« C’est ma grand-mère, deux jours avant de mourir, qui a déclenché mon coming out »

À l’occasion de la Journée internationale du coming-out ce 11 octobre, on a interrogé cette notion et cherché à comprendre quelle est sa place au sein de notre société aujourd’hui. On entend qu’en 2021, faire son coming-out est beaucoup plus simple qu’avant, que tout le monde le fait, et les mœurs ont évolué. Mais il y a tout de même quelques nuances à apporter à cette idée. D’où l’importance des témoignages de personnes concernées, qui nous rappellent les raisons et l’importance de pouvoir « sortir du placard ».

Un coming-out plus complexe qu’avant

Comme chaque année, depuis la marche de Washington en 1988, qui avait rassemblé près de 500 000 manifestant.e.s, la Journée internationale du « coming-out » a lieu le 11 octobre. Au départ, le coming-out se traduit par l’annonce volontaire de son orientation sexuelle. L’expression s’est popularisée dans les années 70, comme un geste émancipateur et militant pour les homosexuel.le.s.

Avec les années, le coming-out s’est complexifié. Il ne s’agit plus seulement de révéler à ses parents que l’on est gay ou lesbienne. Le terme s’étend à tout le panel LGBTQIA+ : à l’annonce de sa sexualité (gay, lesbienne, bi, asexuel.le, etc.), ainsi qu’à son identité de genre (non-binaire, queer, trans, etc.). Et cette révélation peut se faire à différents niveaux : familial, amical, mais aussi des niveaux plus « publics » comme le niveau professionnel, sportif ou social (loisirs, voisins, etc.), à travers les réseaux sociaux, par exemple.

Est-ce plus facile de faire son coming-out aujourd’hui ?

Une des grandes idées reçues aujourd’hui est que le coming-out est devenu bien plus facile qu’il y a dix ans auparavant. En effet, on voit de plus en plus de messages bienveillants et encourageants envers la communauté LGBTQIA+. Ils proviennent d’associations, des réseaux sociaux, et des contenus culturels inclusifs en tous genres.

Sur TikTok et Instagram, de plus en plus d’ados et de jeunes affichent directement dans leur bio leur identité et leurs pronoms LGBTQIA+, et sur Netflix, il.elle.s trouvent enfin des modèles et des histoires auxquels s’identifier. Des personnes homosexuelles et trans siègent dans les assemblées nationales ou gagnent des médailles olympiques. Alors oui, assumer à voix haute son identité ou son orientation sexuelle est devenu quelque chose de plus commun. Le monde est, petit à petit, plus inclusif et accueillant.

Cependant, tout est loin d’être parfait. Premièrement, si l’on sort de notre entourage, de nos contenus culturels habituels et de notre entre-soi, on observe que dans beaucoup de régions du monde, les discriminations envers les personnes LGBTQIA+ sont encore extrêmement violentes. Et dans un second point, même dans notre monde plus tolérant, le simple aveu qu’on n’appartient pas à une vision normée de la sexualité et de l’identité de genre, qu’on s’inscrit aux marges de la société, demande beaucoup de courage et d’acceptation de soi. C’est encore loin d’être considéré comme quelque chose de « banale », au même titre que dire qu’on est hétérosexuel.le.

Quelque chose que l’on fait d’abord pour soi-même

Certaines personnes ont toujours su qu’elles étaient homosexuelles ou nées dans le mauvais corps, d’autres ne le sauront que plus tard. Certaines seront dans le déni. Avant d’être accepté pour qui l’on est, il faut s’accepter tel que l’on est. Partager un aspect si intime avec ses proches joue un grand rôle dans l’acceptation de soi. Le coming-out a plusieurs fonctions importantes qui mènent, pour la plupart, à l’épanouissement, à l’amour-propre et au bien-être.

« Le coming-out le plus compliqué pour moi a été celui que je me suis fait à moi-même. J’avais jusque-là toujours été pour les garçons et puis il y a eu cette fille, dont je suis tombée amoureuse. Là, j’ai su que ce n’était pas juste une expérience. J’ai su que j’étais homosexuelle, et je ne l’avais jamais soupçonné », explique Marion au média Flair

C’est d’abord quelque chose que l’on fait pour soi-même, et non pour les autres. En consolidant son identité, on vit de manière plus authentique, et on développe son estime de soi. Les témoignages expriment plusieurs impacts positifs à la suite d’un coming-out : une sensation de libération de la pression à réagir selon une étiquette qui ne nous correspond pas, une évolution au niveau psychologique, avec un mental plus stable, de meilleures relations avec les autres.

