Journaliste « touche à tout », je suis Content Manager et rédactrice web pour le média The Body Optimist. Je m'intéresse à des sujets variés (écologie, sexualité, lgbtqia+, beauté, décoration, etc.) et ai à coeur de déconstruire les préjugés, stéréotypes et normes de notre société. Je scrute le web à l’affût des dernières évolutions et tendances. Ce n'est donc pas un hasard si j'écris et fais grandir depuis plusieurs années The Body Optimist.
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