Une libération pour certain.e.s, une épreuve pour d’autres

Pour certain.e.s, le coming-out représente un bon souvenir. C’est le cas de Nicolas, cogérant d’un bar à vin à Poitiers :

« Pour moi, c’est assez original, car c’est ma grand-mère, qui était en fin de vie, qui a provoqué une discussion avec moi au téléphone. Elle voulait que ça se passe bien et m’aider à libérer ma parole dans ma famille, deux jours avant qu’elle disparaisse. Et quand mes parents l’ont appris, c’est passé comme une lettre à la Poste. »

Mais reconnaître devant soi-même et les autres qu’on est une personne en marge des normes binaires hétérosexuelles, que nous ne sommes pas ce qu’on avait prévu pour nous peut être également très difficile. On peut se retrouver face à des visions du monde parfois étriquées, dans sa famille ou son entourage plus lointain. Et on comprend mieux que l’ouverture d’esprit se construit, qu’elle n’est jamais acquise. C’est à ses 16 ans en 2016 qu’une jeune fille aujourd’hui nommée Benjamin annonce sa transsexualité à sa mère, dans la voiture :

« J’ai attendu que l’on soit à un feu rouge parce que j’avais peur de sa réaction. Quand elle est en colère, elle se met à rouler vite. Je lui ai dit, « maman, faut que je te parle, je suis trans et je pense que je veux devenir un homme ». Elle l’a mal pris, en me disant que j’étais assez masculin comme ça, cette phrase m’a fait énormément de mal.

Quand je lui ai dit que je voulais me couper les cheveux et changer de vie, elle m’a répondu que je ferai comme je voudrai, mais ce sera sans elle. Elle n’acceptait pas du tout l’idée même de m’appeler par un autre prénom que celui qu’elle m’avait donné à ma naissance. Je sais que c’est compliqué pour l’entourage et les ami.e.s, mais à un moment donné, si on aime la personne, il faut l’accepter, et surtout la soutenir et l’encourager », explique Benjamin à France Bleu

La peur du jugement des autres

L’entourage proche a un rôle essentiel dans l’acceptation de soi. Parfois, il réagit avec bienveillance et protection. Mais derrière ces sentiments peut se cacher une inquiétude pour leur proche, pour sa vie « out of the closet ». Une peur que cette personne soit la cible de jugements, d’insultes, d’intimidations, de regards et de comportements violents.

C’est le cas d’Augustin qui se souvient des mots de sa mère lorsqu’il lui a annoncé qu’il était homosexuel :

« Tu sais Augustin, pour moi, ça ne change rien, je suis une maman, ta maman et en tant que tel je ne veux que ton bonheur. Après je ne te cache pas que ça m’attriste. Oui, je suis triste de me dire que tu vas devoir vivre une vie moins facile que les autres de par tes sentiments. Sois prudent, car dans le monde où nous vivons il y a encore beaucoup d’inégalité et d’incompréhension et de dégoût face à l’homosexualité, mais chez nous ce ne sera jamais le cas. »

Le coming-out, un combat de tous les jours

Finalement, le coming-out peut être perçu comme un geste militant pour les droits de la communauté LGBTQIA+, comme il l’était à ses débuts. Dans l’ensemble, il représente un événement éprouvant pour la personne concernée. Surtout quand on sait que dans notre société, un coming-out ne suffit pas. Il faut se réaffirmer devant chaque nouvelle personne qui va nous remettre dans une mauvaise case.

Le coming-out est un combat quotidien pour ouvrir les mentalités à l’inclusion et la diversité. Une lutte qui demande de la force, une réelle communauté soudée et de la patience face aux violences quotidiennes. Ce combat doit continuer à être mené !

Et vous, quel regard portez-vous sur le coming-out ? Pensez-vous qu’il est plus simple de faire son coming-out de nos jours ? Venez partager vos avis/impressions sur le forum de The Body Optimist !

Cindy Viallon
Cindy Viallon
Journaliste free-lance, mes sujets de prédilection sont les féminismes intersectionnels, la société et la culture. J’aime déconstruire l’actualité et briser les tabous une fois pour tous·tes !
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